You never thought to question why. [PV Faith.]

J'y ai cru trois secondes.

Elle a dit mon nom, et j'ai eu un peu d'espoir, puis elle s'est mise à rire. Je ne pensais pas qu'un rire pouvait contenir autant de folie, ça fait peur. Je me suis un peu recrovillé, et je l'ai écouter parler, c'est tout ce que je pouvais faire. Elle pense que je suis mort avec l'« autre tapetteux ». Elle ne s'est pas demandé pourquoi un mec est venu comme ça pour tuer tout le monde ? N'a t'elle pas entendu le « On touche pas à Charity » que Silence avait dit suffisament fort pour que ça m'arrive aux oreilles ?

Non, elle n'a rien vu, rien entendu, et rien compris.

C'est pour ça qu'elle est là d'ailleurs.

J'allume inconsciemment une cigarette, et elle parle. Elle me prend pour la « Grande Faucheuse », et me fait ses voeux pour les vivant. Bon merde j'suis mort ou pas ? Non... Mais je tuerais cette Bella Hope si tu veux, si ça pouvais te rendre moins.... Terrifiante... Elle me raconte sa vie, elle s'ouvre à moi d'une manière absolu et ça me fait peur, j'ai envie de m'enfuir, je devrais pas entendre ça. Mais non, je reste là et j'ai un visage un peu près impassible, sauf mon petit coeur qui bat trop fort. Elle veut plus vivre. Elle pense à moi. Elle m'aime.

Faut que je la sorte de là.

Je me traine vers elle et je la prend dans mes bras, qui n'ont rien de ceux de la faucheuse je tiens à le dire. Arrêtes de chanter, je suis plus un enfant, et dans ta bouche, dans cet état, dans cet endroit, tu arrives à transformer une comptine en chant d'horreur pour saluer les morts.

Belle alchimie.

- Faith... C'est le toxico-bourré à temps partiel qui est là... Je suis pas mort, on m'a emmené à l'hôpital... Viens, rentrons....

A la chambre bien sur, c'est ce que je sous-entendais. Je me lève péniblement, mais elle non. Je cale mes béquilles sous mes coudes plus confortablement, et la regarde, dubitatif. Non, elle n'est pas en état de se lever, elle a énormément maigris. Je mets mes béquilles sur le mur et pose timidement et très légèrement mon pied sur le sol. On va y arriver... Je tends la main, attrape la sienne et tire vers moi. Lève toi s'il te plaît, je vais pas pouvoir te porter.... Ca se voit, non ? Non, visiblement non, tu t'en fous et tu te débas. Je te prend contre moi et tente de t'empècher de me donner des coups. Tenter, ce n'est pas réussir, et mon épaule va surement désormais arborer des traces de dents. Aïe j'ai mal.

- Faith bordel c'est moi, Charity, l'autre con si tu veux... J'te jure, tu vas pas mourir... Crois moi !

Puis elle se calme.

Elle est pas bien grosse, je dirais un maximum de cinquante kilos. Le Charity en relative bonne santé que je suis peut la porter, et il le fait. Le con. Le problème étant qu'il faut que je grimpe des escaliers et que je traverse la moitié de la prison alors que j'ai théoriquement pas le droit de trop me servir de mon pied, puis aussi que les muscles de ma cuisse droite ont été partiellement cramés ( Moxie a aimé appuyé bien fort...), et qu'il sont pas op pour ce genre d'exercice.

En clair ? Je vais en chier !

Je sors de la pièce avec mon très fragile paquet dans les bras. Extrèmement fragile. Un gardien paniqué vient me voir (Celui qui a dû m'aider à descendre les marches tellement j'en chiait justement. ), et me propose une civière, un truc comme ça. Je l'envois chier, personnne touche ma soeur, et surtout pas un medecin. Mais j'ai du mal quand même, parce que j'ai mal, parce que ça fait beaucoup de poids sur moi, parce qu'il y a des escaliers...

Tu me pardonnes dis si je te porte comme un sac de riz ?

Je la hisse sur mon épaule, désolé, vraiment, je peux pas te porte comme une princesse en train d'être sauvé de son donjon...

...

Marcher c'est long, surtout quand on marche comme moi, ma jambe droite se traine derrière ma petite personne, je boîte bas. J'essaye de composer avec la douleur physique, avec la lassitude, avec « tout ça ».

Comme ma petite soeur malade par exemple.

Mais on finit par y arriver, forcément, on finit toujours par y arriver... On finit toujours devant cette putain de piaule avec sa frangine dans les bras. Oui, voilà, il n'y a personne dedans, juste nous deux, t'es contente ? J'ai prévenu Silence avec un mot que j'allais chercher ma soeur ce matin, et là, l'heure de bouffer doit bien être passé, qu'en penses tu ? J'ouvres la porte, je me précipite sur mon lit et je pose aussi délicatement que possible ma soeur sur les draps. Ensuite je m'assois près d'elle, parce que si je tiens debout une seconde de plus, je vais huler. Je la regarde, elle est blanche, très blanche, maigre à faire peur, elle a l'air morte, même si sa poitrine se soulève régulièrement et profondément. Je n'assisterais pas à la mort de ma soeur. J'me dis qu'on l'aurais laisser crever dans cette pièce pour la même raison qui fait que Silence s'est enfuit du lit une fois, mort de trouille.

Le monde est plein de connards.

Petit regard à la piaule, rien n'a changer de son coté, je suis même sur qu'il y a toujours la game boy dans un coin. Le mien ? Ben j'ai emmené des fringues chez Silence, tout ça... Ca fait plus... Désert... Mais il en reste quand même un peu ici, de mes affaires, mais pas tellement. Ma vie cassé en deux gros morceaux, voilà une jolie métaphore. Y a pas vraiment de choix à faire, c'est juste que j'aime bien compartimenter ma vie.

- Faith ? Tu vas bien ? Je t'ai pas fait mal en te portant ?

Je lui parle d'une voix de gentil, mais mes cordes vocales se prètent mal à cet exercice. J'allume une autre cigarette, j'en ai besoin, extrèmement besoin. Il faut que je lui explique, que si Silence était pas venu, on serait sortit de cette pièce entre quatre planches. Faut pas qu'elle en veuille à Silence, surtout pas, faut pas qu'elle lui fasse du mal. C'est tout ce que je sais....

- Faith... Ce mec nous pas fait de mal, il en aurait pas fait... Moxie était en train de... Me brûler... Et Rodolphe était arrivé avec un putain de flingue, le mien. Il me l'avait enfoncé dans la bouche Faith, on allait crever... Il ne t'arriveras plus de mal, je te le promets, mais il faut surtout pas que tu dénonces le mec...

Voilà, je sais pas si Silence lui avait expliqué, mais moi je l'ai fait. C'est mal ? Lui casser les couilles avec un truc auquelle elle n'avait peut être même pas pensé ? Rien à foutre, on ne fait pas de mal à Silence, et à Faith non plus. Mais pourquoi ? Je sais pas... Je crois que c'est parce que...

- T'as faim ? Tu veux des barres de céréales ? J'dois avoir ça quelque part...

M'étant aperçu en rentrant de l'hôpital qu'avoir de la bouffe dans sa chambre, c'est le bien, j'en avais acheté un peu l'autre jour, en même temps que ma cartouche de clopes hebdomadaire. ( On comprend maintenant pourquoi je suis pauvre... ) J'attrape mon sac et je pose trois putain de barres sur elle, hein que t'as faim ? Dis, allez, meurs pas hein ? T'as pas interêt ! Si tu meurs j'te bute ! J'aspire une nouvelle bouffée de nicotine et retire enfin la botte de mon pied droit. Ca fait mal. Je fais une petite grimace de douleur en posant mon pied couert de sa seule chaussette sur le sol. Connard de toubib. A l'intérieur de mes doigts de pieds, ça doit être de la bouillie d'os tu vois...

- ... Ca va ?

Je crois que y a environ sept ans, j'aurais dû oser te parler, te téléphoner, ça aurait évité beaucoup de chose.

Parce que j'ai eu besoin d'aide.

Je comprend pas, je regardais ma petite soeur, et puis elle s'est mise à hurler et elle m'a sauté dessus. La pièce a volé autour de moi, et je me suis douloureusement receptionné sur le dos. J'ai mal. Ma tête a fait boum contre le sol froid et dur et j'me suis fais mal un peu partout en tentant de me tenir au lit. Elle se blotit contre moi, en tremblant et tout. Moi je regarde les lumières danser un peu devant mes yeux. Owww c'est jolie...

- Je l'ai vu... Il allait... Il allait te tuer.

Un peu de mouillé sur moi, elle pleure. Je ne bouge pas, pas encore, j'arrive pas à lier mentalement les éléments qu'elle me propose. Il n'y a personne dans la pièce mise à part nous, mais je sais que ça ne veut rien dire. Que voit elle ? Des hallucinations ? Le choc des meutres lui ferait voir des choses ? C'est ma faute ? Je la met en état de stress ? J'ai agravé son état en venant la chercher ? ... Non... Elle ne pouvait pas aller mieux dans une cellule d'isolement. Mais... Je sais pas, il faut que je la rapatrie en France ? Non, si ? ... Merde.

- C'est Rodolphe, j'te jure... Il avait une arme... Charity ?

Hum ?

- J'suis folle ?

Bah écoute euuuuuh... Mise à part que tu viens de me pulvériser contre le sol en me poussant et que tu hurles et que tu vois des choses ? Ce n'est pas ta faute, ma pauvre. Je la sers contre moi, là, sur le sol, encore un peu sonné. Je peux pas t'en vouloir, vraiment pas. Ce n'est pas ta faute. Pourquoi je n'ai pratiquement gardé aucune séquelles de cette scène alors que toi tu... Enfin voilà quoi. Mais je me méfie, le PTSD et ses symptomes commencent plutôt à aparaitre au bout de plusieurs semaines.
On s'en fout à la limite.
Je me redresse, avec, toujours, ma soeur sur moi. J'vais pas la chasser hein, c'est pas exprès si... Oh, fuck... Je l'entoure de mes bras et je la serre contre moi. Ecoute, même si je viens de me manger le sol, je peux pas t'en vouloir. Ahahahaha, comme je suis... Généreux... Oh merde, j'aime vraiment pas cette qualité, vas savoir pourquoi hein.
Donc là, j'ai deux options. Petit un, je lui explique que y a que nous dans la pièce, quitte à lui mettre la misère mentalement. Petit deux, je la garde contre moi et je dis rien, et je subis ses hallucinations avec un sourire gèné.

J'opte pour l'option trois.

C'est ainsi que je lui murmure, dans un français assez barbare :

- Nan mais t'inquiète, Rodolphe j'lui ai mit la misère l'autre fois, il bluff là. Il fait genre il va me tuer mais il peut pas, c't'un sacré con. Puis si Moxie est là aussi beeen... Il peut rien nous faire non plus de toute façon.

Tu me crois ?
Nan mais si ils trouvent le moyen de me casser les couilles même morts, j'ai plus qu'à me soumettre hein ? Doux souvenir refluant à la surface, celui de ma grande soeur venant chez moi en panique avec un oeil au beurre noir et une crainte, celle de divorcer.
Il méritait bien de crever, ce con.
Et Moxie ? Pas grand chose à y associer, mais cette dernière demi-heure ensemble m'aura laisser un souvenir imperissable. Haussement d'épaule mental.
Voilà toute l'oraison funèbre que reçurent deux braves gars ayant pour seul tord soit d'être con comme une buche, soit de s'être fait violer jusqu'à ce que folie s'en suive, puis mort. Oui, le petit m'avait fait cet aveux là avant que Silence ne se ramène...
Bien sur, je garderais ça pour moi, ainsi que les violences conjugales de Hope.

Il y a des choses qui gagnent à rester cachées, songeais je en posant ma tête sur celle de ma soeur.

C'est terrifiant.
La nana qui hier encore me considèrait en gros comme une merde s'en remet à moi, d'une manière totale, qui ne peut pas laisser place à l'indifférence ou au refus. Je la porte ou elle s'effrondre, et, bizarrement ça me rappelle quelqu'un. Pas d'une manière aussi... Exubérante, mais un peu dans ce style là, je sais pas pourquoi j'en tire cette interprétation là...
Qu'est ce que je dois faire ?
Elle s'agripe fort à moi, très fort, et ça me fait peur, cet abandon là. Qu'est ce que tu fous ? Pourquoi moi ? Qu'est ce que j'ai qui fait que les gens sont comme ça envers moi ? Enfin... Silence n'est pas aussi... Attends, je cherche un adjectif, disons que Silence se jette pas dans mes bras en me parlant du bonheur comme si c'était quelque chose de définitif. En fait, j'ai deux obligations dans la vie, imposées par les gens autour de moi : Rester en vie et être heureux. Si je contredis ces trucs là, tout se casse la gueule. Ca fait quand même un peu peur, genre. Et j'suis pas en position d'avoir les même exigences envers Faith aparament, d'après elle, c'est foutu. J'pourrais répondre un truc du style « mon bonheur passe par le tien. », mais j'ai pas le feeling pour sortir ce genre de trucs, j'suis plutôt dans le barbare moi. Mon éducation de mâle viril m'interdis de parler comme une série drama et d'avoir des sentiments plus intense que l'indifférence teintée de mépris.
Théoriquement.
Alors comme je suis en gros aussi à l'aise dans la situation qu'un poisson rouge dans un pot de ciment frais, bah j'l'écoute parler. Qu'est ce que tu veux que je fasses d'autre ? C'est un bon début moi je trouve, nan ? Oh, je sais plus rien moi en ce moment, y a trop de trucs qui changent, et trop vite. Une vague envie d'hurler « MAIS POURQUOI TU M'AS PAS DIT TOUT CA AVANT ?! » avec un soupçon de confusion. Peut être parce que ses mots sont atrocement crus et franc. Une franchise pareille, ça surprend, surtout quand on est habitué aux mots fadasse et sans saveur. «  Ca vas ? » «  Il fait beau aujourd'hui nan ? », pas tellement l'habitude du « SOIS HEUREUX ! » qui semble être le leimotiv de tout ces gens là. Quelque part, j'ai toujours attendu cette sincèrité là.

- Parle moi.

Mais evidemment, je dis rien moi, j'suis pas une poupée parlante hein. Je prend ses petites mains entre mes doigts et les examinent un peu. Ses bobo quoi. Ils sont tout abimés, ses petits doigts, comme si elle avait griffé les murs pendant des heures... Je fais jouer les articulations, nan, rien de casser par là, je l'aurais entendu hurler sinon.
Je devrais pas avoir à gérer des choses comme ça.
Bon, avouons le, je suis à moitié saoul. J'suis en phase de cuvage là, la gueule de bois va me fondre dessus, façon rapace sur le lapin si t'aimes bien, et ensuite viendra, comme la mer laisse les rochers à nu en se retirant, le manque.
Comprennez bien que pour en arriver à ce point là, faut quand même de longues années de pratique derrière soi.
Passons, ce ni le moment ni le lieu pour parler de ma petite personne et de ses problèmes si existentiels. Parce que tout le monde s'en fout, parce que je suis « Heureux ! ». Je passe ma main dans les cheveux de ma petite soeur, et il en ressort une main poisseuse de sang et de crasse. J'ai peur de lui avoir fait mal. Faut que je fasse... Quelque chose... J'sais pas, n'importe quoi. Alors en réponse à mon angoisse, ma main, comme elle est attentionnée, vient chercher mon paquet de cigarette et mon briquet et porte tout ce petit bazard à ma bouche.

- T'en veux une ?

Je pose le paquet et l'allume-clope sur le sol à coté de nos et je calle ma soeur dans une position plus confortable en m'asseyant en tailleur et en l'apuyant sur moi. Avec les filles de cinquante cinq kilos en anorak mouillé, ça va, je peux faire le mâle viril et protecteur, mais avec Silence, ça le fait moins, parce que je peux pratiquement me cacher derrière son corps totalement qu'on verrait pas un seul bout de ma personne depasser. Moi à noël j'veux le même cul que lui, et les épaules aussi, puis les abdo et les pec' tant qu'à faire. Enfin bref. Arrêtons de sourire niaisement. Je tapote ma cigarette pour faire tomber les cendre par terre. ( On s'en branle, c'est moi qui nettoie, j'ai le droit de salir. ) Calme toi mec, t'es ailleurs.

- Ben j'sais pas, tu veux que je parle de quoi ?

Mes bras sont autour d'elle, et viennent instinctivement faire tourner l'alliance autour de mon annulaire... Qui n'est plus là. Ah oui, je l'ai balancé à l'hôpital. C'était le bon temps...
Tu me manques, ducon.
Et toi aussi, duconne.

Je crois qu'avant, j'aurais pas pu la prendre comme ça dans mes bras, j'aurais pu prendre personne comme ça. La vie vous offre parfois de petites scènes surréalistes. J'ai pas souvent fait de câlins, sauf à Hope, parfois, ou à ma mère quand j'avais quatre ans, alors que je m'en suis découvert une véritable passion depuis. Je trouve ça génial, de tenir quelqu'un dans ses bras. C'est tout chaud et puis c'est très... Humain, comme truc. Ouais, j'suis p'tète un peu bizarre d'y accorder autant d'importance, mais c'est la faute à Silence d'abord ( Dit il alors que le Silence le plus proche se trouvait être vachement loin ). Je sais pas, c'est un peu flippant, ça va vachement vite. Mais bon, soucions nous plutôt de notre sœur qui sort des phrases toutes chelou. Parler du bonheur qui... Nous entoure ? Euh... J'arriverais pas à me lancer sur un sujet qui l'air aussi profond, désolé. Je comprend même pas la phrase et je vois pas quoi dire non plus dessus d'ailleurs. J'ai jamais été très intelligent, soyons lucide là dessus, la philosophie ou les trucs comme ça, ça me passe largement au dessus de la tête.
Ah elle rigole.
C'était pour déconner en fait...
Lumière de compréhension dans mes petits yeux de fouines. Y manque plus que la lumière divine et la musique sacrée, et ça y est, un mec a de nouveaux reçu les tablettes. Bon dieu, où est passé mon sens de l'humour hein ?
Un peu de sang sur mon jeans, ça aussi c'est original.
Je regarde son visage, inquiet, elle s'est mordu la langue, elles s'est juste mordu la langue. Putain. Bon, le câlin à pas l'air de la déranger, vu qu'elle bouge pas, c'bon, j'peux la garder. En toute amitié, bien sûr, déjà d'une c'est ma sœur et l'inceste n'est pas un trip que je me souhaite, et de deux je suis suposément gay quand même (Là, placer un grognement intérieur de mécontentement). Donc voilà, ce câlin n'a rien de... Plus que fraternel quoi. J'espère qu'elle a pas peur ou un truc comme ça, ça me ferait vraiment chier.
Mais qu'est ce que je me prends la tête pour un putain de câlin.

- Charity...Où est passée ton alliance ?

Ah.
Ah.
Ah...

...

Merde.

Dans ton cul mec.
Je garde un air plus ou moins impassible, alors que intérieurement, je me massacre le crâne pour trouver quel bobard je vais bien pouvoir lui fournir. Hum, c'est pas tellement le fait que Silence soit un mec qui est gênant (J'ai pris la ferme résolution de m'en foutre, rappelez vous en), c'est surtout qu'il a tué deux types sous nos yeux. J'vois pas trop comment je vais expliquer ça à Faith. Enfin c'est pas lui expliquer qui serait dur, c'est la réaction à gérer derrière. J'aimerais bien... Pouvoir lui dire. Lui en parler, lui dire que j'trouve ça cool, mais bizarre, et que... Voilà quoi. Je détourne mon attention de Faith pour savoir quoi dire, du coup. Ce que je peux lâcher ou pas.
Puis elle insiste en plus c'te neuneu.
J'écrase mon mégot par terre, ne disons pas de trucs trop con.

- Bah ça faisait l'effet que j'étais marié, alors que j'le suis plus tu vois ?

Je sais pas si elle pouvait le voir, mais mon visage avait dû prendre une violente couleur rouge, vu comment il me brûlait. J'me suis un peu tortillé, dans la mesure que j'avais le poids de Faith sur moi, tellement j'étais stressé. Je voyais déjà les autres questions venir : « Bah... Ca gêne pas, de toute façon t'es tout seu... Ooooh racontes !!! », un truc de ce style. Bordel de cul, on était resté deux jours ensemble quoi, à tout casser, y a pas de quoi en faire tout un foin, mais fallait que j'enlève mon alliance quoi. Ca plaisait pas au petit, tu vois ?

- Mais... Toi ça va ? ... J'veux dire, on a vu Mo... Enfin tu vois quoi, tu supportes d'avoir... Vu ça ?

J'aime pas en parler, mais il était vital que je change de sujet.

Clac, clac, clac, clac... Ça, c'est le bruit du percing de Faith butant contre ses dents, c'est aussi le futur bruit des coups que ma tête va se prendre en rentrant violemment en collision avec le mur. Ça, je suis très con, y a pas de doute. Putain, mais quel manque de tact ! C'est incroyable d'être aussi con ! Bordel, j'me mangerais tellement la réponse de Faith m'a tué. « Mais de quoi tu parles frangin ? », ouais ouais, t'as pas envie d'en parler, et t'as bien raison dans le fond. Désolé, c'est ma faute, désoléééé...
Je m'effondre en arrière, en entrainant Faith avec moi. Allez ma poule, allongeons nous sur le sol froid et inconfortable. Ça te tente pas, huuum ? Enfin perso j'suis crevé comme un mort, j'ai quand même plus ou moins porté ma sœur sur un bout, alors j'suis tout tué de l'intérieur de mon corps et de mes muscles. Mon bras droit il est dé-chi-ré. Bah ouais, c'est le bras droit qui la maintenait sur mon épaule. Oui, je suis pas violemment sportif, effectivement, et pas très galant non plus, c'est pas une façon de porter sa sœur ça, bordel de pompe à chiottes ! D'ailleurs, la-dite sœur, je la pose à coté de moi, parce que mon ventre et mes cuisses, c'est pas à reposoir à filles.
Bon, elle a pas envie de parler des douches, j'ai pas envie de parler avec elle de la raison qui m'a fait enlever mon alliance, on va aller loin comme ça, j'te le dis mec.

- Ouais, bon, j'ai enlever mon alliance parce que quelqu'un a cru que j'étais marié après qu'on ai couché ensemble, et c'était embêtant. Là, voilà, c'est pour ça.

J'ai encore sentit mon visage prendre la couleur de la tomate mûre à en exploser, et j'ai allumé une cigarette en regardant sur le coté. Y a des gens, ils sont du genre « Youhouuuu j'ai baisé j'vais raconter ça à touuuuut le moooonde !!! Regardez j'ai une vie sexuelle ! », et d'autres, faut les torturer pendant de longues heures sur leurs lits de mort pour qu'il consentent à cracher un petit bout de quoi que ce soi. Je suis plutôt de la deuxième catégorie, parce que ça me gêne et tout ça. Ouais, bon, entre frère et sœurs, p'tète qu'on est censé parler de ça, j'en sais rien. Plutôt entre sœur/sœur et frère/frère en fait, mais j'pense que ça s'adapte. Enfin bref, on a jamais trop causé sur le sujet, elle et moi, parce que quand j'étais ado et tout hormoneux en dedans de mon corps, bah elle était trop jeune pour que j'lui en parle, et puis après bah... Rien non plus. En plus de ça, voir ma sœur en pleine action, c'est un peu l'idée que je me fait de l'enfer. Ça et l'épilation du maillot.
... Passons.
Peut être que Silence m'en voudrait de présenter les choses comme ça, peut être qu'il me ferait la gueule, mais j'pense aussi qu'il arriverait à comprendre que Faith, bah elle se sent pas hyper bien, puis qu'elle a besoin de temps et de trucs reposants pour la tête. Le cul est un sujet neutre, et détendant, y a pas à dire. Sauf si elle pense à Marc. (l'idée que ce con ai euh... Me dérange profondément, changeons de sujet voulez vous ?) Non, bon, je disais, que je suppose qu'elle pense toujours à lui. Enfin je comprends sa logique, j'ai fais pareil tu vois, mais le cul, c'est peut être pas un sujet si neutre que ça quoi. Sauf si c'est le mien, j'suis sûr que ça la ferait marrer, tiens... « L'impact de mon cul sur les psychologies proches », vous avez deux heures, bon courage. Silence, c'est pas vraiment ça qui l'intéresse si j'ai bien compris, c'est plutôt que je fais bien chauffe-matelas... Oh, je suis méchant, je sais pas que c'est pas ça. J'ai pas trop bien compris ça non plus, mais il paraît que c'est ma... Franchise... J'écrirais ça dans mon futur CV tiens/ « Qualité notable : Franchise, c'est Silence qui l'a dit alors ça vaut de l'or en barre ». Owai, trop bien.
Enlève donc ce sourire idiot de ton visage Charity.
Je me compose une expression faciale plus neutre, qui donne moins l'impression que j'ai vu la vierge Marie sur le plafond en monokini, et je prend une grosse taff de cigarette. Rouge, quitte mon visage, vas y, obéis moi Rouge.
Les couleurs, c'est des connasses.

En fait, j'ai vu tout son visage se transformer, genre j'aurais avoué que j'violais régulièrement des cadavres d'enfants dans ma cave avec des copains, et puis qu'on allait les débusquer à la sortie de la Maternelle en les chopant par la taille pour les foutre dans des coffres sans trou pour respirer, et qu'on adorait les entendre hurler de douleur de pas pouvoir respirer et crever comme des merdes pendant qu'on se branlait en roulant.
Enfin un truc horrible quoi.
Où il est le truc horrible que j'ai fait là ? Je comprend pas. Elle relève, et me sort un truc con, comme d'hab'. A la mention de l'expression « coup de foudre », mon visage prend une belle teinte rouge, pour la troisième fois en cinq minutes. J'lâche un truc du style « Naaan mais coup de foudre, quand même pas quoiiii... » et je la regarde, là, allongé par terre alors qu'elle elle est debout en face de moi, en position de domination. Ow vi vas y frappe moi flagelle moi ! J'adore qu'on me descende, qu'on m'insulte, qu'on me rabaisse ! Ow vi ow vi !
... Il est où le problème ?
J'veux dire, ouais, j'suis con, et alors ? Non seulement j'suis con, mais en plus j'ai un petit coté impulsif qui me fait balancer des alliance par les fenêtre, où est le mal ? J'veux dire, c'est juste une bague (bon, ok, c'est pas n'importe laquelle). Ouais, si elle avait été choquée parce que j'avais foutu cinq cent balles en l'air au lieu de la revendre, ouais, OK, là je comprend. Mais bon, pour le souvenir affectif...
Putain, j'ai changé en quelques semaines moi...
C'est l'hosto ou c'est uniquement Silence ? Nan j'pense pas, ça fait que deux jours merde. Et non, c'est pas devenu le centre de la galaxie, il m'a pas ravit mon coeur d'un élégant coup d'cul en chassant tout ce qui se trouvait autour de moi, et non. Juste que... ca fait dix ans quoi merde, dix putain d'années, j'pouvais vivre là dedans éternellement. Oui, j'ai été depressif, j'bougeais plus, j'mangeais plus, j'bossais plus. Ouais j'ai fini à la rue tout seul comme une merde, effectivement j'ai fait tout un tas de trucs de ce style, et j'ai zoné pendant cinq ans dans le paté. J'ai porté mon deuil plus longtemps que toutes les veuves de Tarbes réunies, laisse moi vivre maintenant putain !
Vas y Valentine, laisse moi vivre un peu.
J'ai jamais eu aucun scrupule à coucher avec quelqu'un d'autre, mais pas plus. Elle m'avait bien cocufié quand même, j'avais le droit de le faire, j'estimais à ce moment là, mais me refoutre avec quelqu'un d'autre... Inconcevable j'veux dire. C'est dure, mais on finit par surmonter tout ça, je crois.
Faith n'a rien surmonté du tout par contre.
Je finis quand même par me lever, pour être à sa hauteur, pour plus qu'elle me domine. Mes genoux craquent, et mon pied me les brise - et se brise -, f'chier.

- Putain Faith, ça fait dix ans que j'suis divorcé, tu crois pas que j'ai le droit de faire autre chose maintenant ? J'vais pas faire bonne soeur non plus, le costume m'irait pas en plus. Je doit fidélité à plus personne maintenant, je fais c'que j'veux, j'suis grand, non ?

C'est à moitié elle que j'essaye de convaincre, seulement à moitié, le reste c'est pour moi tu vois ? Pendant trois semaines d'hosto, j'ai eu le temps de pédaler dans la semoule. En fait, je fais ça quas-continuellement, mais là, plus. C'était pas juste pour regretter, c'était pour réfléchir, sur le chat, sur le mystérieux type qui est venu tuer dans les douches, sur Valentine, sur tout en fait. J'avais vraiment que ça à foutre quoi. J'aimerais bien que... Que Faith passe à autre chose aussi, en fait.

- Enfin j'veux dire... T'as le droit de faire autre chose toi aussi tu vois ? Ca fait pas de toi quelqu'un de mauvais, mais... Voilà quoi, t'as pas de deuil ni rien à faire. Personne te le repprocheras.

Puis j'pose ma patte sur sa main, et là, j'ai un putain de flash. Genre une puissance supérieur – Je me l'imagine avec un T-shirt blanc et une tête de con, bizarrement. - me dirait, « vas y, y a un truc con à placer là ! », et j'le ferais, parce que je suis con, moi aussi. Je ramène son autre main, et je la pose sur ma première main que j'avais posé sur la sienne (Vous suivez ? ). Ensuite je pose ma dernière main disponible sur la sienne.

Bataille de mains, ça va chier.

J'espère qu'elle va voir où je veux en venir, parce que moi je m'en souvient comme si c'était hier. Faith, un peu hésitante, pose la main du dessous sous la mienne, et moi je continue le mouvement.

Qu'est ce que je suis con.

C'est un peu, on a trente cinq et vingt neuf ans, et on fait une bataille de mains. Et on est vachement concentré en plus ! On en veut ! On veut gagner ! Enfin moi en tout cas, c'est à peine si je tire pas la langue sur le coté et que je bave. Je suis les mains des yeux, mais ça sert à rien, c'est avec le toucher qu'il faut gagner, c'est au feeling. Elle rigole, et moi aussi du coup, on a bien l'air con, y a pas dire, j'ose même pas penser à la gueule qu'on doit avoir, mais c'est pas désagréable comme jeu. Mais, finalement, on arrête, assez naturellement. Ca doit être ça de grandir, j'lui ai pas foutu une gifle pour gagner. C'est nul. Mais je pense que si je lui foutait une bègne en rigolant comme un niais, ça passerait vachement moins bien que quand j'avais huit ans. Elle dit que ça fait longtemps, et moi je lui répond un petit « oui » avec un sourire tout chelou et tout inutile. Elle plonge dans des réflexions intérieurs tellement profonde que j'ai pas assez de souffle pour la suivre.



Mais j'peux pas te dire tout ça.

Puis là tu me poses des questions, et je sais même pas comment je vais répondre. Je pédale dans la semoule bien fort, parce que je saurais pas expliquer comment on fait, vu que j'ai jamais maitrisé le truc, ça vient tout seul c'est tout, tu te réveilles un matin, et tu t'apperçois que t'en a rien à branler. Enfin non, c'est pas du tout ça, je raconte n'importe quoi...
... Et merde, j'en sais rien moi !
Je la prend dans mes bras, debout, dans cette putain de chambre. Parce que j'ai pas les solutions miracles en tubes, et que je les ai jamais eu. Je sais absolument pas quoi lui dire, le trou noir, le vide béant.

- Je sais pas... Tu veux dormir un peu ? Je vais te chercher à manger si tu veux aussi, si t'as faim...

Je suis lâche, je bosse tôt demain, et je voudrais qu'elle dorme, parce que ses questions, je sais pas comment répondre. Lâche, très lâche, et pas très intelligent. Infoutu de répondre. Où est donc ton grand frère, et qui c'est ce gignol qui a pris sa place dans la maternité hein ? Je ne suis ni un bon mari, ni un bon frère, ni un bon copain. Ben à quoi je sers alors ? A rien, ou pas grand chose. Je saurais pas dire, mais j'suis content d'être là, quand même, un petit peu, et très égoïstement. Je revendique mon droit d'avoir ma soeur dans les bras, même si je suis pas le vrai parce qu'on m'a échangé à la maternité tout ça. Et p'tète même que j'ai le droit à Silence, même si je suis carrèment plus vieux que lui, bien de trop même, parce que ça dérange personne. Et peut être même que Faith, bah c'est pas une super réponse absolu qu'elle voulait de moi, c'était juste que j'sois là avec un câlin, que j'aille la chercher dans toute la prison, et qu'on fasse une bataille de mains. Parce que de toute façon, je peux pas l'aider à refaire sa vie, c'est genre pas possible quoi. Par contre, j'peux te border et te lire une histoire, ça doit être dans mes gênes, parce que j'ai toujours voulu le faire, et j'ai jamais pu.
Ce qui est bien avec Faith, c'est que c'est pas une fille. Enfin si, c'en est une, mais pas avec moi. Une nana normale, je la prends dans mes bras pour la rassurer, elle s'imagine déjà le mariage. Faith, elle peut pas et ça lui viendrait jamais à l'esprit, c'est pour ça que je l'aime bien, elle ose être chiante. Puis aussi beaucoup parce que c'est ma petite soeur. Mais elle est souvent casse couilles. J'ai ma tête dans ses cheveux, et je me dis que ce Marc, c'était un foutu connard, de casser une fille de soixante kilos comme ça. Elle en a pas l'air comme ça, mais elle a carrèment pas les épaules pour supporter ça, il aurait dû être plus doux, vraiment plus doux.

- C'est une question de confiance en soi et d'amour-propre je... Je sais pas, je sais vraiment pas, mais ça passe, je t'assure que ça passe...

J'aimerais bien que ça soit passé, pour moi aussi.

La question qui tue. Trou du cul (Ca c'est pour la rime). Mon lit ? Euh, certes, certes. Etrange, quand on est arrivé, je l'ai traité de fesse, elle a insulté feu-mon chat, et maintenant elle veut pioncer dans mon lit... Ah, les femmes. Tellement longtemps que j'en ai pas touché une, et ça risque pas de m'arriver d'ici un bout, vu que Silence bah c'est genre un mec. Mais j'supporte ça bien, oh oui que ça se supporte bien...
J'ai regardé la petite Faith dans les yeux, et je lui ai fait mon plus bel air de chien battu.

- Oui... Mais je dors où après ... ?

Bah oui, j'vais pas dormir dans mon lit, y aura une Faith dedans et dans le sien bah ça sent la fille, et c'est pas cool comme odeur. Ca sent... Quelque chose d'assez fort, mine de rien, le shampoing tout ça. J'avoue que j'ai une odeur bien forte aussi, la sueur bien virile, la bite tout ça. Silence lui, il sent pas grand chose, ou c'est vraiment léger. Avec mon absence d'odorat, bah je le sens pas du tout, c'est troublant, il doit être assez hygiéniste, contrairement à moi. Enfin bref, je regarde autour de moi en quète d'un canapé, d'un truc comme ça. Que dalle. Le sol il est sale et plein de mégots, de bouteilles.
... Et alors.

- Bon ben j'dors par terre, vas y, fous toi dans mon pieu, ça me dérange pas...

Là dessus, pour confirmer mes dires, je m'assois par terre, je ramène ma veste vers moi ( pour me servir éventuellement de couverture ), et je regarde autour de moi avec un air de veau mort. Oulàlà une bouteille pleine dans le tas ! Je la chope, je renifle. Du putain de vin rouge, c'est bien ça, ça bourre bien la gueule. Au moindre commentaire de Faith, je lui claque la gueule, c'est bon j'suis grand, je bois ce que je veux et quand je veux. J'en ai b'soin pour dormir tu vois ? Et ma dignité je l'encule, je l'encule bien profond, et je l'ai toujours enculé. Pour une fois, j'ai pas le cul dans un molard, la gueule dans le caniveau, et la main tendue, ça change. Là c'est plus propre, plus polie, j'suis moins défoncé, moins bourré, moins con. Mais j'ai toujours le cul sur des saloperies. Je reste allongé, et je me plaque le dos au mur pour m'appuyer, avec les genoux remonté à la poitrine. J'ai toujours préféré dormir assis quand je dors par terre ( Durant un an de ma vie donc. ), comme ça j'peux me lever plus vite, je risque moins de me faire dépouiller, et j'ai juste un tout petit peu moins l'air de zoner bourré. Par contre c'est moins reposant, ça, y a pas un pli. Je m'allume une cigarette, je bois un peu, et je regarde vers ma petite soeur.

- Alors il est chouette mon lit ?

Elle, elle a plutôt fréquenté des logements insalubres sentimentalement parlant tu vois ? Les gens ne sont pas sympa avec ma soeur, moi le premier. Enfin peut être moins ces temps ci, parce que je suis tellement charitable que je passe mon lit, et ouais. J'espère qu'il reste pas une vieille odeur de bite coincée dans le coin, parce que ça serait plutôt embêtant. Silence a passé quelques moments là dedans, et ça m'étonnerait que ça sente encore, mais bon... Mon petit coté parano, sans doute. Mais je lui présenterais Silence, un jour, si ça dure et qu'elle va mieux, promis soeurette. Faudrait que je lui explique que si Moxie et Rodolphe sont morts, c'est parce qu'il a voulu me protèger, et que au lieu d'appeler les keufs en hurlant et qu'ils arrivent trop tard et que je sois mortellement mort, bah il a tout fait himself. Quel homme bon sang !

- J'crois que c'est dans ces moments là, genre pyjama party, qu'on se fait de savoureuses confidences sur notre vie sexuelle nan ? C'est pas ça qu'elles font les filles quand elles ont trop bu ?

Question conne ? Oui c'est moi ! Bon, allez, c'est pour détendre l'atmosphère, un truc de ce style.

Quelque fois, je me demande comment les gens ont fait pour passer leurs adolescences bien au chaud dans leur chambre quoi, comme ma soeur. Des éspèces de miraculés de la drogue et tout ça, qu'on recontré leurs maris/épouse à la fac... J'ai même pas réussi à atteindre le lycée, alors la fac, c'est complètement suréaliste comme univers pour moi.
Faith est venue à coté de moi, avec la couverture, et on s'est enroulé dedans comme des petits chats. Enfin j'veux dire, avec le même air pitoyable que les p'tits chats. D'ailleurs, mon chaton personnel, il est où ? Je bouge pas, et je l'écoute.
J'écoute Faith.

....


C'est vraiment une petite pute c'te nana.
J'veux dire, est ce que ça se fait de venir m'espionner ?! J'avais jamais remarqué putain ! Je prends l'air le plus choqué que j'ai dans mon répertoire, et la regarde. Ah ouais ? Elle a assisté à ... Tout ? Bon dieu de bordel de couille, si ça se trouve, elle connait mieux l'âge auquel j'ai perdu ma viriginité que moi ! ... Putain c'était quand ? Assez jeune j'crois... J'sais plus... Enfin bref, on s'en fout à la limite, mais c'est... Dégueulasse ! C'pour ça que les parents me captaient à peu près systématiquement ? Elle allait leur dire ? Et elle m'avoue ça en plus, la tête callée sur mon épaule, comme ça, c'est la fête.
... Qu'est s'qu'on s'en cogne....
Je me remets collé le dos au mur, je regarde droit devant moi, et j'fais semblant de bouder. Mais j'arrive pas à tenir, surtout qu'elle me donne trop envie de me marrer. Alors j'rigole, tant qu'à foutre. J'ai dû simuler la vexation environ deux dixième de seconde, j'suis vraiment un acteur de merde.

- Mais c'est pas gentil p'tain ! ... T'as tout vu ? ... Oh mon dieu, j'ai peut être fait toute l'éducation toxicologique et sexuelle de ma petite soeur de neuf ans !

Bon, y avait pas que des pet' et du cul quand j'avais quinze ans, mais c'était le plus marquant pour un jeune esprit. J'me demande parfois comment j'ai fais pour rencontrer Valentine, parce qu'on fréquentait pas du tout le même milieu. Elle aussi, elle est allé à la FAC, comme tout les cons de son âge, et on s'est vu pour la première fois parce que c'était la soeur d'un ami au pote d'un collègue de boulot du macdo (je travaillais au macdo à l'époque.). Ah, comme le monde est petit... Enfin bref, on s'en fout à la limite quoi...

- Bon, on va pas rester comme des glands par terre alors qu'il y a mon lit à coté ?!

Là dessus, je me lève, en grimaçant à l'adresse de mon pied douloureux, je prends la main de Faith, et et avant ! Quelques gesticulations plus tard, je l'ai foutu sur le lit, et moi aussi, collé intensément à l'extrémité sur pieu, pour pas toucher ma soeur. Merde, être assis dans une couverture l'un à coté de l'autre, c'est une chose, alongé dans le même lit, c'en est une autre. Vachement plus mal à l'aise d'un coup, ne pouvant retrouver mon rassurant plancher, je tourne le dos à Faith, et je me mets le plus possible au bord du lit, je sais pas pourquoi. C'est pas comme si elle allait me foutre la main dans le froque, mais bon... Je sais que si je retourne par terre, elle s'y refout aussi, et il faut absolument qu'elle se repose correctement, et que demain, je la fasse manger bien.

- Hum, maintenant le chef viril et puissant que je suis te demande de dormir.

Genre un chef viril et puissant il mouille comme une dinde devant un Silence, n'importe quoi.

Okay, ma réplique était tellement.. Virile et puissante que Faith s'est mise à rire comme une folle, mais elle s'est calmée rapidement. Tant mieux, ça fait moins de bruit remarque. Un malheureux chaton (c'est le mien en fait.) passe par là, et je le chope entre mes mains. Viens là petit chaton, viens voir tonton Charity. Je me suis mis sur le dos, j'ai forcer le minet à rester sur ma poitrine, et finalement, après de rude négociations, il a bien voulu rester ronronner là, et enfin j'ai allumé une cigarette. On peut ainsi voir un con en train de sortir sa fumée par le nez et un chat monter et descendre au rythme de sa respiration.
Faith m'appele, et je tourne la tête vers elle, la regarde. Elle plonge dans des abîmes de reflexion, et au bout de ce qui paraît un long moment quand on reste silencieux comme des morts, me sort un petit « merci ».

- Pas de quoi.

Faith à l'air de s'endormir à peu près, après cet effort colossal de gentillesse et de politesse. Ca m'a fait plaisir qu'elle me dise merci, même si je sais pas trop pourquoi elle me remercie. J'ose supposer qu'elle aurait été me chercher elle aussi si elle avait été à ma place. Et j'y suis pas allé très vite, encore, trois semaines à l'hosto, quelques jours avec Silence, et voilà... Puis le temps que je la trouve aussi, j'ai épluché les hôpitaux de Paris avant l'infirmerie hein...
Je joue avec les petites du chat avec mes doigts, c'est rigolo, y a des griffes qui sortent, et ça se plie bien. Il ronronne toujours, parce qu'il est content qu'on s'intéresse à lui. Il est vraiment très mignon, avec sa fourrure claire, et ses rayures pas très prononcées. Un genre de marron clair je dirais, un orange très doux. Il baille, oh ! C'est vraiment adorable cest bêtes là. Mais j'adore les chats de toute façon, j'ai vu au moins cent millions de fois la comédie musicale « Cats », c'est dire mon taux de passion. J'veux dire, c'est vraiment génial ces bêtes là, ça miaule, ça a des pattes avec lesquels on peut jouer, c'est pas casse couilles, et c'est beau, que demande le peuple ?
Puis en plus c'est Silence qui me l'a offert.
Et ouais.
Notez que c'est original, on offre rarement un chaton en cadeau de bon rétablissement, plus généralement c'est les fleurs du fleuriste en face, celles qui sont rangées à coté de celles réservées aux enterrements, dans une continuité logique quoi. Mais Silence, il fait souvent des trucs comme ça, quoi que je le connais pas encore très très bien. Mais il flippe souvent pour des trucs que je comprends pas, et il pleure pour des raisons que j'ai pas très bien comprise non plus. Pauvre petit.
Je m'endors finalement moi aussi, à cause des ronronnements du chat, qui font dormir parce que ça berce, fin saoûl et un mégot de cigarette entre les doigts.



Merde, le matin qui te tombe sur un coin de la gueule comme ça, c'est méchant, redoutablement agressif, et très désagréable. Il m'est tombé sur le poil sous la forme d'un putain de rayon de soleil dans mes petits yeux bleus délavés ( Je sais pas pourquoi ils sont moches comme ça, mais voilà, mes yeux ressemblent à une flaque de vomit de mollusque niveau couleur. ), j'suis donc forcé de les ouvrir hein, et c'est sale et y a plein de fumée partout dans la pièce, et des bouteilles vides partout. Je me tourne vers Faith, avec l'air aussi réveillé que si je sortais d'hibernation, et j'essaye de distinguer si elle est réveillée ou pas.
Merde le chat, il est tombé.
Je le ramasse et le sert contre moi, mais, vexé, il s'échappe de mes doigts et repart manger/boire/chier/pisser, enfin toutes ces activités félines que nous avons en commun lui et moi. Promis, d'ici un moment je l'emmène au vaccin, mais ça coute vachement de thunes... Enfin bref.
Hum Faith ?

- Bonjour....

Et j'ai même pas enlevé mes chaussures, c'est n'importe quoi...