Vers le bureau de la psy (Privé Maybeth)

Je venais de sortir de la salle commune. Ma derniere rencontre avec Yuuri n’avait pas été fructueuse. Je ne savais même plus si j’étais en colère, désespéré, triste ou découragé. Mais j’étais abasourdit qu’il soit devenu … Méchant au point de ne même pas m’aider. Au point de laisser Steve s’en prendre à quelqu’un d’autre que moi, à la seule chose que j’avais dans ma vie.

Je serrais les poings, cette pensée me rendait fou! J’étais furieux d’être ici et de ne rien pouvoir faire. Ne pas pouvoir agir pour une fois dans ma vie que je tenais à quelqu’un.

Je baissais la tête à cette pensée. Si ce gardien lui touchait par ma faute, parce que je ne m’étais pas laissé faire …

Durant ma rencontre avec Yuuri un nom avait fait surface dans mon esprit… Cette fille qui m’avait accueillit lors de mon arrivé à Sadismus … Malgré son air effrayé, elle m’aiderait peut-être … Sinon, et bien j’utiliserais la force, avec elle ce ne devrait pas être trop compliqué

Je fronçais les sourcils, être réduit à me dire que je ne courais aucun danger avec cette fille … Je n’avais jamais songé de cette façon, la prison m’avais forcé à faire toutes sortes de choses, totalement contraire à mes valeurs et à ma façon de vivre, c’était certainement normal, j’étais en prison, je n’avais plus aucun droit. Mais il y avait une limite!! Eddy n’avait pas à être mêlée à tout ça, et je ne devais pas craindre pour ma famille. Je n’avais jamais eu peur une seule fois pour ma vie ici. Malgré mon caractère.

J’étais perdu dans mes pensées … Si bien que je n’aperçu pas la personne dans qui je venais de foncer …

-Aieuh! je pousse en heurtant quelqu'un de plein fouet.

Je manque de tomber vers l'arrière et de m'écraser platement comme je sais si bien le faire, mais je parviens à me retenir à la manche d'un bienheureux je ne sais pas encore trop qui. Enfin peu importe. Cette personne, même si elle vient de me percuter, peut être bénie des dieux. Je plisse le nez et les yeux un moment, puis rouvre les paupières.

-Oh Carl, c'est toi, je dis doucement.

Je ne l'ai vu qu'une fois, à son arrivée ici. J'ai retenu son prénom, comme je le fais avec tout le monde grâce à ma mémoire d'éléphant. Je ne sais pas trop si je suis contente de le voir, ni si lui l'est aussi de me rencontrer, d'entrer en collision avec moi surtout... En tout cas je lui souris poliment. Je me souviens très bien qu'il ne semblait pas trop m'apprécier la dernière fois, revêche, bête comme ses deux pieds… Je constate qu'il a l'air troublé. Aux rides qui se sont creusées sur son front, je devine que quelque chose de très pénible doit le tracasser depuis quelques temps.

-Ça va? je demande en penchant la tête vers la gauche. Tu as une mine affreuse.

Peut-être qu'il a du mal à dormir, peut-être qu'il a des ennuis avec un autre prisonniers, ou avec un gardien. Je ne sais pas. Ce sont le genre de choses que je ne peux pas deviner juste à la gestuelle des gens. Ce qui est sûr, c'est que quelque chose le travaille et ne l'épargne pas. Il a l'air amoché. J'ai entendu dire qu'il s'était battu à plusieurs reprises. Son dossier à l'infirmerie peut d'ailleurs en témoigner. Si l'on y instaurait un système de carte de fidélité, il en serait sûrement. Mais je m'égare. Je secoue doucement la tête pour me remettre les idées en place, en attendant qu'il daigne bien m'éclairer sur sa situation, si bien sûr il en a envie.

Lorsque je fonçais dans une personne je laissais échapper un petit « Excusez-moi » … Si j’avais foncé dans un autre prisonnier je n’aurais certainement rien dit, enfin, je n’aurais rien dit habituellement, ce devait être parce que j’était un peu ailleurs.

Je restais surpris en voyant que c’était la personne à laquelle j’étais en train de penser voila quelques secondes. Maintenant qu’elle était là je ne savais plus quoi lui dire. Je restais silencieux longuement jusqu’à ce qu’elle me demande comment j’allais … Comment j’allais, je n’avais jamais été aussi mal en fait, mais c’était une prison, c’était fait pour ça je crois.

Je me passais nerveusement la main dans les cheveux. Je ne savais pas pourquoi je faisais ce geste avec elle, certainement parce que je voulais lui demander quelque chose, et qu’il était important qu’elle accepte, j’étais quasi désespéré. Je dis d’une voix basse :

-Je … J’ai quelque chose à vous demander.

J’en avais assez de me ridiculiser, j’étais quelqu’un pour qui l’honneur était quelque chose d’important, je n’aimais pas perdre la face, mais je l’avais perdu dès la première journée que j’avais passé dans cette prison.

J’attendis sa réponse. Je n’avais plus envi de demander de l’aide. Mais j’étais désespéré, je ne voulais pas qu’il arrive malheur à Eddy.

Il se passe la main dans les cheveux, comme la première fois où je l’ai vu. Il y a des chances et des gens qui ne changeront jamais. Moi par exemple. J’ai beau faire tous les efforts possibles, je reste la petite chose effrayée que je suis devenue dans ma jeunesse. L’entretien avec Stanley m’a durement secouée les puces. Je perds de ma déjà maigre confiance au fil des jours.

-Je … J’ai quelque chose à vous demander.

Quoi? Je ne peux pas être plus surprise qu’en ce moment. Carl Hyde? Me demander quelque chose? C’est encore plus grave que je croyais. Je reste un court instant la bouche entrouverte, ne sachant pas trop quoi dire, ni comment réagir. Je finis par me ressaisir et me montrer plus efficace. Je pince mes lèvres et les humecte un peu avant de prendre la parole d’une voix mal assurée. – comme si ça changeait quelque chose à mes habitudes –

-De quoi s’agit-il?

C’est vrai, j’aurais pu trouver mieux. Ça n’invite pas aux confidences. C’est trop distant, trop banal, pas du tout chaleureux. Je me rends compte que je l’endroit non plus n’est pas particulièrement bien choisi. Je me racle la gorge et reprends, plus lentement.

-Tu es à l’aise de m’en parler ici ou tu as une préférence pour mon bureau?

Après tout, si c’est grave, il n’a peut-être pas envie que n’importe qui puisse surprendre nos propos. Mais peut-être aussi que je m’inquiète pour rien. Il veut peut-être juste me demander où sont les toilettes… Non bien sûr que non. Juste à voir son visage je sais qu’il se passe quelque chose de pas trop net dans sa tête.

Je baissais la tête, soudainement intéressé par mes pieds. Je n’avais plus envi de demander quelque chose. Je n’avais qu’une seule envie c’était de retourner dans ma cellule et de me taire. De ne plus songer au fait que Steve était peut-être en train d’agresser ma femme et mes enfants. Ou bien qu’il se préparait à le faire, et qu’à la moindre erreur de ma part, il irait immédiatement.
Je fronçais les sourcils. Je devais absolument mettre tout ça de coté, et agir comme je le devais. Ce n’était plus question de moi ici, peut importe ce que les autres pouvaient penser, l’opinion des autres n’avait jamais compté pour moi, alors ce devait être la même chose ici.

Je relevais la tête, posant mon regard dans le sien, je devais avoir l’air fatigué, ennuyer, maladif presque. Je ne mangeais presque pas. Je me battais tout le temps, mais ça ce n’était pas vraiment un problème pour moi. Mais je devais éviter les gardiens puisque je n’avais aucune chance contre eux de toute façon.
Je soupirais puis je dis finalement d’une voix basse :

-Je ne parlerais pas longtemps.

Non. Je n’avais pas grand-chose à dire. Une seule phrase. Si elle voulait savoir autre chose, c’était à elle de me le demander, je crois que je lui expliquerais, sans trop de détail sur mon cas, car expliquer qu’un autre homme m’avait touché et avant tenté de me violer serait encore plus douloureux de le raconter que de le vivre. Et de toute façon je n’étais pas assez loquace pour raconter ce genre d’histoires.
J’avalais difficilement et je poursuivis en disant :

-…Je veux téléphoner … Je veux simplement faire un appel. Un seul.

J’avais déjà fait la demande à Yuuri et évidement il me l’avait refusé, je savais que c’était interdit, mais bon sang! Je ne tentais pas de m’échapper. Pour une fois dans ma vie que je voulais seulement protéger quelqu’un l’ont me le refusait? Je serrais les poings et je détournais le regard à cette pensée. Je n’avais pas envi de lui raconter tout ce qu’il m’arrivait, je voulais simplement qu’elle me laisse le droit à un appel, elle pourrait être là si elle le voulait.

Je gardais mon regard ailleurs. Je ne savais pas comment elle réagirait à cette demande. Mais j’espérais tellement qu’elle me dise « Bien sure Carl … Tu peux faire un appel » …

Je n'ai jamais considéré Carl comme quelqu'un d'apte à cacher ce qu'il ressent, mais en ce moment, il est moins habile que jamais dans ce domaine. Sa manière de baisser la tête devant moi – chose que je ne vois que rarement – me montre clairement qu'il n'a pas envie de se trouver ici, ou encore qu'il n'a pas envie de parler, qu'il craint la réponse que je lui offrirai.

-Je ne parlerais pas longtemps.

Je hoche la tête. C'est comme il veut. Je ne suis pas là pour le forcer de toute façon. Je ne suis même pas dans mon bureau. Je pourrais, si j'en avais envie, lui poser tout un tas de questions pour avoir des précisions, mais je sais qu'il me les apportera par lui-même. Je n'ai qu'à attendre qu'il se décide à dire le premier mot. J'ai confiance qu'ensuite, ça coulera tout seul. Dans l'état où il se trouve en plus, je ne pourrais pas lui refuser quelque chose.

-…Je veux téléphoner … Je veux simplement faire un appel. Un seul.

Oups… Je ne veux pas le lui refuser, mais reste que c'est interdit. Je n'ai pas le droit de l'envoyer téléphoner comme ça. J'affiche un air désolé, qui est très sincère. J'aimerais vraiment l'aider, mais c'est hors de mon pouvoir. Oui j'ai la clé du local - j'ai la clé pour tout d'ailleurs - mais je ne peux pas le lui ouvrir. C'est contre le règlement. Je secoue la tête avec regret.

-Je suis désolée Carl, mais le règlement me l'interdit.

Je regrette mes paroles. J'aurais vraiment aimé pouvoir lui dire oui, mais c'est hors de mon pouvoir. Déjà que je déteste prendre une décision – d'où mon surnom – je déteste défier les règles. Ça me donne toujours cette horrible boule au creux de l'estomac. Remarque que j'ai cette boule en ce moment, une boule de regret.

-S'il vous plait, je l'entends murmurer.

Je suis la première surprise. Ces mots semblent lui avoir coûté très cher de salive et de fierté. Sa voix est cassée, éraillée, me donne l'impression qu'il est vraiment au bout du rouleau. Je tape du pied. Qu'est-ce que je dois faire dans cette situation?

-Tu ne voudrais pas me dire de quoi il en retourne? Ce serait plus facile pour moi de juger. Je ne te promets rien, mais dans le pire des cas, si je ne peux vraiment pas te laisser faire cet appel, je le ferai pour toi.

Maintenant, les chances qu'un homme comme Carl s'ouvre à moi – je ne suis pas bête – sont très minces. Espérer des confidences de sa part est risqué. Il pourrait tout aussi bien s'en aller, à cran, me frapper, ou, peu probable, tout me raconter dans les détails.

Je relevais la tête lorsqu’elle me le refusa. Je ne savais même plus comment réagir, qu’est-ce que je pouvais faire? La frapper? Lui voler ses clés? Je ne savais même pas où aller et si elle avait la clé pour téléphoner.

Tu ne voudrais pas me dire de quoi il en retourne? Me demanda t’elle.

Ha bon sang, je détestais vraiment ce genre de chose, en fait je ne faisais pas que le détester mais j’en étais incapable, je n’avais jamais parlé de se que je ressentais, de ce que j’avais pu vivre à qui que ce soit. Même lorsque j’avais tué Sarah, personne n’avait su la vraie raison, j’aimais entendre que j’avais eu une crise et que je l’avais bêtement tuée.

Je me repasse la main dans les cheveux et je dis sèchement :

-Qu’est-ce que vous voulez savoir … Il n’y a rien à savoir …

Un simple téléphone … Est-ce que je pouvais m’enfuir en téléphonant? Je reposais mes yeux dans les siens lorsqu’elle dit :

Si je ne peux vraiment pas te laisser faire cet appel, je le ferai pour toi.

Je dis rapidement :

-Oui bien faites le pour moi!

Je fronçais les sourcils. J’avais parlé un peu vite, Eddy n’écouterait certainement pas une inconnue qui lui dirait de partir loin, je tournais un peu la tête, découragé et je dis :

-…Non, elle ne vous écouteras pas …

Je ne savais plus quoi faire, je n’avais jamais travaillé aussi activement pour aider quelqu’un. Disons que j’étais bien meilleur pour assassiner une personne. Elle voulait que je lui raconte, je dis simplement :

-Une personne est en dangée …

Je ne dis rien de plus, les choses sortaient toujours étrangement de ma bouche. Je savais que ce n’était pas très clair mais je ne savais pas comment le dire d’une autre façon.

-Oui bien faites le pour moi!

Tiens… aussi facile? J'en doute si je me fie au froncement de sourcil qui vient juste après, et aussi au fait que je m'adresse à Carl. Dans un tout petit moment, il va m'annoncer qu'il retire ses paroles, de quelque façon que ce soit. Voilà.

-…Non, elle ne vous écoutera pas …

Elle. Je me mets à chercher à toute vitesse qui peut être ce "elle". Une conjointe? Une fille? Une amie? Une parente? Les possibilités sont infinies. Surtout que je ne me souviens pas de mes lectures sur le cas de Carl. Avait-il une fille? Je ne pourrais pas le dire.

-Une personne est en danger …

C'est à mon tour de froncer les sourcils. D'après ce que je devine, il ne plaisante pas, ni ne me ment. Il a vraiment la tête de quelqu'un qui s'inquiète. – c'était donc sur ça que je n'arrivais pas à mettre le doigt un peu plus tôt – Je pousse un soupire. On m'a toujours traitée de fille naïve. Pourtant, je ne le suis pas tant que ça. Je sais déceler le mensonge chez presque n'importe qui, et Carl n'a pas l'air d'un menteur. Toutefois si je me trompe, j'aurai des ennuis et lui aussi. – ça ce n'est pas souhaitable parce qu'il en a déjà un paquet à ce qu'on dit –

-Écoute Carl je ne sais pas quoi te dire, j'avoue. Je pourrais t'ouvrir le local, c'est certain. Mais est-ce que je vais le regretter par la suite? Je te dirais que j'ai confiance que non… mais si je me trompais? Mets-toi à ma place.

D'accord. J'ai la trouille des conséquences. Qui est-ce que ça étonnerait? J'ai la trouille de tout ce qui n'est pas un long fleuve tranquille. Je frotte le tissu de mon tailleur entre mon pouce et mon index de manière frénétique, comme je le fais quand quelque chose me travaille. Je finis par hocher la tête.

-C'est d'accord, je finis par dire. Mais si quelqu'un en entend parler, toi et moi sommes morts. Alors tiens ta langue s'il te plait.

Maybeth, tu te mets dans la merde. Je pousse un autre soupire. Bien sûr, je n'en reste pas là.

-Mais je veux savoir ce qui se passe. Promets-moi qu'en échange, un jour, tu viendras me raconter cette histoire dans tous ses détails.

J’avalais difficilement. Je ne savais pas jusqu’où j’irais si elle n’acceptait pas. J’étais imprévisible. Même pour moi.

-Écoute Carl je ne sais pas quoi te dire, j'avoue. Je pourrais t'ouvrir le local, c'est certain. Mais est-ce que je vais le regretter par la suite? Je te dirais que j'ai confiance que non… mais si je me trompais? Mets-toi à ma place.

C’est évident qu’elle ne peut pas avoir confiance. Je suis le tueur et elle la psychologue. Mais j’ai l’impression qu’elle va céder. Tant mieux car je n’avais aucune envi de la brutalisée.
Je dis simplement :

-Vous ne le regretterez pas …

C’était vrai. Je voulais simplement dire à Eddy de foutre le camp. Simplement cela, Je n’étais pas un menteur de toute façon, un bien mauvais menteur, si elle devinait mes moindres gestes elle comprendrait aussitôt lorsque je mens et ce n’est pas le cas maintenant.

C'est d'accord, je finis par dire. Mais si quelqu'un en entend parler, toi et moi sommes morts. Alors tiens ta langue s'il te plait.

Je relève brusquement la tête. Elle avait accepté! Je ne savais plus quoi dire, elle ajouta rapidement que en échange je devrais lui raconter ce qui se passe. Je le ferais.

-Daccord. Dis-je simplement.

J’avais parlé d’une voix plus douce. Soulagée peut-être? Je ne savais pas mais c’était un terrible poids qui s’enlevait de sur mes épaules. Je n’aurais pas supporté de rester sans savoir. Et j’avais également peur que ce soit déjà arrivé … Mais j’en doutais, pas aussi rapidement.
Je fixais Maybeth, je dis d’une petite voix :

-Merci …

Ce n’était pas mon style de remercier, mais elle était la première à m’aider ici.
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[suite à la salle des téléphones]