Sadismus Jail
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Venez vivre la vie mouvementée des prisonniers de Sadismus.
 
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 Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]

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Damara Galanis
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Damara Galanis


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MessageSujet: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeDim 10 Aoû - 17:31

Après un bon mois de passé, je me retrouve devant l’entrée de la prison. Allez savoir pourquoi, cette journée était écrire. Je puis vous l’assurer que tout tourne autour d’une grande euphorie. Si je n’étais pas aussi calme, je ne tiendrai plus très longtemps en place. Aujourd’hui, c’est ma journée libre et en tout gardien qui se respecte, je la passe loin de la prison. Depuis hier soir, j’avais bien entendu fait tout un programme mental pour ce qui est de mon jour de congé. Mais il y a comme qui dirait, un petit changement dans l’air.

Ce matin là …


Comme tout les matins, je me réveille assez tôt. Ne me demandez pas pourquoi, cela est une habitude depuis bien des années. Quoi qu’il en soit, je préparais tranquillement mes affaires quand l’un de mes collègues est venu me prévenir que j’étais appelée dans le bureau de la direction. Après avoir enfilé de simple habit, je m’y suis donc rendue en toute hâte. La requête m’était un peu surprenante sur le coup. Puisque j’étais de sortie dans le village, non loin de la prison. On me demandait de prendre part à une « sortie libre » d’un prisonnier pour bonne conduite. Mon rôle consiste à le surveiller tout en lui faisant un peu oublier l’enfermement de la prison. On me présenta donc une liste des personnes les plus apte à être autorisé de sortie. Mon choix se porta sur une certaine « Adélie Roche ». Allez savoir pourquoi, cette petite était de nature peureuse. Qu’importe dans le fond, si je pouvais l’aidée à s’éclipser loin de se monde d’enfermement. C’était mon but après tout. Voilà donc, j’accepte sans trop d’hésitation.

Par la suite, j’ai demandé à l’un de mes collègues d’aller gentiment chercher la jeune Adélie. Qu’elle me rejoigne devant la porte d’entrée à neuf heures précise. De mon côté, il devrait être huit heures. Je me suis rendue au village en voiture, car oui, miraculeusement Sebasten s’était débrouillé pour me la faire parvenir de Grèce. Pour une petite « course » que j’ai d’ailleurs laissé sur place à cause d’un manque de temps. En assurant que je viendrai la rechercher plus tard dans la journée.
Par la suite, je suis donc revenue à la prison pour attendre la jeune Demoiselle. Garant ma voiture sur le parking un peu plus loin, j’attends tranquillement sous un joli soleil, la venue de celle qui allait perdre son titre de « prisonnière » pour une journée.

Jetant des regards furtifs sur ma montre ; 8:55. Encore cinq minutes à patienter et elle sera là. En attendant, je me demande si on lui a expliquer le pourquoi de mon attente à son égare. J’avais bien précisé à mon collègue de ne pas être brusque ni de l’effrayer et qu’elle ne devait en aucun cas porter son uniforme. De toute façon, elle devra porter un émetteur si elle tentait de s’échapper. Mais je ne me fais aucune inquiétude à ce sujet là.

Cinq minutes, ça parait si long quand on attend. Mes yeux viennent jouer avec le ciel. Les quelques nuages qui jonchent le céleste ne sont pas bien nombreux. Et le divin soleil trônant fièrement, laissant échapper ses rayons. C’est assez rare d’avoir une belle journée dans un pays froid. Sans que je m’y attende, la porte d’entrée s’ouvre. Laissant entre voir une jeune femme …
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeLun 11 Aoû - 3:42

Je m'éveille dans le noir. Par la petite fenêtre, je vois que le jour est sur le point de se lever. L'aube est blanche. L'aube est toujours blanche. J'ai du dormir quatre ou cinq heures, grand maximum. Je n'ai pas peur. Mes compagnons de chambre dorment encore. Mais cet état de paix ne durera pas. Je le sais. Cela fait quelques jours que je suis arrivée à Sadismus. Jusqu'à présent, j'ai eu de la chance. Pourtant, le nom de cette prison n'est guère rassurant. Je n'ai pas vu souvent mes voisins, non plus... Ils ne sont pas souvent dans la cellule, et quand ils s'y trouvent, je dors généralement... Et quand je ne le fais pas, je fais semblant. Ils doivent me trouver bizarre, à dormir sans arrêt de la sorte. Mais je n'arrive pas... Je ne me suis toujours pas présentée. Je n'ose pas leur adresser la parole, de peur de me faire rejeter. Et s'ils se moquaient de moi ? J'ai l'air si faible et si jeune... Pire, s'ils m'ignoraient ? Je crois que je ne saurais plus quoi faire et que je me terrerais encore plus dans un sommeil feint. Alors je préfère attendre... Attendre que ce soient eux qui me parlent. J'espère que ce jour ne tardera pas. Ils risquent de me prendre pour quelqu'un de profondément malpoli, dans le cas contraire... J'ai un peu peur de leur réaction, en fait.

Pour l'instant, je reste au lit. J'attendrai qu'ils soient tous sortis pour me lever. Car je ne sais pas où aller dans cette immense prison. Je ne connais pas de lieux calmes. Pas encore. Il faudra bien que je sorte un jour ou l'autre. Que j'explore mon nouveau monde. Il doit bien y avoir des endroits que j'y aimerai ! Mais comment revenir à coup sûr avant mes voisins de cellule afin de faire semblant de dormir ? La jour de ma visite attendra. Je ne me sens pas encore. Demain, peut-être... Ou plus tard. Qui sait quand je serai prête ? Bella pourrait m'aider, elle. Peut-être... Elle est si gentille. Mais je ne l'ai pas revue depuis mon arrivée.

Toc ! toc ! toc !
Bienvenue dans la solitude...
Solitude...


Toujours cette chanson qui me hante. Elle est belle, mélancolique. Et elle n'est jamais bien loin de ma conscience, prête à se faire entendre. Quand je m'enfermais chez moi, il m'arrivait de l'écouter en boucle. Ca ne m'aidait pas vraiment à me sentir mieux, bien au contraire. D'autant plus qu'elle provient d'une animation japonaise qui aurait pu raconter ma vie. Cette chanson m'a toujours ramenée à ma propre existence, me rappelant ma bêtise et ma faiblesse. Solitude... Et cette capacité à la ressentir dans toutes les situations. J'ai toujours désiré qu'il existe une partition pour piano à cette chanson... Ou bien savoir jouer de la guitare. Pouvoir l'entendre toujours, même lorsque je m'exerce à la musique. Et être toujours plus mélancolique, toujours plus triste, toujours plus préoccupée par ma propre situation. Je suis pathétique. A défaut de vouloir me sortir de ma merde, je ne fais que m'y enfoncer davantage encore. Peut-être que je cherche à toucher le fond pour pouvoir me propulser à la surface d'un coup de pieds. Mais je continue de creuser, même après avoir touché le benthos le plus profond... J'ai de la boue sous les ongles et sur la peau, mais rien ne m'arrête et toujours je creuse.

Je me mets sur le côté, tournée vers le mur froid, et je sens le froissement du dessin que m'a offert Siriel le jour de mon arrivée. J'aimerais tant être ces oiseaux... Ma cage à moi est davantage spirituelle que physique. Mais tellement plus solide que n'importe quel barreau de cette prison... Je me hais ! Ca y est, je crois que ma paix intérieure m'a quittée pour aujourd'hui. Dommage. Merde, c'est quand même pas si dur, de se lever et de saluer des inconnus ! Un simple "bonjour", ce n'est pas bien méchant ! Et s'ils ne répondent pas, quelle importance ? Quelle importance ? Je ne me rends pas compte de tout ce que je laisse passer. Je ne me rends pas compte de ma connerie. Pourtant, si. Je m'en rends compte. Mais je suis justement trop conne pour faire plus que m'en rendre compte.
Pourquoi ai-je vu le jour ? Pourquoi mes parents ont-ils conçu une merde comme moi ? Pourtant, ils sont normaux, eux. Ils doivent me haïr ! Ils doivent être emplis de rancoeur, d'incompréhension et même de honte. Impossible pour eux de présenter leur fille à leurs amis... Ils ont pitié de moi, mais je suis sûre qu'ils m'en veulent, même s'ils ne me le montrent pas. Et ils ont raison de m'en vouloir. Je ne suis rien. Même pas une merde. Une sous-merde, rien de plus. Et voilà que les larmes me montent aux yeux. J'arrive à les retenir, je ne pleure pas. Mais je me sens si faible, si pathétique ! Une gamine de cinq ans aurait davantage de cran et de résistance que moi ! Et je sais même pas pourquoi je suis comme ça...

Toc ! toc ! toc !
Embrasser un espace silencieux,
Frapper les murs inutilement,
Et tout laisser en non-dits.
Bienvenue dans la solitude !


Frapper les murs, cela m'est arrivé un certain nombre de fois. Et je n'en ai rien récolté, sinon une douleur fulgurante dans la main. Je n'en ai même pas été apaisée. Il m'est arrivé de briser de vieilles boîtes de CDs, aussi. Je m'en coupais presque les mains, j'avais mal et j'avais le sentiment jubilatoire d'être capable de détruire quelque chose. Mais ça s'arrêtait là. La douleur morale revenait environ une minute après. Aucun intérêt. Geste complètement inutile. Mais pour retenir les larmes, je ne sais pas faire autrement. Cela fonctionne parfois. Et quand j'ai envie de pleurer, je ne réfléchis pas vraiment. Je me fais mal, je frappe. Fugace sentiment d'apaisement... Qui disparaît en fumée aussi vite qu'il est venu. Il ne reste plus alors que le silence et la solitude.
Soudain, alors que je suis toujours en train de retenir mes larmes, un bruit. Des pas approchent dans le couloir. Je prête l'oreille, ne sachant pas si les pas viennent vers notre cellule ou pas. Un nouveau bruit, la porte. Je ne bouge pas. Je fais semblant de dormir. Qui cela peut-il bien être ? La porte s'ouvre dans un faible grincement.
« Adélie Roche, habille-toi et suis-moi, s'il te plait. »

Un homme. Il ne semble pas trop bourru. Mais je suis tétanisée. Que me veut-on ? Et pourquoi 'habille-toi' ? Je porte mon uniforme depuis mon arrivée, jour et nuit, essayant de le laver de temps à autre. Mais je le porte déjà. Je ne bouge pas. J'ai un peu peur. Ma respiration et la cadence des battements de mon coeur s'accélèrent.
« On se réveille ! Adélie Roche ! Il faut que tu me suives. Mets les vêtements que tu avais à ton arrivée et suis-moi ! »

Je dégluttis, je pâlis. Mais je me retourne, l'air à moitié endormi. Je ne veux pas que l'on me croie réticente. Un gardien se trouve dans l'embrasure de la porte et me fixe maintenant. Je le regarde, un peu hagarde. Mais je m'exécute et je mets mes vêtements qui se trouvent dans un coin de mon lit. Je masque mon corps de ma couverture. Je suis pudique. Trop, on me l'a toujours dit. Je me dépêche, puis je mets le dessin de Siriel dans une poche de mon pantalon. Je ne veux pas le laisser. Enfin, je rejoins le gardien, assez peu rassurée malgré son air calme. Je fais un peu tache dans cette tenue. Je porte des couleurs vives, des vêtements de type indien ou tibétain, je ne sais pas... Les vêtements que je porte depuis un an ou deux pour cacher ma peur des autres -ou peut-être pour l'oublier. Dans cette prison noire, je jure. On va me regarder ! Mais je n'ai pas le choix. Ce sont mes seuls vêtements. Je ne dis rien. Quand on rencontre quelqu'un, on dit 'Bonjour', en général. Mais rien ne sort. Tous mes mots gèlent à l'intérieur de la machine... Je fixe mes pieds, n'osant pas non plus jeter un regard vers les autres prisonniers. Une boule monte dans ma gorge. Je ne sais pas où me mettre. On me regarde. On me juge.
« Allez, suis-moi. »

Je m'exécute. Il n'a pas l'air méchant -il semble même un peu paternel, ce qui m'étonne- mais je suis quand même intimidée. Nous marchons dans des couloirs que je ne reconnais pas, ou bien que je ne connais pas... Je n'en sais rien. Le gardien ne dit rien. Mille question me viennent. Où vais-je ? Pourquoi ? Je ne sais pas si j'ai fait quelque chose de mal. Peut-être veulent-ils me libérer ? Un espoir nait en moi qui disparaît immédiatement. Ils vont se moquer de moi, si c'est ça. Je ne veux pas qu'ils se moquent de moi. Je veux juste être en paix... Mais c'est peine perdue, je le sais. Je suis en prison. Je n'ai plus que des devoirs, à présent. Nous arrivons bientôt dehors, dans la cour. Nous n'avons croisé personne, et c'est tant mieux. Tout le monde doit dormir... Je me sens un peu moins effrayée. Dans la cour, il n'y a pas grand monde. Le soleil n'est pas haut dans le ciel, tout juste levé. Je ne sais toujours pas où je vais. Je ressens toujours une appréhension assez importante, qui se mue peu à peu en peur. Les bâtiments administratifs ne sont pas par là, je crois... Alors que se passe-t-il ? Où est-ce que je vais ? Mes pas se font plus lourds, mes jambes également. Je vais bientôt suffoquer si je ne découvre pas où je vais.
On m'escorte jusqu'aux portes de la prison où une femme m'attend. Je ne la connais pas. Je lui jette un regard angoissé puis reporte mon attention sur mes pieds, toujours aussi fascinants.

[Huhu, pas pu résister à poster dès maintenant, tant pis pour mes bonnes résolutions ^^]
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Damara Galanis
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeLun 11 Aoû - 16:36

Neuf heures, journée ensoleillée sur le pays peu commode de l’Allemagne. Je me tiens debout face à une jeune fille. Je reste un instant stupéfaite, serait-ce là une enfant ? Impossible, la loi n’envoie pas les jeunes en prison. Elle parait très angoissé, je peux donc en conclure une chose : c’est qu’elle ne sait pas ce qui l’attend. Que cela soit à mon avantage ou non, je n’en sais rien. Je me contente de sourire.

Elle n’est pas bien grande, je dois avoir une dizaine de centimètres en plus qu’elle. Sur son visage danse une expression d’effroi, sa peau est très claire. De petits yeux sombres viennent trompés une joie ancienne. Quant à ses cheveux, ils sont assez longs, encadrant le visage d’un enfant perdu. Ce petit corps frêle enfermé dans un habit assez vif. De mon côté, je porte un simple jeans qui m’arrive jusqu’au dessus du genoux, avec un t-shirt bleu clair sans manche qui part dans le cou, dévoilant la même occasion le dessus de mon dos. Mes longs cheveux sombres ne sont nullement plats, fortement ondulés –je dois sûrement ressemblée à un mouton-, il me retombe avec légèreté sur les épaules et dans le dos, cachant par la même occasion le tatouage de ma vie.
Je m’approche finalement de cette fameuse Adélie avec mon sourire habituelle. Je lance un regard à mon collègue en le remerciant et qu’il pouvait nous laissez. Je regarde d’un œil bienveillant la porte se refermer derrière lui. Reposant mes yeux par la suite sur ma petite protégée. Je ne sais pas pourquoi, elle me fait penser à Danaé. Peut-être à cause de son côté enfantin.


« Bonjour Mademoiselle Adélie. Je suis Damara. Votre journée se passera cette fois ci en dehors de la prison. Si vous voulez bien me suivre, je vous expliquerai en chemin. »

Accompagnée de la jeune demoiselle, je traverse le chemin boisé qui nous conduit un peu plus loin sur un parking. Là, quelques voitures sont garés. Sortant une clef, j’appuis bêtement sur le bouton pour que les portes de l’auto grise s’ouvre automatiquement. On pouvait facilement voir sur la plaque d’immatriculation un « G ». Provenance, sans aucun doute de la Grèce. Je lance un regard à Adélie, histoire d’être sûre qu’elle me suivait. En effet, elle est toujours là. Je me dirige vers la portière que j’ouvre d’une main ferme. Il faut au moins vingt bonnes minutes pour se rendre au village. Certes, on pourrait y aller à pied, mais j’ai trop peur que … Enfin. Gardons encore un moment de silence. Je fais gentiment signe de la tête à Adélie de monter sur le siège passager de devant. Une fois sur la route, je regarde les arbres défiler à une allure assez rapide.

« Vous avez été autorisé à une journée libre pour bonne conduite. Je serais là pour garder un œil sur vous. Il est bien entendu qu’aujourd’hui, je ne serais pas gardienne. Et vous, vous ne serez pas une prisonnière. »

Je lui dis ceci en souriant. Hors de question de se démolir le mental pour une prison aujourd’hui. Elle comme moi, sommes libre pour quelques heures. Un temps que j’espère suffira à faire apparaître un simple sourire sur ce visage d’ange juste à côté de moi. Je regarde bêtement mes bracelets autour de mes poignets et celui qui orne le dessus de mon bras. Typiquement grec. Ce matin, j’ai retrouver quelques babioles dans la boite à gants. Photos, lettres, …

« Nous allons au village. Voulez-vous faire quelques choses en particulier ? »

Tout en sachant qu’il y avait la plage, les bois aussi. Enfin, je n’ai pas vraiment eu le temps de faire le tour du village pour voir ce qu’il y avait. Dans mes connaissances, il n’y a que ce magasin avec une tête de chat et de chien sur la porte.
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMar 12 Aoû - 9:29

J'ose à peine regarder la jeune femme qui me fait face. Elle porte une tenue estivale et ne semble pas faire partie de la prison. Je me demande qui elle est. Mais je ne lui lance que des regards furtifs. Je ne sais pas de qui il s'agit, mais il est certain qu'elle a davantage de pouvoir que moi ici, étant donné qu'elle congédie mon gardien d'un geste. J'ai toujours eu du mal avec les gens qui se trouvent plus haut dans la hiérarchie. Non que je ne les aime pas, mais j'éprouve à leur encontre une sorte de peur... Pire que celle que j'épouve à l'égard de ceux qui sont dans ma situation. La femme sourit, nous sommes seules à présent. Je me décide finalement à la regarder. Je vais paraître impolie. Elle a l'air gentille... Mais je ne sais toujours pas qui elle est et je reste sur mes gardes. Les gens ont parfois tendance à vous trahir lorsque vous leur faites trop confiance. La vie est ainsi faites et il n'y a pas de bonheur possible à long terme. Tout finit toujours par s'écrouler. C'est tout ce que ma courte et pitoyable existence m'a appris.
Envie subite de me mettre une claque pour avoir de telles pensées.
Toujours ces mêmes idées, toujours ces songes noirs, cet apitoiement sur moi-même...
Je fais décidément bien pitié !
Je ne mérite pas l'attention que certains me portent.
Je ne mérite pas d'avoir vu le jour.
Je ne mérite que... la mort et l'oubli. Même mes parents en seraient soulagés. Ils ont bien vu que mes rendez-vous chez le psy ne changeaient rien. Je dois leur faire bien pitié, à eux aussi.

« Bonjour Mademoiselle Adélie. Je suis Damara. Votre journée se passera cette fois ci en dehors de la prison. Si vous voulez bien me suivre, je vous expliquerai en chemin. »
Son français présente un accent que je ne connais pas. Mais je ne prends pas le temps de réfléchir à son origine, elle peut venir de n'importe où, et le savoir ne me dira pas ce qui se passe. Je lui lance un regard étonné. En dehors de la prison ? C'est quoi cette histoire ? Je ne comprends pas ce qui se passe et j'appréhende un peu la suite. Pourquoi est-ce que je quitte la prison ? D'autre part, le fait que la jeune femme m'ait vouvoyée me surprend un peu. Je crois que c'est la première fois, depuis que je suis ici. Je reste un instant immobile... Mais je n'ai pas vraiment le choix, de toute façon. Je réponds par un « Bonjour... » hésitant, un peu rauque, puis je suis la prénommée Damara. Je reste un peu en retrait, ne sachant pas si je devais dire quelque chose ou pas.
Puisque je me trouve un peu derrière Damara, je me permets de l'observer discrètement. Elle est plus grande que moi, c'est certain. Elle est plus fine, aussi. Et il est impossible de se tromper sur le fait qu'elle est adulte. Elle a de longs cheveux sombres assez épais et qui me semblent beaux.

Nous arrivons vite sur un parking. J'arrête de regarder mon escorte. Il ne faudrait pas qu'elle se retourne et qu'elle me surprenne en train de la fixer. Ca ne se fait pas. Et puisque je vais être seule avec Damara, autant ne pas commencer à la vexer dès le début. Je regarde donc le parking. Il est plutôt vide. Damara s'avance vers une voiture grise, sort sa clé et déverrouille la voiture à distance. Je remarque que la plaque d'immatriculation comporte un G. Je n'en suis pas sûre, mais il me semble que ce doit être une plaque grecque. Damara serait donc grecque ? Ce n'est pas impossible, son prénom a des consonances de là-bas, je trouve...
Damara ouvre la porte de la voiture. Je recommence à me demander où nous allons. Si nous prenons la voiture, c'est que ça doit se trouver loin. Mais où ? Et pourquoi ? La jeune femme me fait signe de m'asseoir, je m'éxécute. Pas envie d'avoir des ennuis ou de paraître rebelle. Je m'attache et je regarde le bitume devant moi. Enfin, nous partons. Je continue de fixer la route. Je ne sais pas parler, je ne sais pas où je vais, je ne sais pas ce que Damara attend.

Apprivoise-moi...

Le temps passe, la route file.
« Vous avez été autorisé à une journée libre pour bonne conduite. Je serais là pour garder un œil sur vous. Il est bien entendu qu’aujourd’hui, je ne serais pas gardienne. Et vous, vous ne serez pas une prisonnière. »
Je regarde Damara, interloquée. Je ne savais pas que des sorties de ce type étaient organisées dans cette prison ! Et vous, vous ne serez pas une prisonnière. Ces mots résonnent dans ma tête. Damara ne sait pas combien elle se trompe. Elle s'en rendra comte assez vite. Cela dit, je lui suis infiniment reconnaissante de s'occuper de moi. Même si cela m'a forcée à quitter ma cellule... Même si je sais que j'aurais du mal à y retourner, à présent, au risque de croiser ceux qui y vivent avec moi. J'espère pouvoir trouver une solution !
Pour le moment, je dois oublier ce problème. Il aura tout le temps de revenir me hanter lorsque nous serons sur le retour. Pour le moment, je dois profiter un minimum de cette journée que l'on m'offre loin des barreaux. Timidement, je murmure :

« Merci. »

Ma voix est moins rauque. Mais elle n'est pas assurée pour autant. On pourrait vraiment croire à une petite fille. Seul détail permettant de détruire cette hypothèse : je suis en prison et les enfants ne vont pas en prison.
« Nous allons au village. Voulez-vous faire quelques choses en particulier ? »
Je recommence à me sentir mal à l'aise. Nous allons au village. Je ne sais pas de quel village elle parle, mais sans doute de celui qui se trouve le plus proche de la prison. Et voilà qu'elle me demande ce que je veux faire. Je ne sais pas prendre des décisions. Alors non, je ne veux rien faire en particulier. D'autant plus que je ne suis pas sortie dans une ville ou un village depuis plusieurs années. Je ne sais plus ce qu'on peut y faire. Je ne sais plus, je crains. Heureusement, aujourd'hui, ce ne sera pas mon agoraphobie qui m'empêchera de vivre. Pas trop, du moins. Car je suis relativement en confiance avec Damara. Elle saurait me protéger. Contre quoi ? Aucune idée. Mais elle en serait capable. Et j'ai moins peur de la foule quand je me trouve avec quelqu'un de fort. Même si cette peur ne disparaît pas totalement. Cependant, je n'ai pas peur que de la foule. J'aurai donc sûrement du mal à me dérider.

Apprivoise-moi...

« Je... je ne sais pas. »

Mon ton est toujours aussi timide, hésitant. Impossible de s'y tromper.
Merde, Adélie, arrête d'agir comme une gamine ! Tu es grande, maintenant, apprends à décider de choses anodines !
Damara sourit. Je m'efforce de sourire à mon tour, d'un sourire néanmoins pâle et prêt à se briser. Je ne sais pas si elle le verra, mais peu importe.
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Damara Galanis
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMer 13 Aoû - 2:31

Sortir un peu loin de la prison me fait un bien fou. Bien que nous ne soyons pas encore arriver à destination, la jeune demoiselle fait un effort minime pour essayer de vaincre une certaine « curiosité » que j’ai décryptée dans sa voix. Elle n’a aucune idée sur ce qu’elle voulait faire, ceci n’est pas un problème. Nous verrons sur place. En ce moment, je me devais de faire plus ample connaissance, histoire de la relaxer un peu plus.

« Quel âge avez-vous Adélie ? »

Première chose à savoir, quoique, pas bien important. Mais puisqu’elle va être une journée avec moi, autant en apprendre un maximum de sa personne. Cette situation m’est un peu euphorique. En Grèce, on avait autorisé une sortie d’un détenu. Celui-ci avait fait faux-bond au policier qui l’accompagnait. Encore heureux, il l’a retrouvé quelques heures plus tard. Mais sur ce coup ci, je ne m’en fais pas. Mademoiselle Adélie n’avait pas l’air bien nerveuse, ni d’arrière pensée.

Ce matin promet d’être radieux, le soleil est toujours élevé dans le ciel, n’attendant que de réchauffer un peu se pays en manque de chaleur. Je n’ai d’ailleurs pas compris pourquoi on dit que les allemands sont des gens froids. Peut-être à cause de leur douloureux passé de « nazie ». Sadismus a d’ailleurs été utilisé pour ça dans ses temps les plus reculer. Moins connu, certes, mais bien présente. Je me souviens aussi, avant de partir dans ce pays, j’ai fait ma petite recherche sur les habitants.
L’allemand type donnerait ça : "Les Allemands ont un très grand respect de l'environnement, ils sont écologistes dans l'âme. Ils sont méthodiques, organisés, très consciencieux et rigoureux dans les tâches de travail. L'ambiance chaleureuse que vous découvrirez dans les brasseries, (prost) : (à la votre) en Allemand est une façon conviviale de lier connaissance. Les Allemands sont accueillants, ils aiment bien les Français, et aussi la France. L'Allemagne jouit d'une bonne qualité de vie et ils accordent une très grande importance aux loisirs. Ils sont de grands amateurs de sport, et dans toutes les villes on trouve, des cinémas, des théâtres, des concerts, des cabarets. Ce que n'aiment pas les Allemands, c'est le manque de savoir vivre, de civisme et surtout ne pas mélanger l'humour avec les affaires. La ponctualité est une qualité reconnue et importante pour les Allemands, cela fait partie de l'éducation. Pas d'embrassade, mais plutôt une bonne poignée de mains, la simplicité avant tout..."

J’avoue que jusqu’ici, je n’ai eu aucun problème avec les gens. Bien que la langue allemande me soit très peu familière. On se débrouille comme on peut avec l’anglais. Et puis, ma visite un peu plus tôt dans la matinée, ne m’a pas permis de vérifier les différentes activités que proposait le village. Il y a certes, quelques endroits que je n’ai pas évités du regard. Mais ça, on verra pas la suite.


« Quels sont vos passions ? … Aimez-vous quelque chose en particulier ?»

Autant le savoir de suite, au moins, je serai fixé sur ce genre de chose. C’est comme avec le jeune Silver. Les loups, la rose et le dessin. Et étrangement, il existe un certain lien entre ces trois choses : le calme. Un apaisement que seul les gens proche d’un univers intérieur ont la chance de côtoyer.

Les yeux fixés sur la route, je les détourne par moment pour lancer quelques regards à la demoiselle. Ma bonne humeur se dessine sur mes lèvres à chaque fois. Beaucoup d’arbres jonchent les côtés de la route. Je me souviens d’ailleurs de mon arrivée, je m’étais perdue un instant à la beauté d’un galanthus.

La ville n’était plus très loin. Encore une bonne dizaine de minutes et nous y seront. En attendant, la route se fait encore longue à mon goût. J’appréhende énormément cette journée, bien que confiante, le fait d’être avec un libre pour la journée m’est tout particulièrement agréable. De plus, avec son petit côté enfant timide. Je ne peux m’empêcher de sourire quand elle ouvre sa bouche ou quand elle évite a son tour mon regard. Détendez-vous donc Mademoiselle, je ne mange pas les papillons.
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMer 13 Aoû - 5:51

La route défile toujours. Le ciel est clair et le soleil commence à monter. Je n'ai pas très chaud, alors un peu de chaleur ne me fait pas de mal. Je ne parle toujours pas à Damara, me contentant pour le moment de répondre à ses questions. Mes réponses sont brèves pour le moment, mais peut-être qu'elle parviendra à me faire parler davantage. Avec un peu de patience et de gentillesse, on y parvient généralement. Je pique un léger fard, presque imperceptible, à cette pensée. J'ai honte. Honte de ne pas faire davantage d'efforts et d'attendre que l'Autre m'apprivoise. Honte de ma faiblesse et de ma lâcheté. Honte de ce que j'ai fait de moi. Il serait temps que je lâche prise et que je devienne celle que je dois devenir. Mes phobies ne sont pas mon destin, je peux très bien les oublier et passer outre. Mais c'est plus facile à dire qu'à faire et je préfère me leurrer en me disant que c'est ma nature.
C'est plus simple. C'est plus lâche, aussi. Mais je ne suis pas quelqu'un de courageux, il me semble l'avoir déjà dit.

« Quel âge avez-vous Adélie ? »
Pourquoi cette question ? Est-elle parfaitement anodine ? Ou bien Damara se demande-t-elle pourquoi une si jeune fille est en prison ? Elle pense peut-être que j'ai treize ans, elle aussi... C'est drôle, mes proches n'ont jamais trouvé que je faisais tellement plus jeune que mon âge. Ils m'ont toujours rassurée à ce sujet. Et c'est souvent quelques heures après cela que je rencontrais quelqu'un qui me croyait plus jeune... Au cinéma, on continue de me demander mon âge pour savoir si j'ai droit au tarif 'Enfants'. Les rares fois où je me suis trouvée dans un bar, on a refusé tout net de me servir de l'alcool. Et comme je n'ose pas montrer ma carte d'identité, dans ces moments-là, je ne bois pas d'alcool et me rabats sur un jus de fruits. De toute façon, je préfère les jus de fruits. L'alcool, c'est pas trop mon truc.
Mauvaise excuse.
Je regarde Damara. Rien ne sert de me poser des questions, elle ne peut pas lire dans mes pensées. Elle ne me dira donc pas pourquoi elle m'a posé cette question. Et puis, quelle importance, au fond ? Mon âge ne changera rien à ma situation. Quoi que... Je suis capable de me formaliser du moindre détail. Pourquoi pas de mon âge ? Allez, réponds, ma vieille ! Enfin, je lance un tout petit :

« Vingt ans, madame... »

J'ai honte. Je baisse les yeux. Déjà, je n'ai pas fait une phrase complète. Ce n'est pas bien grave, mais cela montre que je ne fais pas d'efforts. Ensuite, ce 'madame' que j'ai prononcé... Il n'y a que les petites filles qui parlent de la sorte. Un adulte ne dirait pas ça comme ça. Preuve qu'une personne majeure n'est pas forcément adulte. Je suis une gamine, merde ! Pourquoi est-ce que je ne parviens pas à grandir un peu ? Pourquoi est-ce que je ne fais pas d'efforts ? Ce n'est pas bien sorcier, pourtant ! Tout le monde y arrive, pourquoi pas moi ?
Parce que je suis faible.
Mais ça n'est pas une excuse. La faiblesse n'est pas une fatalité.
La faiblesse est douce et rassurante. Elle permet de ne pas avoir à faire trop d'efforts. Elle incite les autres à s'occuper de moi.
Elle vous rend minable et pitoyable. La faiblesse n'est pas quelque chose de bon et d'agréable, ressaisis-toi ! Tu veux être dépendante du bon vouloir des autres pendant toute ta vie ?
Les trois mots que j'ai prononcés sonnent à mon oreille comme une excuse déguisée. Comme si je voulais m'excuser d'être déjà en prison à mon âge. Comme si je demandais pardon pour le fait que mon âge ne soit pas marqué sur mon front. Au fond, c'est un peu ça. Je demande pardon, bien qu'il n'y ait pas de raison pour cela. Et puis par la même occasion, je m'excuse d'être si fragile et de demander tant d'attention. Tout cela dans trois mots... J'ai honte. J'ai honte de demander pardon comme j'ai honte de ce pourquoi je demande pardon. Je suis vraiment irrécupérable.

Damara me demande à présent quelles sont mes passions. Je lui suis extrêmement reconnaissante d'essayer de me mettre à l'aise. Je réfléchis un peu, tout en fixant la route. Mes passions ? Cela peut se résumer assez rapidement. Je joue du piano. Je réfléchis encore. Ce n'est pas tout. J'aime beaucoup l'anthropologie, aussi. C'est tellement passionnant d'en apprendre plus sur des peuples lointains ! Je réfléchis encore un peu... J'aime bien la nature, aussi. C'est calme, c'est reposant, c'est sécurisant. Ce n'est pas vraiment une passion, mais c'est quelque chose que j'aime en particulier. Je regarde mon accompagnatrice. Elle sourit toujours. Elle semble être vraiment de bonne humeur ! Cela me rassure un peu, me redonne un peu de confiance. Je lui réponds en m'efforçant de faire une vraie phrase, pour une fois, et de ne pas avoir une voix trop faible :

« J'aime jouer du piano... Et étudier l'anthropologie. Et j'aime la nature, aussi... »

J'ai l'air un peu plus assurée, mais ma voix n'en témoigne pas moins de ma timidité. Je ne précise pas que je n'aime jouer du piano que lorsque je suis seule et qu'il me permet plus ou moins de m'évader. Je ne précise pas que je n'étudie l'anthropologie que dans des livres par peur d'aller au devant de l'Autre. Je ne précise pas, enfin que j'aime la nature parce que l'Homme la craint. Je reste assez vague... J'espère qu'elle ne m'en tiendra pas rigueur. Je ne peux pas lui avouer comme ça le fond de ma pensée. Ce serait trop facile. Je ne suis pas encore assez en confiance.
A nouveau, je souris faiblement. Peut-être pour lui donner l'illusion que ça va. Ou bien pour me donner cette illusion. Ou encore pour me rassurer.

La route défile toujours devant moi.
Tous mes mots gèlent à l'intérieur de la machine.
Mais peut-être le soleil et sa rassurante chaleur y pourront-ils quelque chose.
Je souris à cette pensée. Mais à l'intérieur.
Je n'en montre rien.
Mon sourire n'est pas visible de l'extérieur.
Il est en moi, c'est mon secret.

Soleil, réchauffe-moi.
Damara, apprivoise-moi.
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeJeu 14 Aoû - 15:27

Rare sont les autres voitures apparentent sur la route. A vrai dire, il n’y en a que deux, voir trois que j’ai aperçu depuis que nous avons quitter la prison. Le chemin planté en plein milieu des arbres n’est pas très vivant. Quoi qu’en Grèce, ce n’est pas très différent dans certaines régions. Quand j’étais plus petite, et qu’avec Sebasten on passait dans un bois la nuit. J’avais toujours peur. Peur qu’on percute un animal ou encore qu’on ait un accident. Heureusement pour moi, cela n’est jamais arrivé. Mais c’est bien arrivé à Anthony … Je chasse l’homme de mon esprit. L’homme qui aurait dû être mien. Tout en reposant mon attention sur Adélie, j’apprends d’elle qu’elle aime le piano, la nature et l’anthropologie. Intéressant, j’avoue.

Le piano est un instrument fascinant, que j’aime d’ailleurs, beaucoup écouter. L’ancêtre de celui-ci, si je ne me trompe pas est le tympanon. Qui lui tire son origine du verbe grec correspondant à l’action de frapper du haut vers le bas. Les instruments de musiques apparaissent assez souvent dans la mythologie grecque.

L’anthropologie, encore un mot qui trouve ses racines dans le grec ; anthropos qui signifie homme et logos qui signifie l'étude. C’est la branche des sciences humaines/sociales. J’ai toujours été une grande sociale. Mais étudier, vouloir savoir comment est l’homme dans son entièreté, cela ne m’intéresse nullement. Quoi qu’il en soit, Mademoiselle Adélie a un côté social refoulé. Peur du monde peut-être. Mais dans ce cas, pour étudier ce qui fait l’homme ? Il a des questions qui resteront sans réponse Damara, tu te dois d’accepter ce fait.

Quelques oiseaux volent dans le ciel, j’entends déjà le chant des vagues sur la plage. C’est si parallèle à mon pays. Sauf que, la joie n’y est pas, pas comme la bas du moins. Je comprends tout de même quand on dit « on se sent mieux chez soi ». Même les oiseaux qui migrent, reviennent toujours chez eux.


« Vous pouvez m’appelez Damara. »

Bien entendu, de mon côté, depuis que je suis ici, j’ai dû mal à me détacher du vouvoiement. Surtout qu’en Grèce, utilisez le terme « vous » est impolie. Tout le monde se tutoie, des jeunes aux personnes âgées. C’est comme une grande famille. Pour preuve, je connais tout le monde dans ma ville. De l’épicier au marchant de bijoux. Passant par quelques pêcheurs. Les enfants me manquent énormément, surtout la petite Phaedra. Encore plus Danaé …

« Vous ne faites absolument pas vos vingt ans. Mais ça, je suppose que je ne suis pas la première à vous faire la remarque. »

Tout ça pour en venir à quoi ? Que je n’ai que cinq ans en plus qu’elle. La différence n’est pas bien énorme. C’est tout de même assez impressionnant de voir une jeune femme dans le corps d’une petite fille fragile …

Nous arrivons enfin à la ville. De là, je gare la voiture à l’entrée du village. Retirant la ceinture de sécurité, j’ouvre ma portière en prenant des paperasses que je mets dans ma poche. Tout en faisant signe à la Demoiselle de me suivre, j’avance vers ce fameux endroit que je n’avais pas pris le temps de regarder ce matin. Je me retourne vers Adélie en lui demandant avec le sourire ;


« Vous avez faim ? »
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeJeu 14 Aoû - 16:43

Et la route continue, bordée d'arbres. Par la fenêtre légèrement ouverte, je peux entendre un bruit qui ne m'est pas vraiment familier, mais que j'identifie immédiatement comme celui de vagues. J'ignorais qu'on se trouvait près d'une mer. C'est fou, je suis venue ici en avion sans savoir dans quel coin de l'Allemagne je me rendais ! C'est un peu ridicule, je trouve. Je n'y avais même pas pensé plus tôt... Si j'avais été un peu plus à l'aise, je crois que j'aurais ri. Et si j'avais été une autre personne, je me serais tout simplement moqué de moi. Aller travailler quelque part sans savoir où, en ayant tout simplement pris un avion quelconque qui s'y rendait... Me voilà rattrapée par... je sais pas, par la société, peut-être. Une société où l'on se sait pas ce que l'on achète, ce que l'on fait ou où l'on va. Une société où chacun se ferme au monde qui l'entoure.
Encore une fois, j'ai envie de rire. Cette société-là, j'y ai toujours été. Cela fait si longtemps que je me ferme aux autres ! A l'intérieur, je suis curieuse, je me renseigne, j'envie ceux qui vont voir les autres. J'envie ces peuplades communautaires vivant aux quatre coins du monde et j'ai envie de tout savoir sur elles. Et dans le même temps, je suis tout bonnement incapable de dire bonjour au boulanger de mon quartier quand je le croise ! Il faut reconnaître qu'il y a une part de risible dans cette situation. Mais je ne ris pas. Je n'ai plus envie de rire. Je ne mérite qu'un coup de pied au cul et "bouge-toi !". Je suis juste étrange, je suis juste inhumaine. Je ne suis rien...

Mi mineur, do.
Là, c'est le genre de moment dramatique où la musique se déclenche, dans mon anime favorite. Solitude, entonne une voix masculine. Solitude...
Solitude intérieure, au moins. Damara a beau être avec moi, ça ne change pas grand chose, pour le moment.

Damara me dit que je peux l'appeler par son prénom, et par là-même abandonner le 'madame' que j'ai utilisé il y a peu. Remarquez, je m'en doutais un peu que je pouvais l'oublier, ce mot... C'est juste qu'il s'est imposé et que je n'ai pas réfléchi, pas cherché à le chasser. Il était là, je l'ai utilisé. Comme une gamine. Comme une pauvre fille incapable de prendre des décisions par elle-même.
Je ne réponds pas. D'accord, je dirai Damara. J'essaierai, tout du moins. Ce n'est pas comme avec Bella et Siriel. C'était différent, avec eux. Ils étaient des prisonniers, comme moi. En quelque sorte, j'étais au même niveau qu'eux, presque leur égale - hiérarchiquement parlant, bien sûr, parce que niveau social, émotionnel ou autre, je n'arrive pas à la cheville de grand monde. Mais là, c'est une gardienne. Comme à la fac, avec mes profs. C'était impossible de leur parler comme aux étudiants. Pour commencer, c'était pour moi impossible de leur parler, point. Mais si j'avais osé, ça aurait été différent. Je leur aurais parlé avec une distance que je ne mettais pas entre moi et les rares étudiants auxquels j'ai adressé la parole. Il y aurait eu dans mes paroles une sorte de respect apparenté à de la crainte. Oui, voilà, je les craignais un peu. Avec Damara, c'est à peu près la même chose. Elle ne me fait pas peur, ça non, elle a l'air plutôt gentille, plutôt douce. Mais elle est gardienne. Je ne serai jamais son égale, même hiérarchiquement parlant. C'est là toute la différence. Ca peut paraître falot, comme nuance, mais pour moi c'est important.
Mais promis, j'essaierai.

Quelques instants s'écoulent, silencieux.

Le silence - relatif, n'oublions pas que nous sommes dans une voiture - est une nouvelle fois brisé par Damara. Je ne fais pas mon âge... Oui, on me l'a déjà dit... Je n'ai pas compté le nombre de fois, peur de m'épuiser à retenir des chiffres trop grands, peut-être. Je n'y fais plus vraiment attention. Quoi que... Ca m'attriste toujours un peu, au fond. Il y a une époque où je relevais. J'avais envie de lancer un regard noir à l'importun et de tourner les talons pour partir sans un mot. Mais bien évidemment, je n'en faisais rien. Je corrigeais - parfois, en fait quand ça ne m'arrangeait pas, bizarrement - l'erreur avec un sourire gentil et je faisais comme si ça n'était pas grave. Cela dit, je fais toujours un peu pareil. Mais ça me dérange moins, je crois... Au moins un peu.
Je ne sais pas quoi répondre. Je n'ai rien à répondre. Mais c'est toujours plus agréable pour l'autre, je l'ai remarqué...
Allez, trouve un truc, n'importe quoi !
Je transpire un peu, je ne sais pas quoi dire.

« Hmm. »

Super, tout ce que j'ai réussi à sortir, c'est une sorte de grognement strictement incompréhensible. Espérons au moins qu'elle aura deviné que j'acquiesce, et qu'elle ne croira pas que je veux l'agresser !
Toujours aussi pitoyable...

La voiture s'arrête. Nous sommes arrivées au village. J'imite Damara et sors de la voiture après avoir défait la ceinture de sécurité. Je n'ai pas le temps de rester immobile, bras ballants et ne sachant pas où me mettre ni quoi faire, car déjà la gardienne me fait signe de la suivre avant de me demander si j'ai faim. Oh oui ! Je ne m'en suis pas rendue compte jusque là, trop occupée que j'étais à avoir peur et à répondre à Damara, mais oui, j'ai faim. Terriblement faim. Cela doit faire une semaine que je n'ai pas mangé. A mon arrivée, j'ai trouvé trois vieux pains durs comme du bois dans un coin de la cellule, et je les ai mangés doucement, histoire de ne pas en manquer trop vite. J'avais toujours cette peur bleue de sortir de ma cellule et d'avoir à me retrouver, plus tard, face aux autres occupants. Mais il y a un moment où les trois pains ont été terminés. Et alors j'étais trop paralysée pour faire quoi que ce soit. J'ai attendu que ça se passe. Trois pains en près d'un mois, ce n'est pas beaucoup, je le concède. Je pense que j'ai fait pire, comme jeûne, mais il ne faudrait pas que je continue comme ça. J'ai du perdre quelques kilos, à ce régime. Heureusement, mes vêtements sont amples. Ca ne doit pas trop se voir. Mais tout de même, il faut que je fasse attention. A force de dormir une bonne partie de la journée, je ne m'étais même pas rendue compte que j'avais faim. Et puis quand on jeûne, la sensation de faim disparaît généralement assez vite. Mais ce n'est pas une bonne chose.
Pitoyable...
Du coup, je réponds avec un empressement modéré, parce que je n'ai pas envie que Damara remarque que je crève de faim. Je me fais assez remarquer par mon caractère. Ca suffit. Pas besoin de ressembler à une grande malade qui a besoin que l'on s'occupe d'elle. J'ai déjà fait ça avec Bella et Siriel... Et jusqu'à preuve du contraire, ça ne m'a rien apporté, sinon un dessin et deux connaissances dans la prison. Deux connaissances qui sont restées de simple connaissances, pour le moment. Je ne pense pas qu'ils aient cherché à me revoir. Je ne sais pas pourquoi et je préfère ne pas me le demander, sinon je vais encore partir dans des délires de paranoïaque. Et puis de toute façon, je n'ai pas cherché non plus à les retrouver. Pour beaucoup de gens, cela suffit. "Elle ne veut pas nous voir, ne lui imposons pas notre présence", tel semble être l'adage du commun des mortels.

En tout cas, je suis sacrément contente que l'on m'ait demandé d'accompagner Damara au village, du coup. Parce que j'aurais passé encore une journée sans manger, dans le cas contraire.

« Oui... Un peu. »

Un peu... Pur mensonge. J'ai carrément faim, c'est maintenant clair comme de l'eau de roche. Je crois que je ne ferai pas ma difficile et que je mangerai tout ce qu'on me donnera. Sauf que je sais pas où on va. J'espère que c'est pas une sorte de restaurant. Ou alors un restaurant presque vide avec des tables isolées les unes des autres... Mais c'est rare. Le truc, c'est que j'aime très moyennement la foule. Et même moins que ça. Enfin bon, je ne vais pas commencer à paniquer tout de suite, ce serait dommage. Attendons au moins d'être à l'intérieur.
Et là, c'est ballot, parce que la panique, je commence à la sentir monter... Elle ne tardera pas. Et je ne suis pas assez courageuse pour l'empêcher de se montrer.

Voilà qui met fin au peu de liberté que l'on m'a donné pour ce jour.
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeLun 18 Aoû - 15:18

Mademoiselle Adélie semble avoir plus faim qu’il n’y parait. De toute évidence, cela ne m’étonne pas. Ce matin là, quand j’ai demandé à l’un de mes collègues d’aller la chercher, il a dû la tirer du lit. Et bien entendu, vu qu’il y a une heure d’ouverture pour le réfectoire, je doute qu’elle se soit mi quelque chose sous la dent depuis hier. Je fixe ma montre : 9:30. Il y a coup sûr un café d’ouvert. Tout en souriant à Adélie, je l’invite à me suivre entre les rues de ce petit village qui ne m’était gère très familier.

Les maisons typiquement allemandes sont très impressionnantes. Assez imposante, elles ne se collent presque pas. La façade d’un blanc pâle est jonchée de latte de bois formant des espèces de carrés avec en son intérieur des diagonales. Le toit est en tuile sombre, un genre de brun proche de celui des lattes en bois. Certaines de ces maisons se dressent sur un parterre de pierres solidement encastrées dans le sol.

Le type de village est un peu vieillot, assez simple. Donnant un côté « moyenâgeux » à l’endroit en question. Les rues sont évidemment en pierre. D’anciennes dalles grisâtres. Pas vraiment les mêmes que celles d’Athènes. Et puis, ce n’est pas vraiment le moment de s’interroger sur le type de pierre qui forme ce village d’Allemagne. J’en aurai peut-être l’occasion un peu plus tard … Après avoir tourné pendant quelques minutes dans les rues, un café se dessine enfin devant Adélie et moi. Tout en prenant la direction, j’observe bien vite le lieu. Des chaises reposent autour des plusieurs tables en terrasse. Il y a par chance peu de monde. Je ne pense pas que déjeuner dehors gênera la demoiselle. Puisque pour une fois, le temps est plutôt agréable.

Prenant place, je m’installe juste en face d’Adélie. Tout en prenant la carte de menus dans les mains, je tourne les pages pour venir au sommaire : ‘’ Déjeuner ‘’. Le choix est assez vaste ; café, lait, chocolat aux choix, jus de fruits, céréales avec du yaourt, des brötchen (pain au cumin, au sésame, tartiné de beurre) des bretzels avec du fromage, une omelette ou des oeufs coques, des petits pains avec la charcuterie allemande mortadelle, … Pour ma part, je me contenterai d’un simple chocolat chaud avec un croissant. Je n’avais encore jamais réellement goûté les spécialités culinaires de l’Allemagne. Je me contentais des plats grecs. Bien piquant. J’adore tout particulièrement le briki ; poudre de café et sucre mélangé avec de l’eau bouillante et siroté lentement. Et le Koulourakia qui est lui, un gâteau sec rond parfumer au café, à la cannelle ou au chocolat. Les grecs déjeunent aussi tout bêtement du pain agrémenté de sucrerie, miel, confiture de pastèque, d’orange amère, de melon … Assez différent des allemands. Je tends le menu à Adélie ;


« Regardez ce que vous voulez prendre. Et surtout, n’hésitez pas ! »

Toujours avec autant d’enthousiasme dans la voix. Je n’ai aucune envie que la jeune femme se prive de quoique ce soit aujourd’hui. Qu’elle le veuille ou non, elle n’est plus prisonnière depuis qu’elle a mi le pied en dehors de la prison. J’attends patiemment qu’un serveur arrive pour prendre notre commende. D’un coup d’œil rapide, j’aperçois un jeune homme. Etrangement familier, plutôt grand, le teint mâte, cheveux noirs aux yeux verts. Autour de son cou, pend un médaillon. Plus précisément une réplique d'une pièce de monnaie athénienne de quatre drachmes. On ne vend ce modèle qu’en Grèce …

« Me sinhoríte ! »

Pour être sûre que je ne fais pas fausse route, j’ai volontairement appelé le jeune homme par ma langue maternelle. Celui-ci se retourne vers nous avec un large sourire aux lèvres. Tout en s’approchant de nous, dans son costume de serveur, il lance à notre adresse : « Kaliméra despinís ! », plutôt traduit par : « Bonjour mesdemoiselles ». S’en suive un échange linguistique, pour en venir au fait que nous étions, Adélie et moi, ici pour déjeuner. Le garçon a apparemment remarqué que ma jeune compagne ne comprenait pas un traître mot du grec. Gentiment, je lui explique qu’elle ne comprenait que l’Anglais.

« Can I take your order? »

Les grecs ont pour habitude d’être très familier envers les autres personnes. Le fait de mettre Adélie en contact direct avec un homme de mon pays, devrait la stimuler un peu plus en voyant comment nous étions entre nous. Tout en souriant à Adélie, je demande un simple chocolat chaud et un croissant. Le garçon note tout en regardant par la suite la jeune femme, attendant patiemment, qu’elle se décide.

Une fois l’homme partit chercher notre commande, des tonnes de questions me viennent à l’esprit. Mais même en une journée, j’aurai du mal à connaître parfaitement ma protégée. Alors juste histoire de la mettre dans le bain, je lui demande ;


« Parlez moi un peu de votre famille, Adélie. »
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeLun 18 Aoû - 18:41

Je suis Damara dans le village. D'après le peu de choses que je sais sur l'Allemagne, il me semble me trouver dans un village typique, plutôt ancien. La plupart des maisons sont à colombages. Je ne sais pas de quelle époque datent ce type de constructions, mais c'est vieux. Pour moi, ça date au moins du Moyen-Âge. Mais je peux me tromper. Je ne suis pas très calée en histoire... Quand j'étais enfant, je rêvais de vivre dans un endroit pareil. Je ne sais pas vraiment pourquoi, peut-être parce que je rêvais d'être une princesse des temps anciens. Mais ce n'est pas comme dans mes rêves. Ici, il y a des voitures, il y a des gens et je ne me sens pas bien au milieu d'eux. Ici, je suis prisonnière, quoi que ma geôlière puisse en dire. Le fait d'être sortie du bagne n'y change rien. J'y retournerai ce soir avec un arrière-goût de liberté, et j'aurai à affronter le regard des autres détenus, ceux à qui je n'ai pas encore daigné parler. Je serai à nouveau lâchée parmi de potentiels fauves, sans personne pour me sauver de mon imagination débordante.
Je veux pleurer, je veux maman.
Le village sourit. J'ai l'impression d'être dans un jeu pour enfants. Des maisons de rêve dans un monde parfait. J'imagine plein de petits bonhommes vêtus avec la tenue typique bavaroise. Ou bien des chevaliers. Quelque chose de pittoresque. Ou d'héroïque. Quelque chose dans ce goût là. Quelque chose qui amuse les enfants à coup sûr. Et au milieu de cette joie, le vilain petit canard qui voudrait se cacher mais qui marche au milieu des rues. Le vilain petit canard plein de couleurs qui ne peut qu'être remarqué mais qui voudrait être une autruche et pouvoir se cacher la tête dans le sol.
J'essaie de ne rien montrer de mon malaise. Damara fait des efforts. Elle veut vraiment que je me sente libre. Je ne voudrais pas tout gâcher.
Je veux me sentir libre...
Mais c'est trop me demander.

J'ai l'impression que les gens me dévisagent.
Est-ce qu'ils savent que je viens de la prison ? Est-ce écrit sur moi ?
Me jugent-ils ?
Oui.
Ma respiration s'accélère peu à peu.

Cacher... Je dois cacher tout cela.

Les battements de mon coeur se font plus rapides, plus pressants. J'essaie de calmer ma respiration, mais c'est peine perdue, elle accélère encore, devient plus difficile.
Je transpire. J'ai chaud. J'ai froid.
Je ne peux plus avancer. Ils me regardent, ils rient !
Tout tourne.

Ne pas le montrer...

Je me force peu à peu à me calmer. La peur est toujours là. Elle ne partira pas. Mais je ne veux pas montrer mes faiblesses à Damara. Pas déjà... Je m'efforce de la suivre sans un mot, sans un bruit. J'utilise toute ma concentration pour la suivre sans chuter et sans qu'elle me remarque. Je ne suis qu'une présence, je ne veux rien être d'autre. Ne te retourne pas... Les pavés défilent sous mes pas. J'ai mal aux yeux. L'impression de forcer mes yeux à s'écarquiller alors qu'ils ne voudraient que se fermer. Impression de vertige... Cette répétition de lignes et de formes sous mes pas... Douleurs. Je marche toujours, bien que ça soit difficile. A vrai dire, je n'ai qu'une envie, et c'est de m'effondrer avant de prendre ma tête dans mes mains et de pleurer. Cessez de me regarder... Allez vous-en !
Les rues sont presque désertes. Pourtant, je sens le regard des rares personnes que nous croisons.
Je sais qu'ils ne me jugent pas.
Mais je sais aussi qu'ils me jugent.

C'est drôle, j'ai très envie que Damara se retourne et me voie dans cet état. Qu'elle me serre dans mes bras et me console. Mais le ferait-elle ? Est-elle aussi douce qu'elle en a l'air ?
Dans le doute, je choisis la prudence.
Et la peur est toujours là, au creux de ma conscience, à peine dissimulée.
Chut.
Je dois me calmer. Penser à quelque chose de calme. La nuit. La nuit est douce, elle m'enlace de ses longs bras protecteurs. Le calme m'enveloppe, me guide. Et la lune brille, rassurante. Quelques oiseaux chantent dans le lointain. L'air est frais et me caresse le front. C'est bon, c'est doux... La nuit est là, je ne crains plus rien. Chut, Adélie... Reprends-toi. La visualisation n'a jamais vraiment marché avec moi. Je ne parviens jamais à vraiment m'imaginer que je ne suis plus là où je suis. La peur est trop grande. Pourtant, elle m'apaise quelque peu, aujourd'hui... Suffisamment pour continuer à suivre Damara sans me faire remarquer. Et je me concentre à nouveau sur mes pas. Ca m'aide à oublier.

Nous arrivons devant une sorte de café. Par chance, il n'y a pas trop de monde. Mais ça reste un lieu public. Je vais devoir manger au milieu d'autres gens qui pourront me regarder. Mais je n'ai pas le choix. Damara choisit une table à l'extérieur. Près d'une sorte de paravent recouvert de végétaux. Je prends place dos à cet objet, comme s'il pouvait protéger mes arrières. De là, je pourrai avoir un oeil sur tout ce qui se passera. C'est toujours mieux que rien. J'ai besoin de contrôler. Ne pas me retrouver dos aux potentiels dangers. Aucune attaque ne viendra par derrière. En cas de danger, je peux fuir. Ou me défendre.
Il n'y aura pas de danger. Je le sais.
Mais c'est comme ça. On ne sait jamais.

Sur la table, il y a une carte. Damara me la tend, m'explique que je peux choisir ce que je veux. Je parcours le menu. Est-ce que je peux vraiment choisir ? Et est-ce qu'elle paiera pour moi ? Sans rien demander en échange ? Cela me gène, je n'aime pas être redevable. Et je n'aime pas choisir, non plus. Je ne sais pas choisir. Je sais que je vais prendre le moins cher. Je me connais. Mais j'ai faim... Mais je n'ai pas envie d'avoir une dette envers Damara.
Mince...
Allez, quoi ! Elle te l'offre, tu peux bien accepter !
Hmm...
Je parcours une nouvelle fois le menu. A la page des petits déjeuners. Je sais qu'on ne sert pas autre chose aussi tôt le matin.
En fait, je veux manger n'importe quoi... Quelque chose de nourrissant, c'est tout ce que je demande. Quelque chose qui ne me donnera pas faim dans deux heures. S'il y a un problème, il faut que je puisse me passer de nourriture pendant encore un ou deux jours. Puis je trouverai une solution, sans aucun doute. Il ne faut pas quelque chose de trop sucré. Le sucré, ça donne faim. J'ai déjà expérimenté. Des céréales, c'est le mieux. Mais il faut des fibres et des protéines, aussi... Sinon je vais avoir des carences. Remarquez, j'en ai certainement déjà. Je n'ai jamais vraiment mangé de manière très équilibrée. Va pour des céréales, alors. On dit que ça donne de l'énergie.

J'entends Damara héler quelqu'un. Un serveur. Dans une langue que je ne connais pas. Le grec ? Peut-être... Ces consonances, ça pourrait être ça. La gardienne et le serveur discutent pendant un petit moment dans cette langue que je ne comprends pas. Je suis mal à l'aise, je ne sais pas où me mettre. Je n'ai jamais trop aimé me trouver au milieu d'une conversation à laquelle je ne peux pas participer. J'ai envie d'être à mille kilomètres d'ici. J'ai envie de me lever et de partir en courant. mais je sais que je n'oserais jamais. Et puis ça pourrait être pris comme une tentative d'évasion. Je ne veux pas avoir d'ennuis.
Alors je reste là, les yeux baissés, les joues rouges, la peau moite et la respiration difficile. Damara ne verra peut-être rien. Ca m'est déjà arrivé d'avoir une crise au milieu d'un cours sans que personne ne le remarque. C'est assez pénible, mais ça arrive.
Envie de demander au prof de sortir un moment, d'aller me mettre de l'eau sur le visage. Mais aucun son ne sort. C'était un cours d'anglais, nous préparions un oral. Ce simple "Excusez-moi..." se bloque dans ma gorge, incapable d'aller plus loin. Je reste sur ma chaise en ayant l'impression que je vais m'évanouir. Indifférence totale. Pas un seul étudiant ne se rend compte de ma crise. Ni le prof, installé à son bureau. Ni mes proches voisins. Trop occupés. Trop aveugles... Envie de crier. Regardez-moi, aidez-moi ! Pas un regard, pas un geste. Peut-être font-ils semblant de ne pas voir. Ils ne veulent pas voir.

Enfin, je vois que le serveur s'adresse à moi. En anglais, super... Il ne faut pas rêver, je suis en allemagne. J'ai déjà de la chance qu'il ne parle pas exclusivement allemand. "Can I take your ..." Le dernier mot m'échappe. "Puis-je prendre votre ..." Commande. Ca doit être ça. C'est sûr. Un doute subsiste, je ne veux pas répondre. Mais je suis dans un café, ça ne peut pas être autre chose. J'ai l'impression de fixer le serveur bêtement.
Damara lui a-t-il dit que je venais de la prison ?
A cette pensée, mon coeur se remet à battre la chamade.
Elle a dit qu'aujourd'hui je n'étais pas une prisonnière. Elle n'a rien dit au serveur.
Mais comment en être sûre ?
Arrête de le fixer, réponds !
En anglais, bien sûr...

« Hum... Bread... Please... And... and tea. Please... »

Superbe accent... Ou pas.
Du pain. Voilà qui est parfait pour se remplir l'estomac. Je crois. Et puis le thé... J'aurais préféré demander de l'eau, mais c'est plutôt mal vu, en général, quand on est dans un café. Le thé, c'est un peu comme de l'eau, avec du goût en plus. Il me semble. Je ne bois jamais de thé.
Je regarde le jeune homme s'éloigner. Le fait que je lui demande du pain semble l'avoir un peu surpris. Ca doit être rare de demander du pain sans rien pour mettre dessus. Mais tant pis, je veux juste du pain. S'il y a quelque chose avec, j'aviserai. Si c'est de la confiture, je ne la mangerai pas. C'est trop sucré, ça me donnerait faim.

Je regarde la table. Je la trouve soudain fascinante. Presque autant que mes pieds en général. Je pourrais la fixer pendant des heures. Mais je n'en ai pas le temps, car Damara me pose une question que je juge un peu étrange, sur ma famille. Pas le temps de réfléchir. Enfin ce n'est pas vraiment une question de temps, mais je ne veux pas montrer que je suis mal à l'aise. Alors je réponds assez vite :

« Ben... C'est une famille normale... Mon père est ingénieur et ma mère est aide-soignante... Voilà. »

Je me tais.
Je ne vois pas que dire de plus. Ma vie familiale n'a rien d'exaltant.
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Damara Galanis
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMar 19 Aoû - 11:40

Les jambes croisées sous la table, mon coude vient se poser sur la surface de celle-ci, soutenant mon visage. Tandis que mon autre main traîne sur mes cuisses. La demoiselle m’apprend que ses parents étaient tout deux, ingénieur et aide-soignante. Est-elle fille unique ? Puisqu’elle ne mentionne pas une autre présence d’enfant, je suppose que oui. Je me mets à imaginer un peu ses parents. Je vois parfaitement le visage de sa mère, le même que le sien. Avec peut-être les yeux et la couleur sombre de ses cheveux de son père. Je remarque du coup, que Adélie n’osera pas jouer aux questions. J’impose donc ma propre personne devant ses yeux :

« Pour ma part, je ne vis qu’avec mon père. C’est un historien renommé à Athènes. C’est d’ailleurs de là que je viens. »

Il me manque bien entendu une mère. Mais ça, elle le remarquera bien d’elle-même. Physiquement, je ressemble surtout à ma mère. Les traits du visage, la douceur qui me colle à la peau. La seule chose que j’ai de mon père, c’est la couleur de ses yeux. Un rare bleu clair, une chose typique des Galanis. J’avais d’ailleurs expliqué l’origine de mon nom de famille et de mon prénom à Mademoiselle Hope. Pour continuer à être au même niveau qu’elle :

« J’ai cinq ans en plus que vous. Mes passions se résument à ce que je devrais être à présent : Historienne et Naturaliste. »

D’où le fait que mes parents l’étaient. Papa est un historien qui s’est toujours intéressé de près à l’histoire de notre pays. Quand à ma mère, la nature a toujours été sa première passion. Après la famille qu’elle aurait pu fonder bien entendu. La vie en a malheureusement décidé autrement. Le serveur grec revient vers nous avec un plateau en main. Affichant un grand sourire, il dépose devant moi mes biens, et devant Adélie, son thé et son pain accompagné de beurre.

Lançant un « evkaristó » à l’adresse du jeune homme, je reviens à ma protégée. Elle ne me semblait pas encore tout à fait à son aise malgré tout. Mais je ne m’en fais pas, j’ai toute une journée pour ça. Et puis, on ne reste pas bien longtemps coincé avec moi. J’ai voyager dans toute la Grèce, et les gens agréables de chacune des villes dans lesquelles j’ai posé le pied, étaient tous très accueillant et me mettait tout de suite dans le bain. Le propre des grecs : l’hospitalité.


« D’où venez vous exactement ? »

Un pays, une terre, une origine. Le point de départ d’une vie entière. Je suis curieuse d’histoire, de connaissance en ce qui concerne un nouveau milieu. Jusqu’ici, je n’ai fait qu’étudier mon pays, et éventuellement un peu la structure de la prison en elle-même. La pierre est le vestige des années. Sourire sur sourire. Je ne m’efforce pas à donner une fausse image de moi à Adélie. Elle est assez grande pour savoir si j’étais trompeuse ou non. Je porte mon chocolat chaud à mes lèvres. Pour être chaud, il l’est !

« Simple curiosité, vous avez déjà voyagé ? »
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMer 20 Aoû - 8:55

Il n'y a pas grand monde dans le café où nous nous trouvons. Quelques habitués au bar, deux ou trois autres personnes en terrasse, comme nous. Ils sont peu, et pourtant, je voudrais leur lancer des regards, comme pour m'assurer qu'ils ne s'intéressent pas à moi. Mais je ne peux pas faire ça. S'ils s'aperçoivent que je les observent, ils peuvent s'énerver. Certaines personnes n'aiment pas qu'on les regarde. Alors je fixe bêtement la table, m'efforçant tout de même de regarder Damara de temps à autre. Elle fait tout pour me mettre à l'aise, aussi serait-ce bien que je fasse quelques efforts, moi aussi.
Effectivement, Damara semble vouloir vraiment me mettre à l'aise. A moins que ce soit juste qu'elle aime parler d'elle... Mais franchement, je ne crois pas. J'ai la nette impression qu'elle veut me détendre.
Ainsi donc, elle vient d'Athènes. Et son père est historien. Il doit être passionnant ! Pour ma part, je ne connais pas vraiment bien l'histoire. J'ai toujours trouvé ça fascinant, mais la manière dont on a essayé de me l'enseigner au collège et au lycée avait quelque chose de rebutant. Et puis mes centres d'intérêt sont trop variés, trop éloignés les uns des autres. Il est un moment où il faut faire un choix. J'ai abandonné l'histoire. Comme beaucoup de choses.
Et sa mère, où est-elle ? Ses parents sont-ils divorcés ? J'ai envie de poser la question à Damara, mais quelque chose m'en empêcher. Un mélange de ma timidité et de... je sais pas, une sorte de respect. Peut-être n'a-t-elle pas envie qu'une étrangère évoque sa mère, peut-être ne l'a-t-elle plus vue depuis longtemps. Je n'ai pas envie de la vexer ou d'effacer son apparente bonne humeur.

Je me tais donc.
Pour changer...

Mais Damara ne se décourage pas. Elle a cinq ans de plus que moi. Elle s'intéresse à l'histoire et à la nature. Quand elle commence à parler de ses passions, elle doit être très intéressante. J'aimerais bien connaître la nature. Que ce doit-être fascinant de savoir reconnaître les espèces et de savoir des choses sur elles ! Moi, je n'y connais rien. Je sais reconnaître deux ou trois plantes qui poussent chez moi, comme le châtaigner, je connais le nom latin d'un ou deux animaux, mais mes connaissances s'arrêtent là. La nature est plus une sorte de havre, pour moi. Je m'y perds et m'y blottis, j'y savoure la paix et la solitude. Ce silence si parfait...
A la réflexion, il est vrai que j'aurais pu m'attacher davantage aux lieux dans lesquels je passe du temps. Mais c'est peu aisé pour moi, car je n'ai pas de livre sur la nature. Cela pourrait ne pas être un problème, mais voilà, je suis incapable de me rendre dans une librairie pour acheter des livres. Alors pour l'instant, il est inconcevable que je me mette à étudier seule la nature. Mais ça, je ne peux pas le dire. C'est vraiment trop ridicule. Se rendre dans une librairie, ce n'est pas comme décrocher la lune, tout de même ! C'est tout simple... Prendre le bus, rentrer dans la librairie, saluer, trouver un livre, saluer, payer, sortir. Simple comme... bonjour. Pourtant, c'est beaucoup trop pour moi. Prendre le bus est peut-être le pire. Mais même dire bonjour à une caissière avec le risque qu'elle ne me réponde pas, c'est trop. Alors tant pis. Pas d'étude naturaliste. Je me contente de lire les livres de mes parents, c'est mieux que rien.
Remarquez, j'aurais pu trouver des cours sur internet, aussi... Mais quand je suis en forêt, je n'ai plus internet. Et quand je suis sur internet, je passe mon temps à d'autres choses. Il faut faire des choix... Même si c'est dur. En fait, je crois que je n'ai jamais vraiment pensé à étudier la nature. C'est aussi simple que cela. Peut-être qu'à mon retour, si je rentre un jour, je m'y mettrai... Qui sait ? Je suis parfois un peu impulsive, alors ce n'est pas franchement impossible.

Le serveur revient avec un plateau et notre commande. Je le remercie en anglais et Damara s'adresse à lui en grec, probablement. Evkaristo, ou quelque chose comme ça. Merci ? Aucune idée. Et c'est hors de question que je demande. Les langues étrangères m'ont toujours fascinées. Mais généralement, je les apprends sur internet. Sans aucune opportunité de pouvoir les parler vraiment. J'ai commencé un peu le japonais. Dernièrement, j'ai cherché des cours de Mongol, aussi. Mais je n'en ai pas encore trouvé. Et c'est trop tard à présent. C'est dommage, j'aurais bien aimé connaître cette langue. Ca ne m'aurait pas vraiment servi, puisque je ne voyage pas, mais peut-être qu'un jour je serai moins conne et moins lâche, et que ce jour-là, je pourrai faire le tour du monde en tant qu'anthropologue...
Arrête de rêver...
Je commence à boire mon thè, pour ne pas montrer que j'ai faim. Je n'aime pas trop le thé, mais il faut avouer que j'ai soif, alors je ne fais pas ma difficile. Il est bien chaud, un peu fade mais pas trop, pour une fois. Et il sent délicieusement bon. Oui, j'adore l'odeur du thé, seul son goût me déplait. Puis je prends mon pain. Je beurre un morceau puis je le mange. Un peu trop vite à mon goût. Merde, j'ai trop faim, je m'en rends compte, maintenant ! Mais manger trop vite n'arrangera rien. Si je mange trop et trop vite maintenant, j'aurais faim dans deux heures. Il faut que je mange peu, et que je garde le reste pour plus tard. Est-ce que j'ai le droit d'emporter mes restes ?
Bon, je verrai quand nous partirons.
Pour l'instant, j'ai faim donc je mange.

J'ai l'impression que mon attaque de panique est terminée. Ma respiration est à peu près normale, je transpire moins. J'en ai même presque oublié la présence d'étrangers à quelques mètres de moi.
Tant mieux.
A croire que Damara a réussi à me détendre un peu...
Mais je ne me fais pas trop d'illusions, cela ne durera pas longtemps.
Eh oui, pessimiste, avec ça.

Pendant que je suis en train de manger, Damara me demande d'où je viens. Je termine ma bouchée de pain avant de lever le regard vers elle. Cette fois, je dois avoir une voix assurée, sans tremblements.

« De France... »

Sois un peu plus précise, ma vieille !

« Clermont-Ferrand... En Auvergne. »

Bon, je n'ai pas encore le ton d'un leader. Mais il y a du progrès. Pas de tremblements, pas trop d'hésitation. Et ma voix a repris un timbre à peu près normal.
Vous êtes sur la bonne voie, Damara...
J'ignore si elle a entendu parler de l'Auvergne. On dit que c'est le trou de la France, vers chez moi. Complètement paumé au milieu des montagnes... Et pas franchement très peuplé. Il y a pas mal des étudiants qui partent. Mais c'est un coin sympa, encore un peu sauvage. Et puis le peu d'habitants est loin de me rebuter. J'apprécie le calme de la région. J'aimerais vivre là toute ma vie... Pas de bol, je finirai mon existence dans une prison allemande.
Allez, je fais un effort, j'ajoute des détails, bien que ça me coûte : peut-être que je vais l'ennuyer. Mais tant pis. On m'a toujours dit que les futilités pouvaient être le départ d'une conversation.

« C'est au centre de la France... Dans les montagnes. »

J'espère qu'elle ne connaissait pas l'Auvergne, car certains pourraient se vexer que j'ajoute de tels détails. Certains croient qu'on les prend pour des idiots. Ce n'est pas le cas, mais les gens vont parfois un peu vite dans leurs jugements.
Je continue à manger. Avec la faim, le pain prend une saveur que je ne lui connaissais pas. Il faut que j'arrête mon cinéma. Je ne peux pas continuer ainsi, sans parler à personne, sans manger. Demain, je sortirai et je trouverai à manger. Il doit bien y avoir un réfectoire, ou quelque chose comme ça... Demain, je parlerai à mes voisins de cellule. Ils ne doivent pas être si terribles que cela ! Ce sont des humains comme moi, je ne vois pas pourquoi je devrais avoir peur d'eux. Oui, demain je leur parlerai.
Belles résolutions...
Je ne les tiendrai pas. Je me connais par coeur.

Encore une question. Ai-je déjà voyagé ? Oui, j'ai déjà voyagé. Je ne m'en souviens plus vraiment, mais il me reste des bribes de souvenirs.
Quelques images enfouies dans ma mémoire.
Une dune immense, aussi grande qu'une montagne, me semblait-il. Les dromadaires, aussi... Et puis ce silence, cette paix, ce calme... Le Sahara. J'y suis allée, une fois, quand j'étais enfant. Une longue randonnée dans le désert et les montagnes. Les nuits à la belle étoile avec un sac de couchage pour se protéger du froid mordant ; les journées passées dans la chaleur torride du désert... Cette marche, ce paysage sans cesse renouvelé, et des touaregs rencontrés au creux d'une oasis.

« Oui... »

Superbe réponse, Adélie, Bravo ! Je crois que Damara en attendait un peu plus, comme réponse. Logique. Elle s'en fiche sûrement, au fond, de savoir si j'ai déjà voyagé. Cela ne lui apporte pas grand chose. Il est à peu près clair, même pour moi, qu'elle en demande plus. Alors on fait un effort et on répond un peu mieux :

« Une fois, je devais avoir dix ans. Je suis allée au Maroc. »

Voilà. Cette fois, je ne peux pas faire mieux. J'aurais pu raconter mon voyage... Oui, j'aurais pu. Mais non. Je ne peux pas. Je ne sais pas ajouter des détails que l'on ne m'a pas demandés. J'aurais pu éventuellement dire que c'était beau, que c'était bien. Mais ça aussi, c'est trop. Peut-être me le demandera-t-elle.
J'ai aussi envie de lui demander si elle-même a voyagé. Mais je n'y arrive pas, les mots restent coincés. Alors j'espère qu'elle prendra l'initiative de répondre...
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMer 20 Aoû - 17:27

Auvergne, dans le centre de la France. Effectivement, je ne connais absolument pas cet endroit. A vrai dire, le pays en lui-même ne me parlait pas beaucoup. A l’école, j’ai surtout appris à connaître la capitale de celui-ci : Paris. L’histoire de la tour Eiffel par exemple, qui d’ailleurs était très intéressante. J’aurai voulu y aller avec Anthony, mais je n’y ai jamais eu l’occasion. Et puis, de toute évidence, c’est trop tard. Disons, qu’il est parti sans moi depuis cinq ans …

Par la suite, elle m’apprend qu’elle a déjà voyagé au Maroc, il y a déjà dix ans de cela. Pays situé de en dessous de l’Espagne. Pour être franche, je ne suis jamais sortie de la Grèce. Je connais quelques pays de part les livres, mais juste leur histoire. Le Marco m’est par contre assez inconnu. Qui dit Maroc, dit langue Arabe. Coran, Musulman. Voilà les maigres choses que je savais. D’un œil plein d’envie, j’avais envie que Adélie m’en apprenne un peu plus sur son séjour là-bas.


« Racontez moi donc votre voyage ! »

Elan de gaîté envahie ma voix. Dites-moi donc, commence c’était la bas. Comment étaient les gens ? Qu’avez-vous découvert ? Quelles sont les différentes sortes culinaires ? Le temps était-il aussi bon qu’en Grèce ? Avez-vous vu des chameaux ? Avez-vous appris quelque chose d’intéressant sur son histoire ? … Tant de questions qui se bousculent sans jamais trouver réponse sur le champ. Je dois laisser le temps à la demoiselle de me faire part de son histoire.

Mes yeux se rivent sur son pain inexistant sur la table. Elle l’a déjà mangé. Affamée ? Cela ne m’étonne donc pas plus que cela. Je lui avais pourtant bien précisé de ne pas faire abstraction à ce genre de détail. J’attends patiemment qu’elle finisse de me conter son histoire. J’affiche toujours un grand sourire quand j’apprends de nouvelle chose.

Complètement à l’écoute de la moindre information, j’adore écouter. A l’université, c’était pareil. Jamais je n’ai été une seule fois ennuyée par les cours. L’histoire me passionne depuis toujours. C’est quelque chose de naturel dans le fond.

Je baisse mon regard vers mon croissant et mon chocolat chaud. J’attrape ma tasse tout en buvant ce qui restait. J’avais pris le temps de déjeuner un petit quelque chose ce matin, d’où je ne comprenais pas vraiment pourquoi j’avais pris ça. Je lève bêtement les yeux vers Adélie en lui tendant le croissant.


« Vous le voulez ? Je ne le mangerai pas … »

Je lui force légèrement la main et « la force » à le prendre. Qu’elle mange, je sais qu’elle a encore faim. Et puis, ce n’est absolument pas un problème pour moi. Je lui souris avant de jeter un coup d’œil à ma montre : 10.27. Dans une demie heure, il faudra penser à bouger. Passé toute ma journée à la terrasse d’un café ne me parlait franchement pas.

« Quelles ont été vos impressions lors de votre arrivée dans ce pays ? »

En Grèce, les détenus qui arrivaient, étaient assez stressé, d’autres parfaitement calme. Ou encore jouaient les « je m’en foutisme ». Etant juste flic à l’époque. Je ne m’occupais jamais, ou très rarement de les conduire dans leur cellule. Un simple coup d’œil, et quand mon Chef avait le dos tourner, je m’en allais à leur rencontre. Je n’ai d’ailleurs, jamais chercher à savoir ce qu’il avait fait pour atterrir en prison. Pourtant, dans la police, j’étais obligée de savoir pour pouvoir faire mon boulot comme il faut. Ici, j’ai encore l’avantage d’être moins « cernée ». Si je ne veux pas lire un dossier, je ne le fais pas. Enfin, je parle surtout pour l’accueil. Jusqu’ici, je n’avais encore jamais demandé à un détenu ce qu’il avait fait. Je ne m’en soucie pas, c’est tout.
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeJeu 21 Aoû - 6:06

Je mange et j'ai toujours faim. Le pain disparaît peu à peu, bientôt il n'y en aura plus. Tant pis pour la prison, je trouverai une solution. Je continue de manger. Je sais que ce n'est pas bon de ne rien manger pendant longtemps puis de trop manger. Mais je n'arrive pas à faire autrement, j'ai trop faim. Et si j'emporte les restes de pains avec moi sans être assez discrète, Damara va me poser des questions. Alors je mange, jusqu'à être rassasiée, ou bien jusqu'à ce qu'il n'y ait plus une miette de pain.
J'ai déjà terminé mon thé, aussi. Je fais passer son goût fade d'eau chaude avec du pain. J'ai bu trop vite, c'est désagréable. Mais si je ne l'avais pas fait, je n'aurais jamais pu boire ce thé.

La voix de Damara brise une nouvelle fois le silence. Elle veut que je lui raconte mon voyage au Maroc. Mais je n'aime pas la manière dont elle me le fait savoir. J'aurais préféré qu'elle me pose des questions précises, je n'aime pas les grandes questions bien larges. Il peut y avoir des millions de choses à raconter sur un voyage de deux semaines. Et je n'aime pas monopoliser la parole. Alors il faut faire un tri. Que choisir ? Que laisser de côté ? Je ne sais pas. J'hésite. Je cherche. Qu'est-ce qui serait le plus intéressant à ses yeux ? Aucune idée. Merde, je n'aime pas ce genre de questions ! Mais je ne peux pas lui dire ça, elle en serait vexée ! Alors je dois chercher, mais surtout je dois trouver.
De toute façon, j'ai presque tout oublié de ce voyage.
Non, ça c'est ce que je me raconte. C'est faux. J'ai encore une idée très précise du Maroc.
Pourtant, j'ai tout oublié.
Mensonge ! Tu te mens à toi-même pour mentir aux autres avec davantage de conviction.
Je ne mens pas...
Et pourtant, si. Après réflexion, il est vrai que j'ai retenu beaucoup de choses de ce voyage. Du coup, c'est carrément plus compliqué de trouver quoi dire. Il y a tant de choses... Est-ce que je dois rester sur des banalités, des généralités concernant le Maroc, ou bien dois-je dire mes impressions ?
Lance-toi ! Ce n'est pas si dur que ça en a l'air !

J'articule assez difficilement :

« Euh... Vous voulez savoir quoi, exactement ? »

Merde, c'est tout ce que j'ai trouvé ? Mais quelle conne ! Pourquoi est-ce que j'ai dit ça ? Là, il ne manquerait que le coup fatal, c'est à dire qu'elle me dise qu'elle voulait tout savoir. Je ne demande pas grand chose, juste quelques questions simples ! Je pourrais lui raconter mon voyage dans sa totalité, oui, je pourrais... En fait, non. Je peux m'en faire le récit précis et peut-être assez complet dans ma tête, mais les mots ne passeront pas mes lèvres. Tous mes mots gèlent à l'intérieur de la machine, c'est écrit.
Bordel, arrête de te remémorer cette chanson, tu ne fais que t'en servir d'excuse, de prétexte !
Ce n'est pas volontaire, mais il faut arrêter là le massacre.
Même si c'est mille fois plus facile à dire qu'à faire.
Même si c'est rassurant de se sentir faible et protégée.
Même si au fond, tu ne veux pas changer parce que c'est dur de changer.

Le Maroc, c'était...
Nous sommes arrivés en voiture par l'Espagne et le détroit de Gibraltar. Nous avons commencé par les montagnes de l'Atlas. Les gens y parlaient parfois le français, car il y a pas mal de guides. Les autres parlaient le Berbère. L'arabe est la langue officielle, là-bas. Mais les gens des montagnes ne l'ont pas encore adoptée. Les arabes sont des envahisseurs. J'ai appris quelques mots de Berbère, à l'époque. Mais j'ai malheureusement tout oublié...
Les villages semblaient faits de boue. Les maisons étaient des sortes de cubes, les toits étaient des terrasses. Ces terrasses qui me faisaient un peu peur parce que le fils de notre guide était tombé et était mort, un jour. Des pierriers à perte de vue. Mais également des pentes vertes où coulaient des rivières glacées dont nous ne pouvions boire l'eau. Des chèvres grosses comme des chiens. Des enfants ravis de nous voir leur donner des cahiers et des crayons, des parents ravis que ma mère soigne ceux qui étaient un peu blessés. Les mules qui transportaient nos affaires, et puis les tentes, la nuit. Les repas préparés par le cuisinier, que nous mangions à même le sol, sur des lattes bleues. Des crudités et du poisson froid à midi, de la viande le soir. Et puis les longues soirées passées en musique ou bien à discuter en buvant le thé à la menthe, le seul thé que j'ai jamais pu boire avec plaisir. Et le fils du guide, dont j'ai cru tomber amoureuse. Il avait huit ans de plus que moi...
Puis le désert. Nous avons traversé une ou deux grandes villes, nous achèterions des souvenirs au retour. Nous avons dégûsté une ou deux tajines. De la viande, des légumes. Tout cela mijoté pendant des heures, relevé de curry et d'autres épices. Nous avons vu les souks, immenses, hauts en couleurs, aux étals magnifiques mais à l'odeur de viande assez prenante. Ces souks où je ne devais pas lâcher la main de maman pour ne pas me perdre. Les marchands d'olives, ceux qui travaillaient l'argent ou bien le bois, les marchands de tapis, particulièrement doués pour vous vendre quelques tapis chatoyants, les potiers, mais aussi les quelques charmeurs de serpents qui attiraient les touristes. Mais aussi les petites villes où tout semblait sale, où les gens semblaient pauvres. Mais ce n'était peut-être qu'une impression conditionnée par mes origines occidentales.
Et enfin... Le désert. Les grandes étendues sableuses de l'erg, les grands pierriers du reg. Les tamaris isolés dans ce désert de chaleur, et puis quelques oasis. Les dromadaires, avec leur façon tout à fait particulière de se lever (j'ai même eu le droit de monter sur l'un d'eux, un jour ou deux). Les tempêtes de sable, la chaleur, la poussière. Quelques lézards des sables aperçus lors d'une fugace apparition près de nous. L'extraordinaire (et désagréable il faut bien le dire) capacité qu'a le sable à être glacé à l'instant même où il n'est plus au soleil, alors qu'une seconde avant il était brûlant au point que l'on ne pouvait y poser le pied (ne nous y trompons pas, lorsqu'il n'est plus au soleil, il est si froid qu'il est tout aussi difficile d'y marcher pieds nus). Et puis cette impression de calme infini, de bonheur latent et enfoui. Les nuits passées à la belle étoile, dans le froid mais avec un sac de couchage pour se protéger. Les matins à l'aube, le thé à la menthe, les tajines, les crudités à midi. Les soirées à la lueur d'un feu, au son des tam-tam et aux voix de nos accompagnateurs.
Le Maroc, c'était tout ça. Magique, haut en couleurs, plein de musique.
J'en garde un souvenir vraiment bon, malgré les quelques petits détails qui m'ont déplu.

Mais je ne pense pas y retourner un jour. A l'époque, je craignais relativement peu la foule et les gens. Je faisais ce que me disaient papa et maman. Aujourd'hui, tout cela a changé. Aujourd'hui, je ne sais même plus aller chercher mon pain à la boulangerie du coin. Aujourd'hui, j'ai régressé pour me stabiliser au stade de sous-merde et j'essaie désespérément de descendre plus bas encore.
Je pourrais raconter tout cela à Damara. Mais jusqu'à quel point m'écoutera-t-elle sans s'ennuyer ? Je me rappelle que lorsque j'étais petite fille, je racontais souvent mes voyages (en colonie de vacances, ou bien chez mes grands parents) à mes parents dans les moindres détails, n'oubliant rien de mon planning, de mes impressions. Mes parents m'écoutaient, mais il paraît que je me perdais et que l'on ne comprenait rien à mon histoire. Ils ne me le disaient pas, évidemment, et écoutaient patiemment. Mais j'ai su il y a peu ce qu'il en était. Je ne sais pas raconter des histoires. Alors je ne veux pas faire la même chose aujourd'hui et risquer que l'on me raille. Je préfère les questions... plus précises, dirons-nous.

Je suis encore plongée dans mes pensées lorsque je vois le bras de Damara qui me tend un croissant. Je lève les yeux vers son visage et lis sur ses lèvres en même temps que je l'entends qu'elle veut me le donner. Aurait-elle remarqué que j'ai faim ? Je jette un regard sur mon pain. Il n'y en a plus, j'ai tout mangé. Et j'ai encore une petite place dans mon estomac. Suffisante pour un croissant. Elle pousse le croissant vers moi, comme pour m'inciter à le prendre. J'ai envie de le manger. Bon, c'est sucré, ça risque de me donner faim plus tard. Mais j'ai l'impression que cela fait une éternité que je n'ai pas mangé de croissant. Cela date de l'époque où je sortais encore de chez moi, je pense. C'est donc relativement ancien. Mais j'ai peur de refuser. C'est tout moi, ça, je refuse ce dont j'ai envie parce que je ne considère pas le mériter, ou bien parce que ça ne se fait pas. Mais Damara insiste, et j'en ai vraiment envie, de ce croissant. Je hoche la tête sur un regard vaguement reconnaissant, puis je murmure un petit « Merci », qu'elle risque de n'avoir entendu qu'à moitié. J'espère qu'elle comprendra que je la remercie, même si elle ne l'entend pas. Je mange donc le croissant. Il est délicieux. Ca ne m'étonne pas, j'ai toujours aimé les croissants.
Le café commence à se remplir un peu. Les lève-tard sont de la partie, eux aussi. Je commence à me sentir mal à l'aise quand les deux tables les plus proches de la nôtre sont prises. Un type me jette un regard, je baisse les yeux et rougis.
Qu'ils s'en aillent !
Et là, comme une conne, je me mets à me demander pourquoi il m'a regardée, et s'il continue. Mais je n'ose pas le regarder à mon tour. Alors mon petit cerveau se met à réfléchir à cent à l'heure, et un peu trop à mon goût. Mon imagination fourmille généralement quand je ne lui demande rien. Et c'est dans ces moments-là que se déclanchent les crises, la plupart du temps. Les battements de mon coeur s'accélèrent un peu, ma respiration se fait difficile. Je n'en suis pas encore à l'hyperventilation, alors j'espère que Damara ne remarquera rien. Je ne veux pas qu'elle s'inquiète, qu'elle se demande sur quelle fille elle est tombée. Je ne veux pas retourner tout de suite en prison. J'y suis aussi mal qu'ici. Mais ici, il y a le ciel, et il y a Damara qui s'intéresse à moi.

D'ailleurs, la sus-nommée me pose une nouvelle question. Il faut que je me calme. Que je réponde avec cette lucidité qui est en train de me quitter. Bordel, bouge-toi, Adélie !
Mes impressions à mon arrivée en Allemagne ?
Peur. Oui, c'est ça, une peur qui ne m'a pas quittée. Une peur qui est toujours là et qui est sur le point de me faire perdre le peu de contenance qu'il me restait. Au fond, je n'ai rien vu de l'Allemagne. Quand mon avion a atterri, j'étais si stressée que j'ai réussi à m'adresser aux premiers venus, en l'occurrence, des policiers. Peur de l'inconnue, peur de ce nouveau travail qui n'annonçait pas que des parties de rigolade, puis peur de la prison. Eh oui, c'est con d'être employée comme gardien pour finalement finir derrière des barreaux. C'est con, mais c'est normal, c'est parce que je suis conne. La peur a pris un visage différent lorsqu'on m'a tendu la feuille qui scellerait mon avenir, mais c'était toujours de la peur. Elle a gardé le même nom.
Je crois bien que c'est la seule impression qui m'a marquée. Je n'ai pas fait attention au lieu où je me trouvais, car la peur occultait tout le reste.
Ma respiration est de plus en plus douloureuse mais j'essaie tant bien que mal de le cacher. Et je transpire, aussi. Mais ça, ça ne doit pas se voir. Je pense...
Dépêche-toi de répondre, qu'elle passe à autre chose !

« J'avais un peu peur, je crois... »

Tiens, des tremblements dans ma voix. Ca faisait longtemps, ça commençait presque à me manquer.
L'ironie est quelque chose d'assez désagréable, surtout lorsque cela vient de soi.
Mais j'aime bien souffrir, apparemment.
Que d'impressions, en tout cas. Vraiment très précis. Remarque, ça a le mérite d'être sincère... Encore que... Le mot peur englobe pas mal de choses très différentes.
Non, vraiment, j'aurais pu faire un effort.
Mais c'est au-dessus de mes forces, en particulier lorsqu'une attaque de panique est sur le point de se montrer.
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Damara Galanis
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeVen 22 Aoû - 11:24

La peur est un loup solitaire qui se promène sans arrête à chaque coin des rues de notre cœur. Elle est significative. Une émotion désagréable, un sursaut d’angoisse. Elle nous guette sans arrêt à chaque tournement de situation. A chaque pas, elle nous menace. La peur est l’un des pires sentiments capable de faire battre le cœur d’une personne à une vitesse démesurée. Elle est beaucoup plus présente sur le visage d’un enfant. C’est du moins ce que ma prouvée la vie. Avaient-elles peur quand elles se sont senties mourir ? Cette question persiste toujours dans ma tête. Sans trouver réponse bien évidemment. Tout le monde a déjà eu peur au moins une fois dans sa vie. Comment oublier …

Ce fameux jour, où l’enfant n’a rien dit. J’ai pourtant senti sa peur à l’intérieur de moi, mais je n’ai rien su faire. J’ai laissé s’évacuer une peine soudaine, mais pas encore tout à fait finie. Encore aujourd’hui. Certes que la peur avait pris l’avantage sur moi, accompagné d’une tristesse profonde. Quand elle est partie, je suis resté avec une douleur insurmontable sur le cœur. J’avais l’âge de la jeune Adélie. Encore une enfant dans le fond. J’ai perdu mon innocence d’enfant, quand j’en ai moi-même porté un. Perdu, c’était fini. A partir de ce moment là, je n’ai plus jamais été la même. Sous mes sourires se cache une cicatrice qui ne guérira jamais. J’en suis bien consciente.

Quand je suis rentrée de l’hôpital, vide de toute vie. Je me suis enfermée dans ma chambre, j’étais sans ressource. Assise sur le rebord de la fenêtre, j’observais la mer au loin. Accompagnée de cette boite à musique. Le son était très doux et calme. Le genre de glas qui vous emporte tout de suite loin de tout. Le tintement aigue mais pourtant si léger, mélanger à une vague de joie et de tristesse. Je l’avais déjà entendu avant d’être née. Sebasten me racontait que lorsque j’étais encore dans le ventre de ma mère, elle ouvrait toujours cette boite pour me faire écouter la mélodie. Je m’endormais comme ça. Au loin, les vagues dansaient lentement contre la berge. Le chant des oiseaux rajoutait un peu d’amertume à mon état psychologique. Les semaines qui suivirent, j’allais de mieux en mieux. Enfin, du moins, j’essayais. Et bien entendu, la peur était revenue me frotter la peau … Cette fois là, j’étais vraiment au bout du gouffre. Sur quelques mois, tristesse et peur étaient ancrées dans ma vie.

Le tout pour le tout, j’ai fermer les yeux, et j’ai avancer dans une autre direction. Qui m’a amené là où je suis maintenant : gardienne. La mutation m’était fortement angoissante. Surtout pour quelqu’un comme moi, qui n’a jamais quitté son pays. Partir pour l’Allemagne fut une sorte de liberté. Je ne regrette pas ce que je suis à présent. Bien que le passé m’avait réservé un autre futur plus promettant. C’est les risques de la vie. C’est comme avec mon père. Il aurait pu m’abandonner. Mais non, il a poursuivit mon éducation et son métier à la fois. Etre historien demande beaucoup de déplacement. Jamais il ne m’a laissé seul aux mains d’inconnus. Il avait peur sans aucun doute.

Je comprends que Mademoiselle Adélie eut peur en arrivant ici. Le pays est réputé pour être froid. Alors que non dans le fond. Ce ne sont que des stéréotypes de mauvais goût. Le jugement c’est évidemment fait trop vite et sans appel. La peur était aussi dans mon ventre quand je suis arrivée ici. D’abord, je pensais être perdue. Puis finalement, la muraille de la prison s’est présentée à moi comme un objet d’histoire. Très sombre, mais vivant.

Mon regard joue sur la personne d’Adélie. Les tables commencent à se remplir de plus en plus. Attisant en elle, une certaine gêne. Enfin, c’est ce que je peux du moins remarqué. Et par déduction, nous devrions peut-être changer d’endroit. Ce n’est pas ça qui manque ici de toute façon. Je fixe une nouvelle fois ma montre : 10.48.


« Si ça vous tente d’allez visiter un peu le village … »

Je l’invite à se redresser. Déposant le compte exact de notre déjeuner sur la table. J’adresse un sourire au jeune homme de tout à l’heure en lui lançant un : « adío ». Mon attention se reporte bien rapidement sur Adélie. Pour en revenir à son fameux voyage du Maroc. Je devais mieux cibler mes questions. Restons basique sur celles-ci :

« Et bien pour en revenir à votre voyage. Dans quel coin êtes-vous partie ? … Qu’y avez-vous appris ? Une anecdote à raconter peut-être … »

Je reste dans le vif du sujet, tout en ne la bombardant pas de questions trop difficile ou indiscret. Nous marchons entre les rues croisant par moment un pur allemand. L’hospitalité n’est pas donné dans tous les pays …
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeSam 23 Aoû - 11:23

Telle une cacophonie, la peur s'installe, chassant tout le reste. Et ça fait mal. Ils me regardent, ils me jugent. Ils ne font rien de tout ça. Mais ils le font. Je le sens, je le sais, tout en sachant le contraire. Je me perds dans des pensées contradictoires tandis que la peur monte, enfle. Respiration et rythme cardiaque s'accélèrent. La température monte. L'énergie fuit. Et je transpire, merde ! Impression de s'évanouir, impression de quitter son corps. Tout tourne. Ils me regardent, ils me jugent. Ma respiration se fait douloureuse. Je vais mourir ! Boum, boum, boum, mon coeur s'emballe. Fuir ! Je veux fuir ! Mais mes jambes ne m'obéissent plus. Je crois que mes yeux s'écarquillent. Je pense. Je ne sais pas, je ne sais plus. Je jette des regards un peu perdus dans tous les sens. Laissez-moi ! Cessez de me regarder ! Mais ils ne me regardent pas... Ils me sont indifférents... Je veux exister ! Tout se mélange, tout s'embrouille dans mon esprit de paumée. Cacophonie... C'est bien le mot. Je vais mourir, je veux mourir ! Laissez-moi vivre, bordel ! Impossible de me calmer, la peur grandit encore et encore. Boum, boum, boum. Mon coeur va éclater s'il connaît. Je ne suis plus moi, je ne suis plus dans le monde des humains, je vois la scène d'ailleurs et putain, c'est pitoyable ! Si j'étais un autre, j'aimerais pas me rencontrer.
Damara.
Damara.
Damara.
Bordel, t'es en train de discuter, là, calme-toi !
Damara est là, les autres t'en as rien à faire, oublie-les !

Damara.
Damara.
Damara.
Allez, encore un ou deux et t'arriveras peut-être à te calmer ! Focalise-toi sur elle, sur sa présence. Il n'y a qu'elle et toi.
Merde, elle va me trouver ridicule, elle va me juger !
Et voilà. C'est con, mais les arguments censés me calmer font tout le contraire.
Je regarde la table, je ferme les yeux. Calme-toi... Calme-toi ! Tu es seule, seule, complètement seule ! Les autres tu t'en fous, t'en as rien à battre ! Il n'y a que toi, alors calme-toi.

En quelques minutes, j'arrive à revenir à peu près à la normale, c'est à dire un léger stress chronique. J'ouvre les yeux. Je ne suis pas seule. Merde. Mais j'arrive à être un peu calme. Il suffit de ne pas me raconter d'idioties du genre 'ils te regardent'. Ne pas obéir à sa peur, ne pas l'écouter. J'ai lu ça dans un livre, un jour. Si tu obéis à ta peur, c'est normal qu'elle reste. Logique imparable. Mais bon, encore une fois, c'est plus facile à dire qu'à faire. C'est sûr que c'est dur, surtout quand on n'essaie même pas. Oui mais bon, c'est facile, peut-être, mais on ne change pas dix ans de vie en un claquement de doigts. Ce serait trop beau. Et trop effrayant, aussi. Les deux. Parfois, j'arrive à rester relativement calme dans une situation comme celle-ci. C'est déjà arrivé. Alors pourquoi pas aujourd'hui ?? Parce que c'est comme ça ?
...
Je sens que ça va bientôt repartir. Mon rythme cardiaque augmente peu à peu.
Chut !
Eh oui mais tu vois, j'ai pas assez d'autorité, et ça marche pas.
Heureusement, je ne suis pas seule. Enfin... heureusement et malheureusement, quoi. Parce que si j'étais réellement seule, je ne serais pas ici, au milieu de tous ces gens. Et je n'aurais pas eu de crise de panique. Je serais tranquillement en train de me prendre la tête sur des conneries, sans doute, ou bien en train de dormir histoire de faire croire que... bah que je ne suis qu'à moitié là. Ou alors en train de penser au passé (oui parce que j'aime bien faire ça, aussi, penser au passé histoire de ne pas avancer...) d'un air nostalgique... Quelque chose comme ça, quoi. Rien de bien exaltant, certes. Mais au moins, je n'en serais pas à me maudire de me rendre ridicule, je ne serais pas sur le point de suffoquer et je serais relativement calme. Mais passons. J'ai bien dit 'heureusement'. Parce que Damara n'entre pas dans mon jeu. Elle me parle. Ce qui a le mérite de me forcer à sortir de mes délires débiles. Une invitation à me lever, à partir... Drôle d'invitation, je n'ai pas vraiment le choix puisqu'elle se lève et paye. Certes.
Merci !! Oui, allons nous-en ! Je me doute qu'il y aura des gens un peu partout, mais peu importe. Changer d'air, c'est important quand ça ne va pas. Je crois. Au moins, je ne verrai pas ces mêmes têtes, tous ces gens qui ont du voir ma crise et me juger. Et marcher ne pourra me faire que du bien. Même si le début s'annonce un peu difficile (j'ai présentément les jambes en coton), ça devrait aller mieux petit à petit. Normalement. Je pense. Surtout si Damara parvient à me changer les idées.
Je me lève avec une certaine difficulté, en essayant de ne pas le montrer. La jeune femme adresse un mot au serveur, Adio ou quelque chose comme ça. Un mot à retenir... Au revoir, sûrement, et puis il y a des chances pour que ce soit du grec. En essayant de retenir des mots au hasard en écoutant les gens parler dans une langue étrangère, il doit bien y avoir moyen de retenir cette langue, à force. Au moins un peu. Et j'aimerais bien connaître toutes les langues du monde. Oui, je sais, j'ai trop d'imagination. Mais l'espoir fait vivre, dit-on. Ou pas... Mais on s'en fout, de ça. Je retiens le mot et puis c'est tout. Avec un peu de chance j'arriverai à le retenir. Je finirai sans doute par l'oublier, mais on ne sait jamais. Imitant mon aînée, je lance un petit « Thank you, good bye. » avec mon accent minable. Le serveur n'aura sans doute pas entendu. J'ai plus marmoné que parlé. Mais je suis en pleine crise de panique alors je ne fais pas attention. Et j'espère que lui non plus.

En enfin, je suis Damara. Ca m'étonne qu'elle n'ait pas répondu à ma question concernant le Maroc. Peut-être que je l'ai vexée en ne lui répondant pas immédiatement ? Merde, j'aime pas vexer les gens. Et j'aime pas non plus ne pas savoir si je les ai vexés. Je culpabilise, après. C'est plus fort que moi. Et rien de mieux que ce genre de choses pour relancer une crise de panique sur le point de s'éteindre. Mais heureusement, ça ne dure pas. Eh oui, Peur, tu resteras enfouie pour cette fois... Mais bon, pas d'inquiétude, elle reviendra sans doute dans le courant de la journée. Elle revient toujours. Sauf quand je suis seule. Et encore.
Damara me reparle de mon voyage au Maroc. Voilà qui me rassure. Ainsi, je ne l'ai pas vexée. Je pense... J'espère. Mais déjà, elle m'en reparle, c'est bon signe. Ses questions sont plus précises. Ce n'est pas encore ce que je peux rêver de mieux, mais il y a du progrès. Où suis-je partie ? Précisément, je ne saurais pas le dire. Je suis allée dans le Haut Atlas, je crois que c'est au Nord. Sans certitude. Puis j'ai voyagé dans le désert. Au Sud, je crois... non ? Pas de certitude, là non plus. Au passage, j'ai visité Ceuta, qui appartient à l'Espagne si je ne m'abuse, et puis quelques villes comme Marrakech, Rabat, Fes. Agadir et Meknes aussi... Je crois. Je ne me souviens pas du reste. Et je ne sais même pas où se trouvent ces villes. L'essentiel du voyage était dédié à la randonnée. Qu'ai-je appris ? Franchement, pas grand chose. J'étais gamine, je ne cherchais pas trop à apprendre des choses. Mais j'ai bien du retenir quelques petites choses, non ? Quelques mots... Que j'ai oubliés, depuis, pour la plupart. Même peut-être dans leur totalité. Je me souviens vaguement du mot 'Sala' (ou quelque chose d'approchant) qui pourrait vouloir dire 'Merci', mais je ne suis même pas sûre qu'il s'agisse bien de berbère... Sinon, le fait que les Berbères vivent dans les montagnes, se souciant peu des arabes. Dans le désert, c'est les touaregs, parfois appelés Hommes Bleus. Je crois que c'est à peu près tout ce que j'ai retenu... Une anecdote ? Hum... Je pourrais lui parler de la fois où nous nous sommes retrouvés dans des gorges étroites pendant un orage, ou bien les petites chèvres que j'ai voulu ramener à la maison, ou encore de ce guide qui nous amusait tous les soirs en parlant dans un tamtam ou en faisant parler la tête d'une poule décapitée (et dont le corps allait nous servir de repas).
Allez, une inspiration, un effort. Tu as des choses à raconter sur ce voyage. Ca lui fera plaisir.
C'est pas bien dur, tu l'as déjà fait (parler). Souviens-toi. On ouvre la bouche, on fait vibrer les cordes vocales et ça y est.
Tu sais parler, alors un effort.
J'ouvre la bouche. C'est un début. Mais je la referme. Je ne sais pas par où commencer. Je fixe mes chaussures. C'est difficile quand on n'a pas encore tout à fait oublié qu'il y a plein de monde derrière soi.
Une inspiration, je me lance :

« Eh bien... Je suis allée à plusieurs endroits, un peu dans les montagnes, un peu dans le désert et... Et dans quelques villes, aussi. Les villes les plus touristiques, je pense. Enfin je crois. Peut-être... Et euh... Je n'ai pas appris beaucoup de choses, j'étais petite et je ne pensais pas trop à ça... Quelques mots de berbères et d'arabe... Mais je les ai oubliés. Et puis quelques vagues détails sur l'histoire du pays. Les arabes qui sont arrivés vers la fin du moyen âge... Les berbères qui sont restés dans les montagnes. C'est à peu près tout. »

Bon, c'est pas bien fluide, tout ça. Ca manque d'entrain, ça manque de... Je sais pas quoi, mais il manque quelque chose. Mais je crois qu'il faudra faire avec. Allez, une anecdote... Qu'est-ce que je lui raconte ? La pire peur de ma vie ? Ou bien quelque chose de plus... distrayant ? Peut-être que si je commence à raconter, j'arriverai à me détendre un peu et à raconter autre chose... Qui sait ?
Allez, va pour la peur de ma vie. Même si c'est pas très joyeux. Je crois que ça ne m'a pas traumatisée et que je m'en suis remise. Oui mais d'un autre côté... J'ai pas mal pleuré, ce jour-là. J'ai pas envie qu'elle ait pitié de moi, ça doit déjà être le cas. Je devrais peut-être lui raconter les chèvres ? Je ne sais pas...
Allez, vite, avant que le silence ne tombe et que tu ne saches plus t'en sortir !
Les chèvres...

« Un jour, nous étions dans les montagnes, et on s'était arrêtés pour manger. On s'est retrouvés au milieu d'un troupeau de chèvres minuscules. On a joué avec un moment, et puis l'heure de partir est arrivée. J'ai voulu faire une farce à mes parents et leur faire croire que j'allais en ramener une chez nous. Je l'ai donc prise dans mes bras et fait mine de la mettre dans le sac de mes parents... »

Je fais une pause.

« Malheureusement, elle n'a pas trop apprécié... Elle a eu peur et uriné dans leur linge... »

Je souris. C'était drôle, ce jour-là. J'ai pu retirer la chèvre à temps, avant que ce ne soit vraiment trempé. Mes parents ont été quittes pour laver un ou deux vêtements.
Je ne sais pas pourquoi, mais le fait d'avoir raconté ça m'a redonné un peu confiance. Je suis un peu plus... Détendue. Mais je n'ajouterai rien sur mon voyage. Je préfère qu'elle me pose des questions si elle le veut. Je ne veux pas l'ennuyer. Ce serait dommage...
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Damara Galanis
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMar 26 Aoû - 17:01

Une histoire, c’est toute une vie. Orale ou écrite, elle est toujours aussi instance. Raconter au travers des récits, les monuments sont les seules véritables traces d’un pays. Son passé. Un cortège de bonheur pour les habitants fiers de leur terre. Mademoiselle Adélie me fait part d’un instant de sa vie. Ce qui, me rend bien gaie sans attendre. Une chèvre ? Nous en avons beaucoup en liberté en Grèce, dans quelques régions fixes. Quand l’une d’elle ne monte pas sur un arbre, elle est sur un rocher. Enfin, petite, j’en avais un peu peur. Surtout quand ses animaux se mettent sur deux pattes, balançant leurs sabots sur vos jambes. A ce moment là, Sebasten me prenait dans ses bras. Et s’abaissait à la hauteur de la chèvre pour que je puisse caresser le dessus de sa tête. J’ai toujours trouvé les deux cornes de celles-ci très drôles.

Dans la mythologie grecque. Amalthée est une chèvre qui allaite Zeus enfant, aidée par des abeilles se chargeant de nourrir le dieu de miel. Selon Zénobe, Zeus l'honore ensuite en la plaçant comme constellation dans le ciel (voir constellation du Capricorne), ou encore comme simple étoile (Capella, « la chèvre », c'est-à-dire α du Cocher). Selon d'autres traditions, à la mort de la chèvre, Zeus aurait pris sa peau pour en revêtir son égide : le terme grec αἰγίς / aigís signifie en effet également « peau de chèvre ».La chèvre est ensuite rationalisée en nymphe. Ainsi, chez Ovide, c'est une naïade, à qui Zeus est confié encore enfant par Rhéa, sa mère, pour échapper à la jalousie de Cronos. Elle prend soin du jeune dieu en le nourrissant grâce au lait d'une chèvre ; mais celle-ci cassant un jour une de ses deux cornes, « Amalthée ramassa cette corne brisée, l'entoura d'herbes fraîches, la remplit de fruits, et la présenta ainsi aux lèvres de Zeus ». C'est ainsi que serait née la corne d'abondance. Enfin, voilà pour ma petite note de mythologie intérieure. Pour en revenir à l’histoire propre. Ce pays a eu aussi son cota d’injures.

J’ai d’ailleurs, au travers d’un livre, appris que : « La formation du mot Deutschland révèle la longue histoire de ce pays. Au départ il y a un mot gotique thiuda signifiant peuple. Il a comme adjectif thiudisk. Thiudisk a été transformé en Theodischus par les Romains, puis en Teudischus. Teudischus est devenu diutisca en vieil allemand pour aboutir à Deutsch. En ancien français, le latin theodiscus a donné thodesche, puis tudesque. Le français moderne a préféré le mot allemand issu du latin Alama désignant le peuple des Alamans. L'italien a conservé l'origine latine dans son adjectif tedesco pour dire allemand. »

D’Allemagne,
l'histoire passée est une injure.
D’Allemagne,
l'avenir est une aventure.
D’Allemagne,
je connais les sens interdits
je sais où dorment les fusils,
je sais où s'arrête l'indulgence.


Mes yeux frôlent de loin, les maisons, les magasins, l’herbe, les arbres. Tout. Tout me fascine. Je ne peux m’empêcher de regarder un chat passer à côté de nous. Longeant le mur, le félin est d’un blanc terne. Miaulant en venant se frotter contre les jambes d’Adélie. J’espère au moins qu’elle les aime les animaux et qu’elle n’en n’a pas peur … Le crie de quelques oiseaux que je qualifie de « mouettes » s’élèvent dans le vent. Nous ne sommes pas très loin de la plage. Je tourne mon regard vers Adélie en lui souriant tendrement. Ma prochaine destination n’est d’autre que la plage. Mais ça, je pense que la demoiselle l’a remarquer. Nous sommes enfin sur la berge. Une étendue de sable se dessine devant nous, offrant vue sur la mer.


« Avant de partir de chez moi, je suis venue observer la mer … De Grèce bien entendue. L’eau et le sable sont nettement plus différents. Un bleu olympe et un blanc parfait … Tu viens ? »

Je me déchausse, attendant qu’Adélie ait le réflexe de faire le même geste, et d’un coup. Je viens saisir sa main pour descendre les escaliers de pierres. Pour enfin sentir le sable chaud sous nos pieds. Devant nous, la mer est relativement calme, avec ses quelques oiseaux volant. Tenant toujours la main de la jeune demoiselle. J'ai enfin abandonner le vouvoiement pour passer au tutoiement. Il parait que parfois, cela met quelqu’un encore plus en confiance. Moi, je le fais pour la bonne raison qu’il me semble qu’elle n’a plus besoin d’entendre la parler « gardienne » mais la vraie femme que je suis. Elle sera certes, étonnée par mon changement soudain, mais qu'importe. Nous sommes ici pour passer une journée tranquille.
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeJeu 28 Aoû - 4:16

Damara ne répond pas. Normal, il n'y a rien à répondre. J'aurais fait de même je pense. Ou alors j'aurais répondu un truc totalement inutile du genre "Ah...", ou quelque chose d'assez proche. Juste histoire de dire quelque chose. Parce que le silence quand je ne suis pas seule, ce n'est pas ce que j'affectionne le plus. Vous l'aurez compris. Apparemment, Damara n'a pas cette gène. C'est mieux pour elle. Mais j'aurais quand même préféré qu'elle dise quelque chose... C'est comme ça, je n'aime pas ne pas savoir ce qu'on pense de ce que je dis. Même si ça arrive tout le temps. Et même si après coup, j'aurais parfois préféré ne pas savoir. Enfin bref. Au moins, elle ne semble pas déçue. Donc à part si elle cache bien son jeu, je n'ai pas du trop l'ennuyer. Après, je peux me tromper. J'espère que ce n'est pas le cas. Ca l'est peut-être, si ça se trouve...
Merde, arrête de réfléchir comme ça, ça mène à rien !
Hum... C'est pas faux. A croire que je suis devenue accro aux attaques de panique...
J'aimerais bien être comme Siriel, parfois. Ca doit être agréable... Enfin cela dit, si ça se trouve je me trompe complètement sur lui. Mais il avait l'air calme, serein... Comme s'il ne pensait pas, ou bien juste ce qu'il faut. Suffisamment peu pour ne pas se prendre la tête pour un rien, quoi. Ca doit surtout être reposant, en fait. Un jour, il faudra que j'essaie d'être comme lui. Mais je me demande si c'est possible. Il faudrait d'abord que je me soigne, pour ça. Oui, ça pourrait être un bon début. Dommage que je ne sois pas assez... tenace. Trop molle, on me l'a dit parfois. Pas assez sûre de moi. Pas assez décidée, aussi. En bref, trop nulle. Oui, voilà, c'est l'adjectif idéal. Nulle. Il me va à ravir.
Stop.
Ca suffit, je recommence à penser trop. Il faut sérieusement que j'arrête avant que ça ne dégénère. En plus, si ça se trouve j'ai rien compris à Siriel. Si ça se trouve, il souffre. Je n'en sais rien, je n'ai rien d'une psychologue. Comment est-ce que je peux envier sa condition sans la connaître ?
...
Finalement, peut-être que l'idéal serait de boire ou de me droguer... Il paraît que tout paraît plus simple, quand on est imbibé ou défoncé. Mais bon, c'est pas trop mon truc, tout ça... Mais j'essaierai sans doute, un jour ou l'autre, si je trouve de l'alcool – ce qui semble assez improbable en prison, mais on peut rêver –. Si ça se trouve, c'est réellement agréable. Ce qui expliquerait les nombreuses soirées alcoolisées auxquelles participaient les autres étudiants, à la fac. Oui, ça l'expliquerait... Pas de doute, ça doit être agréable. Je ne pense pas que tous les étudiants de ma promo aient été masoschistes. Alors ça doit être agréable de tituber, de ne rien comprendre, de n'être pas capable de réfléchir et de n'avoir aucun souvenir de tout cela le lendemain. Décidément, il faudra que j'essaie. Si je trouve de l'alcool... Un jour. Peut-être. Peut-être qu'on se sent libre quand il n'y a plus aucune réflexion possible. Quand tous ces poids disparaissent, on doit se sentir léger...
Mais tomber de haut.
Oui, c'est vrai qu'il y a ça, aussi... Peut-être que c'est comme ça que l'on devient alcoolique... Mais je ne veux pas être alcoolique, moi !
Bref.
C'est totalement idiot. Je pense à des choses idiotes et je suis moi-même une idiote.
Ouais, c'est tout à fait ça. Une idiote.
Rien de plus.

Nous traversons le village, je ne dis mot. Ce doit être un endroit agréable. C'est petit, relativement calme. Le genre de village où ne passent que quelques randonneurs en été. Il y a quelques passants. Je m'efforce de ne pas faire attention à eux. Je fixe mes pieds. C'est plus simple, ça évite d'avoir à prendre des initiatives. Je suis, j'obéis. Je suis un bon chien-chien. Je sais rien faire d'autre de toute façon. Si quelqu'un veut me marcher sur les pieds, je le laisse généralement faire. Je l'aide même parfois. Damara n'essaie pas de me marcher sur les pieds. Mais je la suis quand même sans un mot. Comme si c'était le cas.
Un chat blanc vient se frotter contre moi. Il est tout petit. Je m'arrête de marcher. Je pense que Damara l'aura vu. Je me baisse. En général, je caresse pas trop les chats dans les villages. Parce qu'il paraît qu'ils ont parfois des puces. Mais celui-là a l'air propre et il ne se gratte pas. Je caresse le petit chat. Il semble minuscule. Je pense qu'il n'est pas bien vieux. Son miaulement est aigu, presque inaudible. Je lui gratte la tête, le caresse. Il est si mignon ! Le chat tourne et retourne en se frottant toujours à moi. C'est bien un chat. Peut-être veut-il à manger ? Je souris. Momentanément oubliée, la peur des autres. Avec les animaux, ce n'est pas pareil. Je n'ai pas peur. Ou pas de la même manière... Certains animaux me font un peu peur... Mais ce n'est pas pareil. Je me relève, me remets à marcher vers Damara. Je me retourne de temps à autre pour regarder le chat. Il s'est assis et me regarde, semblant se demander pourquoi je m'en vais sans lui avoir rien donné. Il miaule, je souris. Puis je lui fais signe de nous suivre, ce qu'il fait sans attendre, mais en restant à une bonne distance. Il ne veut pas se faire piétiner à mon avis. Je n'ai rien à lui donner, sinon un peu de tendresse.
Nous arrivons à la fin du village. De là, je peux entendre un bruit régulier que j'identifie immédiatement : le bruit des vagues. La mer approche. La mer, ce n'est pas ce que je préfère. Le sable, le sel, le peuple, tout ça, très peu pour moi. Mais là, il fait moins chaud que dans la méditerranée, où je suis déjà allée une ou deux fois avec mes parents. Ici, il n'y a personne. Et on ne va pas se baigner. Pas de sel, donc. Et je ne pense pas m'allonger dans le sable. Tout est parfait. Je lève un instant mon regard de mes pieds – pourtant si fascinants ! – et regarde Damara. Elle me regarde aussi, elle sourit. Je lui rends son sourire, mais le mien est peut-être un peu plus timide... Sûrement, même.
Nous voilà tout près de la plage ; je la vois qui s'étend devant moi, qui descend en douceur vers la mer. Damara me raconte sa mer à elle. Chez moi, ce sont plutôt des petits lacs et des rivières. Ce n'est pas vraiment pareil. Pas du tout, même. L'eau y est sans doute un peu plus pure que dans la mer. Elle y est aussi plus froide. Les touristes n'y sont pas les mêmes je pense. Mais en contrepartie, il n'y a pas ces vagues régulières et sans cesse renouvelées, cette impression d'infinité, de profondeur, de liberté. Et les mouettes qui volent au-dessus de nous, parfaitement libres, parfaitement.... Je ne sais pas. C'est beau et je me sens bien. C'est tout.
Je crois qu'on ne peut pas comparer objectivement la mer et mes lacs. C'est différent, voilà tout.

Damara m'invite à la suivre. Tiens, étrange, elle m'a subitement tutoyée. Cela ne me dérange pas. Mettre moins de distance entre deux personnes, c'est parfois une bonne chose. Ca permet sans doute de se sentir plus à son aise. Et c'est différent des autres gardiens qui m'ont tutoyée depuis mon arrivée. Chez eux, ça sonnait comme du mépris, une absence totale de respect. Chez Damara, c'est différent... Je me sens respectée, elle agit envers moi comme si j'étais son égale. Elle me l'a dit : aujourd'hui, pas de gardienne, pas de prisonnière. Bon, cela ne s'est pas encore tout à fait effacé dans mon esprit, mais nous sommes en bonne voie. Enfin, quoi qu'il en soit, je ne crois pas être déjà en mesure d'abandonner le vouvoiement, quant à moi. Elle a beau n'avoir que cinq ans de plus que moi... Il y a quelque chose qui m'empêche de lui dire 'tu'. Peut-être parce qu'elle m'est supérieure socialement parlant ? Après tout, elle reste gardienne de prison, tandis que je ne suis qu'une prisonnière.
Mais bon.
Elle le verra bien assez tôt, je pense.
J'espère.
Et elle fera ce qu'elle peut pour m'arracher un tutoiement...
Je lui fais confiance pour ça.
Elle y arrivera.

« Oui... J'arrive. »

Je souris.
Une voix fluide. C'est rare. Pour ne pas dire précieux.
Continue comme ça, Adélie.
J'imite Damara et enlève mes chaussures. En général, quand je vais à la mer, je les garde. Mais c'est un réflexe pour moi de faire la même chose qu'elle. Elle a sans doute une bonne raison pour faire ça. Sûrement. Et puis il faut reconnaître qu'avoir les pieds nus est nettement plus agréable. Quand j'allais encore à la fac, il y avait quelques personnes qui venaient toujours les pieds nus. Ca n'avait pas l'air de les gêner, au contraire. Eté comme hiver, inlassablement. Sans crainte de la froideur ou de la brûlure des routes, sans craintes des aiguilles de connifères, sans crainte des débris de verre qui jonchaient parfois la route. Je les admirais un peu d'avoir autant de cran.
Je regarde en arrière. Le chat est resté un peu plus loin. Il n'apprécie sans doute pas la mer et le sable. Dommage. Mais je le reverrai peut-être au retour. Je lui fais un petit signe de la main. Reste là, petit chat. Je reviendrai...
Bon, je n'aurai certes toujours rien à lui donner, mais j'aime bien les chats alors je pourrai au moins le caresser.
J'ai à peine le temps d'enlever mes chaussures et mes chaussettes – et de les prendre à la main – que mon autre main est saisie par celle de Damara, qui m'entraîne dans les escaliers de pierre. Ca fait un peu mal aux pieds à cause des quelques grains de sable qui y sont déposés, et je n'ai pas l'habitude. Mais cela ne dure pas et nous arrivons bien vite sur le sable. Il est relativement chaud, plus que l'air, même. C'est agréable, je ne m'attendais pas à cela. Damara me tient toujours la main. La mer, devant nous, s'étend à perte de vue. Quelques vagues viennent s'écraser de temps à autre à quelques mètres de nous. Un petit vent frais balaie la plage et me caresse le visage. Tout est calme. C'est beau. C'est magique.
J'aimerais rester là pendant des heures.
Mais... Eh oui, il y a un 'mais'. Il y a toujours un 'mais'.
Le silence.
Il est beau, meublé de vagues de vent.
Mais j'ai toujours l'impression de devoir dire quelque chose. Parce que les gens discutent, lorsqu'ils sont entre eux. Malheureusement, je ne sais pas quoi dire. Alors je me tais, espérant que Damara le brisera, malgré sa beauté.
Le silence me fait peur. Comme la parole, en fait.
Le tout et son contraire.
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeSam 30 Aoû - 22:02

Tenant fermement mais avec douceur la main de ma jeune protégée. Je me rappelle les temps où je venais assez souvent au bord de notre mer Egée. Pourquoi j’aimais tout particulièrement y aller ? La raison est assez simple. Je regarde Adélie. Elle me rappelle étrangement Danaé, peut-être est-ce dû à son petit côté fragile. Je ne sais pas. Je le n’ai pas vu grandir certes, mais j’ai en mémoire son image. Petite fille méditerranéenne, les cheveux sombres avec deux pupilles d’un bleu très clair. Un visage d’ange, Un peu comme la jeune demoiselle à mes côtés. Sans lâcher sa main, je me rapproche un peu de l’eau. Assez près pour la contempler et assez loin pour ne pas risquer d’être surprise par une vague. Tout en m’asseyant, j’entraîne avec moi, Adélie sur le sol. Au dessus de nos têtes, dansent les mouettes d’une blancheur presque irréprochable si ce n’est que quelque espace sombre venant contraster la couleur au soleil. De son côté, la mer nous livre ses mélodies océaniques. Ma main lâche enfin la sienne, je lui accorde encore l’un de mes nombreux sourires. Et sur un ton curieux, je viens lui demander ;

« Tu venais souvent à la mer ? »

Difficile pour moi de nier. En effet, je venais le plus souvent possible, surtout avec lui. D’ailleurs, je me souviens la première fois qu’on y avait été. Je souris en repensant à ce souvenir égaré mais pourtant si présent. Comme s’il ne datait que d’hier. Pour me remémorer parfaitement ce premier jour …

***


C’était un samedi matin. J’étais un peu nerveuse, parce que c’était la première fois que j’allais passer la nuit loin de chez moi avec des amis. Enfin, si j’étais agitée qu’une jeune jument, c’était surtout parce qu’il était là. Anthony. Je courais dans tous les sens, mon père se moquait d’ailleurs de moi. «
Calme-toi un peu Damara ». Sur l’espace d’une heure, il me l’avait bien répété une dizaine de fois. Mais cela n’avait rien changé à ses éclats de rire en me voyant courir de gauche à droit pour être sûre de ne rien n’avoir oublié. Au bout d’une demi heure, soit 11h24, j’étais enfin prête et toute stressée à l’idée de me retrouver avec lui. Bon d’accord, j’étais avec lui depuis deux semaines, mais tout de même. Bref, une fois prête, la sonnette retentit, et deviner qui c’était : Anthony ! En un rien de temps, j’étais déjà logée timidement dans ses bras.

J’avais dix huit ans à l’époque. Il était mon premier amour. Pas comme les autres. Un peu comme mon père, tout en étant beaucoup plus mystérieux et impénétrable en apparence. Nous devions rejoindre les autres sur la plage de la mer Egée. C’était à une bonne demie heure en voiture. Anthony ne me parlait qu’en Grec mais s’il avait une bonne connaissance du français et de l’anglais. Les conversations étaient toujours longues et riches en savoir. L’une des choses que j’aimais chez lui. Son savoir faire.

Nous arrivions enfin sur place et là, les autres étaient en vue. Devant nous se dessinait la mer que j’ai vu tant de fois. Pourtant, ce jour là, elle me paraissait bien différente. Plutôt … scintillante. La journée se passa sans encombre. Jusqu’au moment où nos compagnons avaient décidés de nous quitter. Nous sommes restés là, assis l’un contre l’autre face à l’eau et au soleil couchant. Je me souviens de ces tendres mots qu’il me glissait au creux de l’oreille. La nuit tombée, nous avons regagner la maison d’un de nos amis et y avons passer la nuit.

***


Voilà pourquoi j’aimais par-dessus tout la mer. Elle a été témoins de l’amour qu’il avait porté pour moi. Ainsi pour celui de mes parents. Je repose mon attention sur Adélie. Elle qui n’avait toujours pas bougé. Je me surprends à lui sourire. Que vous, je suis sûre que Danaé aurait eu le même air angélique qu’elle. Je jette un coup d’œil à ma montre : 12.03.


« Tu me fais penser vaguement à quelqu’un. »
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeDim 31 Aoû - 18:26

Damara me tient la main. Je me suis habituée à son contact, je me sens rassurée par cette pression, cette chaleur qui m'enveloppe. Je fais face à la mer, immense, impressionnante. Damara s'approche de l'eau, je la suis. Je peux sentir quelques gouttes sur mon visage lorsqu'une vague vient s'écraser sur la plage, un peu plus violente que les précédentes. J'aime le contact de l'eau sur mon visage. J'aime sentir le vent. J'aime ces sensations sauvages, j'aime me sentir insignifiante sous ce ciel éclatant, sous ce soleil chaleureux.
J'ai l'impression d'être une petite fille qui tient la main de sa maman. C'est doux, c'est agréable. Sécurité, tendresse... Sauf que ce n'est pas maman. Maman est loin, je l'ai trahie. J'avais promis... j'avais promis de changer, de faire des efforts.
Rien.
Je n'ai pas tenu la moindre de mes promesses.
Je l'ai trahie.
Pardon, maman...
Une boule se forme dans ma gorge. Pardon, maman. J'ai envie de pleurer. Mais je n'en fais rien. Les quelques gouttes salées qui ont chu sur mon visage ne sont pas des larmes.
Oublie ça...

Damara me parle une nouvelle fois.
Une question. Sur la mer. Sur mon contact à la mer, plutôt.
Non. Je ne venais pas souvent à la mer. C'est loin, la mer. Environ quatre ou cinq heures de route. Et il y a trop de monde, à la mer. J'y suis allée quelques fois, étant enfant. Puis de moins en moins. En automne, c'est agréable. Mais en automne, il y a l'école. Les parents travaillent. Alors on n'y est allés que très rarement. Une fois en hiver, aussi, je crois. C'était désert. Le vent soulevait le sable, le logeait dans nos cheveux. La tempête se déchaînait. C'est beau, la mer en hiver, quand le mistral souffle et que l'orage gronde. Magnifique. Je pourrais l'observer pendant des heures et des heures. Mais bon, c'est rare. Voilà.
La mer, la mère...
Sécurité, douceur, affection, amour...
C'est peut-être pour cela que tant de gens aiment la mer.
Maman...

« Non... »

Je ressens le besoin d'ajouter quelque chose. Pour expliquer, pour me justifier. Quelque chose comme ça.

« C'est trop loin de chez moi. »

Voilà. J'ai parlé d'une manière assez fluide, j'en suis presque fière.
Presque.
J'ai du mal à enregistrer les événements récents. Chez moi. C'est ici, maintenant. Pour toujours. On ne ressort pas de Sadismus, c'est ce que j'ai cru comprendre. Il n'y a plus de maison, il n'y a plus de parents. L'Auvergne est loin. Je ne reverrai plus les montagnes et les forêts de mon enfance. Je ne reverrai plus jamais papa et maman... Je n'existe plus, je ne suis plus qu'un numéro.
Pleurer.
Mais il y a Damara.
Oublie Sadismus pour aujourd'hui...
Maintenant, il faudrait que je retourne sa question à Damara.
Parce que c'est comme ça qu'on fait une conversation. Une conversation, c'est à double sens. Sinon, ça meurt. Et puis parce que je le veux. Je veux que ce partage continue. Seulement sa réponse, je crois la connaître. J'ai cru comprendre que Damara aime la mer. Elle doit donc y aller souvent...
Et alors ? Peut-être qu'elle a envie de raconter ?
Humpf.
Un effort.
Allez, un tout petit effort.

« Et... et vous ? »

Grand moment. Là, j'ai de quoi être fière. Un peu, quoi... Enfin par rapport à d'habitude, évidemment. C'est clair que dire "Et vous ?" est à la portée du premier imbécile venu. Mais pas de moi.
Bon, j'ai pas encore adopté le 'tu'. Chaque chose en son temps. J'espère juste que ça ne la dérangera pas.

Le silence, ponctué du cri strident des mouettes, du bruit des vagues, du sifflement léger du vent. Là, tout de suite, j'aimerais devenir un oiseau, et m'élancer dans les yeux, partager le vol des mouettes ou bien des aigles majestueux, me laisser porter par le vent, fondre vers le sol et puis remonter brusquement... Un oiseau, libre. Oublier les barbelés, oublier ma cellule, oublier le monde entier... M'oublier. Ne sentir que le vent dans mes cheveux, la vie dans mon corps, un peu d'eau dans les yeux. Pouvoir parcourir le monde sans limites, sans contraintes, sans peurs.
Si le bonheur existe, c'est à ça qu'il doit ressembler.
Plénitude, sérénité.
Solitude, aussi.
Nous nous taisons un petit moment. Je profite de ce spectacle. Je crois que Damara aussi. Je me sens bien. Pour une fois, je ne ressens pas ce besoin de parler, de rompre le silence. J'inspire profondément, j'expire, je me sens bien. Timidement, j'approche ma main de la sienne. Besoin de sa chaleur, de son réconfort. Je suis une petite fille perdue, j'ai besoin de soutien. Même si ça m'écoeure. Même si je m'en veux. Même si j'ai la sourde impression de me rendre ridicule, de rechercher la pitié. Nos mains se frôlent. Frisson. Mais je n'ose pas prendre la sienne dans la mienne. Pudeur. C'est trop nouveau, pour moi, cette proximité, cette douceur et cette tendresse venant d'une presque inconnue. Je n'ai pas l'habitude, je suis un peu gênée. Je ne sais pas être tendre, je ne sais pas être proche d'autrui.
Je dois être rouge, à présent.
Ecarlate.

Finalement, c'est Damara qui brise le silence, sur un sourire, sourire que je lui rends d'ailleurs. Damara a un don pour me mettre à l'aise. Il a fallu un peu de temps et peut-être que ça ne durera pas, mais je suis bien. C'est rare.
Je lui fais penser à quelqu'un.
Ah.

« ... »

Cela me gène terriblement, mais je ne sais pas quoi répondre.
Pourtant, je ne veux pas la contraindre au silence. Je ne veux pas être celle qui aura définitivement mis fin à cet échange, à ce partage.
Peut-être que je pourrais lui demander qui est cette personne à qui je lui fais penser ? Hum... Blocage. Les mots ne sortent pas.
Après quelques instants où la magie a opéré, serais-je redevenue moi-même ?
Pardon, Damara. J'aimerais pouvoir dire quelque chose, mais je n'y arrive pas... Les mots se bloquent, les pensées elles-mêmes ont du mal à être traduites dans le langage de la bouche.

« Désolée... 'Suis pas très bavarde... »

Mes mots se meurent et leur fin se perd dans le vent. Je crois bien que la fin est inaudible. Damara n'a pas du comprendre ce que j'ai dit. Je l'espère du moins. C'est parce que cette phrase est sortie toute seule. Elle n'était pas volontaire. Ce n'étaient que des pensées... mais des pensées qui ont franchi le pas de mes lèvres.
Pardon pour ces mots, aussi... Ces mots qui te mettront peut-être mal à l'aise. Parce que c'est égoïste, de chercher la pitié. Au fond.
Pardon pour tout.
Pardon... Mais prends-moi la main.
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeDim 31 Aoû - 20:40

Au creux des vagues, mon regard plonge. Mon cœur quand a lui, galope au plus loin, là bas. Là où mon passé n’aurait pas été trompé par le destin. Avec eux. J’écoute attentivement les simples paroles d’Adélie. Je sens aussi son envie d’être rassurée. Sa main frôle la mienne. Un appel. Au début, je ne fais rien. Je me contente d’attendre un peu, cherchant toujours une faille à ce petit bout de femme. Une femme enfant. Une tristesse profonde dort en elle, sa voix me le prouve. Toujours en ne fixant que devant moi, je viens saisir à nouveau sa main. Lui faire comprendre que ma présence est bien réelle et à sa disposition.

Danaé. Me pardonneras-tu un jour ? Je me sens coupable de ta perte. Même si au travers tes rires d’enfants enfuient loin dans mes rêves, tu me murmures que tu ne m’en veux pas, je ne peux m’empêcher de ressentir toujours ce poids sur le cœur. Et mon ventre vide. Une partie de moi c’est envolé contre son gré. Parce que oui, je savais que tu ne voulais pas partir, que tu avais envie de découvrir. Tu me l’as dit certains soirs …


17 Mars 2003 : Une nuit comme les autres dans les bras d’Anthony. Baigné dans l’amour et la tendresse. Les « je t’aime » se murmurent au creux de l’oreille et se prouvent sur les lèvres. Sa chaleur sur ma peau, couvrait encore mon état de pureté. Ses baissers frôlant mon âme … J’étais loin de m’imaginer que ce serait la nuit de ta conception lente dans mon ventre.

Début Avril le 13 : C’était durant le cours d’Epigraphie et numismatique. Je me sentais très mal, j’ai dû quitter le cours à cause de crampe au ventre. Mes maux se sont traduits par des vomissements involontaires. Je ne comprenais pas ce qu’il m’arrivait. Peut-être avais-je mangé quelque chose de mauvais ? Non. J’ai une alimentation parfaitement équilibrée et je ne suis que rarement malade. Ce n’était qu’un début …

Dans la même semaine : Je passais certainement plus de temps dans les toilettes que devant mes cours. Cela a duré pendant un bon moment. Sebasten s’inquiétait de plus en plus pour mon état de santé. Alors, viens le jour où je devais aller faire un contrôle chez le gynécologue. Sebasten m’attendait dans la salle d’attente. Il avait en vu de m’amené par la suite chez le docteur. S’il avait su que cela était inutile … J’attendais patiemment mon tour, avec ce mal de ventre qui me prenait assez souvent. Bref, vient enfin mon tour. Les mots s’échangent, les sourires aussi. J’expliquais à la femme mes douleurs au ventre.


« Très bien Damara. Si tu veux bien prendre place. »

Je n’aimais pas du tout qu’on m’enduise le ventre de cette visqueuse chose. De plus, l’instrument était d’un froid polaire. La dame observait attentivement l’écran pendant que moi, je fixais les dessins sur son mur. Quand elle eut fini, j’ai pu remarquer un petit sourire au coin de ses lèvres. Après un bref silence, les mots suivent retentir un bon moment dans ma tête : « Tu es enceinte depuis deux semaines. ». Choque. Comment est-ce possible ? Anthony se protégeait et je prenais ma pilule. J’étais un peu déboussolée. Le pire restait à venir ; avouer à mon père que mon mal était dû à un bébé … Je suis à peine sorti de la salle, que j’ai fondu en larme dans les bras de mon père. Entre deux sanglots, j’ai réussi à lui murmurer : « Je suis enceinte … ».

17 Avril : Le matin de la décision arrivait. Sebasten était contre que je garde l’enfant. Que cela allait me gêner dans mes études et que j’avais encore le temps. Bien sûr, être enceinte à seulement vingt ans. Du côté d’Anthony, c’était autre chose. Il me laissait le choix, et quoi qu’il arrive. Il sera là pour moi … Nous. J’ai tout de même réussir à convaincre mon père. L’histoire de ma mère l’affecte énormément. Il avait surtout peur que j’y perde la vie. Jouant au peigne fin, je le rassurais que tout irait bien. J’allais mettre au monde cet enfant …

Fin Avril : 1 mois c’est écrouler, et mon ventre commence légèrement à s’arrondir, rien d’exceptionnel. L’une de mes amies m’a regardé avec un petit sourire en me demandant si je n’avais pas grossi. Je poursuis toujours mes études et mes maux de ventre ont légèrement cessé.

27 Juin : Aujourd’hui, je passe la nuit chez Anthony. Je suis déjà de trois moi et demi. Quelques jours plutôt, j’ai appris qu’il s’agissait d’une petite fille. Mon compagnon et moi étions seuls chez lui. Cela faisait plus de deux ans maintenant qu’on était ensemble. J’étais tranquillement couché contre lui, quand il se redresse pour venir se tenir au dessus de ma personne. Etonnée, je le voyais remonter mon t-shirt pour venir caresser mon ventre déjà joliment arrondis. Il posa son oreille en écoutant … «
je l’entends !». Je souris à mon tour. Puis il y déposa un baiser avant se venir joindre ses lèvres contre les miennes. Danaé était le nom qu’on lui avait choisi …

1 Juillet : Je sens de temps en temps Danaé dans mon ventre. Ce soir là, je suis restée bêtement à regarder mon ventre tout en le caressant. Avec en fond, la boîte à musique de ma mère. Quand elle était enceinte de moi, elle me la faisait écouter. Je m’endormais ainsi en elle … Danaé, elle. Manifeste une bonne volonté. J’entends ses murmures : « maman ». Mes nuits sont douces, elle me parle quand elle ne dort pas …

Fin Juillet : Depuis quatre mois, son cœur bat dans mon ventre. Heureuse d’être mère. Mon bonheur fleurit comme une fleur. Mais se fanera aussi rapidement … Heureusement que Sebasten était là ce soir là. Je me sentais très mal. J’étais prise de crampes insupportables, hurlant de douleur. Je ne comprenais pas ce qu’il se passait. Mon père lui, était nerveux pas mon état. Si bien, qu’il me conduit sans plus attendre à l’hôpital. A peine couché sur se lit blanc, mon regard se posa sur mes cuisses, en sang. J’étouffe un crie de terreur avant de m’évanouir.

Fin juillet … Elle a quitté la chaleur de mon ventre.


Le bruit des oiseaux me fait rapidement revenir sur terre. J’ai perdu une partie de moi. Je regarde Adélie et remarque la marque d’une ligne transparente. Des larmes ? Non Adélie ! Instinctivement, je viens la saisir dans mes bras. La serrant tout contre moi, c’est des moments comme ça que je n’aurai jamais avec ma propre progéniture.


« Ce n’est rien … »
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeMar 2 Sep - 11:49

[Hmpf, pas très inspirée aujourd'hui ><]

Damara ne répond pas, mais elle me serre la main. Je ne bouge pas, je ne réagis pas. Mais ça me fait un bien fou. Même si je ne l'avouerai jamais. La mer s'étend devant nous, à perte de vue, froide, glaciale, même. Les mouettes tournent toujours dans le ciel. Je jette un regard à la jeune femme. Elle fixe la mer, elle aussi. Elle semble perdue dans ses pensées. Serait-ce une pointe de tristesse que je peux lire dans ses yeux ? Je reporte le regard sur l'immensité qui me fait face. J'aimerais pouvoir lui demander, la rassurer comme elle me rassure, lui montrer que je suis là pour elle, moi aussi. Un échange, ça se fait à deux. Seulement voilà, je ne sais pas échanger. Et je fixe la mer. Je m'en veux. Peut-être que je me trompe, peut-être que Damara n'est pas triste. Mais peut-être qu'elle l'est. Peut-être qu'elle n'attend qu'une chose, que je lui parle... Mais désolée, je ne sais pas faire ça.
A quoi peut-elle bien penser ? A la mer ? Aurais-je posé une question que je n'aurais pas du poser ?
L'anxiété me gagne. Mais je m'efforce de ne pas le montrer et de ne pas la laisser prendre le pas sur la raison. Des gaffes, tout le monde en fait. Ca arrive. Alors même si j'en ai fait une, je ne dois pas me mettre dans cet état qui fait mon quotidien.

Damara semble soudain sortir de ses pensées et elle me prend dans ses bras. Ses paroles sont énigmatiques. Est-ce qu'elle répond à ma remarque de tout à l'heure ? Est-ce qu'elle justifie son moment d'absence ? J'ai l'impression qu'elle a autant besoin que moi d'être enlacée. J'aimerais pouvoir la serrer dans mes bras, moi aussi... Mais j'ai beau essayer de me convaincre, je n'y arrive pas. Je reste bras ballants, la tête plus ou moins enfouie dans son épaule avec une furieuse envie de me mettre un coup et de me secouer comme un prunier. J'espère que ça ne se voit pas. Mais dans des moments comme ça, je m'en veux terriblement. J'ai envie de me laisser aller, de m'abandonner entre les bras rassurants de Damara, mais je suis tendue. Je repense à l'enterrement de ma grand-mère. Je ne parviens pas à me défaire de cet événement, je ne parviens pas à oublier. Pourtant, elle a du se sentir apaisée, quand elle est partie. Elle avait trop souffert. Je n'ai pas le droit de ne pas accepter sa mort. Pourtant c'est ce que je fais. Et ce jour-là... Ce jour-là je me suis sentie véritablement mal. Une chape de solitude m'entourait cependant que ma famille s'enlaçait en pleurant. Douleur dans mon coeur.
Seule...
Une larme.
Et cette fois, ce ne sont pas les embruns qui en sont l'origine.
Je serre les poings, fronce les sourcils. Je n'ai pas le droit de pleurer. Non, je n'ai pas le droit. Je ne veux pas donner de moi une image trop pitoyable. Elle ne doit pas être très reluisante, pour le moment. Alors, ne pas pleurer.
Une autre larme.
Merde, ça suffit ! Pourquoi est-ce que je me suis remise à penser à ce jour-là ? Je pense trop, je n'arrête pas de me le répéter.

Je ne me suis jamais vraiment expliqué l'origine de ma solitude. J'ai toujours été timide, je ne sais même pas à quel moment j'ai commencé à souffrir de cette solitude. Je l'aimais, je la hais maintenant. Mais elle dure et perdure, chassant tout le reste. Où que je sois, quel que soit mon entourage, je me sens seule. Au milieu de ma famille, au milieu de ceux que je prenais pour mes amis, au milieu d'une foule de parfaits inconnus. Seule et désemparée. Il a fallu que je me retrouve dans une des pires prisons du monde pour que je me sente parfois moins seule. Avec Bella et Siriel, j'ai réussi à me sentir entourée, au moins par moments. Avec Damara, c'est pareil. Tous trois ont une sorte de présence et de douceur qui fait que je ne suis pas seule. Pas toujours.
Mais mes phobies ne sont pas guéries pour autant. Elles sont toujours là, bien accrochées, prêtes à supporter n'importe quel cahot de mon chemin. Elles ne se laisseront pas désarçonner aussi facilement.
Je m'efforce de tourner le regard vers la mer. Cette mer qui me fait me sentir mieux. Elle est toujours aussi belle et immense. Le vent souffle toujours, faisant s'élever les mêmes volutes de sable. Les mouettes tournent encore dans le ciel, lançant de temps à autre l'un de leurs cris perçants. Ne plus pleurer. Sourire.
Pour Damara.
Ravale cette peine futile et sans raison d'être qui te pourrit la vie.
Et souris, surtout.
La vie peut être belle, tu le sais. Ta vie pourrait être belle, elle aussi. Ca ne tient qu'à toi. Tu as juste trop tardé, tu t'es trop appuyée sur des certitudes et des déceptions.
Oublie.
Et abandonne-toi à cette douceur maternelle qui t'enveloppe.

« Vous avez des enfants ? »

Je rougis.
Je ne sais pas pourquoi j'ai demandé cela. Je ne sais même pas pourquoi j'ai prononcé un mot. Peut-être parce que j'ai l'impression d'être dans les bras d'une mère pleine de tendresse... Peut-être que je commence à acquérir une certaine confiance en elle, au point de lui poser des questions. Mais après réflexion, je songe que mon interrogation était sans doute idiote. Si elle avait des enfants, elle ne serait pas partie à l'autre bout de l'Europe. A moins que le père des enfants potentiels soit ici, lui aussi... Mais je ne pense pas qu'élever des enfants dans une prison soit le mieux pour eux... Maintenant que j'ai posé cette première question, d'autres me viennent, allez savoir pourquoi. D'abord, pourquoi est-elle dans cette prison, loin de ce pays qu'elle aime tant, alors qu'elle pourrait être historienne ou naturaliste ? Je lui demanderai peut-être, à l'occasion. Si j'arrive à poser une autre question. Enfin... Plutôt si cette question se pose de manière automatique. Apparemment, il n'y a que comme ça que j'arrive à placer un mot. Quand je ne m'y attends pas, quand je ne contrôle pas. Je ne suis pas maître de moi-même.
Allez, on se calme.
La tension n'apporte jamais rien de bon. Je le sais, j'en fais sans cesse l'expérience.
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Damara Galanis
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeVen 12 Sep - 17:54

Mon olympe est battit sur l’Acropole de mon cœur.

Loin des yeux, loin du cœur. Il y a des douleurs qu’on ne peut atténuer. Des absences qu’on ne peut remplacer, des personnes qui nous manquent sans jamais pour autant les oublier. Le temps, Cronos, on dit de lui que c’est un soigneur. Pourtant, il n’a jamais su réellement soigner mon manque d’eux. Je souris avec le céleste. Parce que la vie ne demande que ça. Elle ne nous demande pas d’être malheureux. Juste, d’être vivant. Adélie ne bouge pas, je la garde auprès de moi. J’en avais besoin. Même si je sais que le Dieu du temps jouera encore au éphémère, je ne peux m’empêcher de profiter et d’être heureuse. Un doux vent vient souffler, faisant jouer les cheveux sombres de la demoiselle sur mon visage. C’est un peu la même scène qu’avec Phaedra. Sauf qu’elle, elle venue d’elle-même chercher un peu de ma chaleur maternelle, une mère de substitution. Je relâche mon étreinte après la question d’Adélie. Tout gardant le sourire, je lui dépose mes lèvres sur son front en lui murmurant :


« J’aurai dû … »

C’est alors que je viens jouer dans ses yeux. Oui j’aurai dû avoir un enfant. Peut-être même deux, qui sait. Seul le futur le savait. Je me redresse lentement, me tenant debout, je viens saisir la main de ma protégée avant de la traîner avec moi un peu plus près de l’eau. Pieds nus, nous n’avons pas à craindre d’être mouillées. C’est même plutôt agréable. Une vague me surprend et vient inonder le sable sous nos êtres. Sentir le contact d’un élément naturel, l’eau. Ce n’est pas comme le vent, lui ne fait que vous caresser la peau et s’en va. Alors que l’azur même, prend le temps de vous toucher plus profondément, jusqu’à rester accrocher à votre chair pendant quelques minutes. Sa vie en dépendrait presque. Nous marchons, entre eau et sable, laissant derrière nous, nos empreintes tantôt effacées par une vague fougueuse. Confession pour confession.

« Il y a cinq ans d’ici. Je suis tombée enceinte. Je l’ai perdu quatre mois après. »

Cela ne sert à rien que je me dise que c’est ma faute. Oui, dans le fond ça l’est. Mais je ne peux plus rien n’y faire. Et pleurer sur ce passage de ma vie, ne me fera pas avancer. Plutôt reculer, je dirai. Une vie a une limite, c’est à nous de voir jusqu’où nous sommes prêt à aller. Sans excuse. Pourtant, Helene en avait une elle … Me donner la vie. C’est tout ce qui lui suffisait. Me savoir vivante et profiter pleinement de ma liberté. D’être moi. Damara. Et non quelqu’un d’autre. Je vois ça comme une chance. J’aurai beau tombé comme ces dernières années, je trouverai toujours le moyen de me relever. Le sourire aux lèvres … Les poussières sont comme mes douleurs, elles partent au gré du vent, mais reviennent toujours se poser sur mon cœur. Plus tard dans le temps. Les gens importants …

« Tu as eu le temps de te faire des amis ici ? »

Ou même de simples connaissances. Sa main dans la sienne, mes pensées s’en vont durant une fraction de secondes vers Mademoiselle Bella et Siriel. La petite sphère est d’ailleurs toujours dans ma poche, elle ne me quitte plus. Elle et son corbeau. Je compte prochainement les revoir tous les deux. Je finirai bien par les retrouver dans la prison. Un peu plus loin, un couple de personnes âgées -allemand je suppose- regardent les vagues depuis la berge. Vivre jusqu’au bout. Chacun à sa manière. Silver lui, le fait à travers son état énigmatique. Hope, à travers ceux qu’elle aime. Et moi, comment je vis ? Avec le temps …
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Adélie Roche
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeDim 14 Sep - 15:47

A la révélation de Damara, j'ai une sensation étrange. Tout ceci est irréel, ça n'existe pas. J'ai une impression d'absence, de dépersonnalisation. Comme si je sortais de mon corps. Tout bascule, un monde s'écroule. Refuser la mort, refuser ce qui fait mal. Et vivre dans un monde intérieur, un monde que l'on crée comme on l'entend. Un monde de romans ou de jeux vidéo... Certes cruel, mais où les bons gagnent toujours. Je n'arrive pas à réaliser ce que signifient les mots de Damara. Je ne sens pas son baiser sur mon front, je ne vois pas ses yeux dans les miens, je ne sens pas sa main qui vient prendre la mienne pour m'entraîner au plus près de la mer. Je ne sens rien de tout ça, je suis comme ailleurs. Ca ne me regarde pas, ça n'est pas ma vie. Je ne sais pas ce que Damara a vécu. Mais je ne parviens pas à me convaincre que c'est la réalité. L'Amour, c'est quelque chose de beau, quelque chose qui vous permet d'avoir un enfant... Un enfant, ça ne peut pas mourir avant même d'être né, ce n'est pas possible !
Fausse couche.
On pense que c'est rare, on pense que ça ne vous touchera jamais. C'est quelque chose de lointain. Comme la Mort. Et puis un jour, on se rend compte que ça n'est pas si loin que ce qu'on pensait. Ca vous attend là où l'on ne l'attend pas, ça vous prend par surprise, ça vous prive de tout le bonheur que vous auriez aimé goûter et que vous méritiez.
C'est comme tout un monde qui s'écroule.
C'est possible, ça existe.
Je sais bien que je suis trop fragile, que je me brise pour quelque chose dont Damara s'est relevée, alors qu'elle est celle qui a vécu ce malheur. C'est comme si l'on brisait la bulle que j'ai construite autour de moi pour me protéger du monde. Il n'est pas bien dur de la faire éclater... Je l'ai remarqué à de nombreuses reprises. Mais visiblement, il est possible de me briser à de nombreuses reprises. Pardon, Damara, d'être aussi faible.
Une nouvelle larme.
Pour Damara.
Je crois.

Je regarde Damara. Elle a l'air un peu mélancolique... mais elle s'est relevée, cela se voit sur son visage. Elle a pansé ses plaies. Je crois que Damara va toujours de l'avant. Cela se voit dans son sourire et dans ses yeux. Damara est tout ce que je ne suis pas. Je l'envie. Mais ça ne doit pas être facile tous les jours. Damara a beaucoup de courage. Je n'aurai jamais sa force. Je suis une brindille que l'on casse entre deux doigts. Une brindille que même un enfant de deux ans pourrait casser, s'il le voulait. Damara, elle, fait face. Elle est souple, elle se relève. Un roseau. Quelque chose comme ça. Un roseau qui ploie lorsque le vent est trop fort, mais qui ne se brise pas. Tout en souplesse, tout en douceur. Oui, je crois que cette comparaison est assez... correcte, dirons-nous.
La brindille et le roseau.
Voilà une nouvelle fable humoristique pour Esope, un peu d'écriture pour lui en perspective.
Humoristique, ouais. Pour sûr.
Ah ah.
Quel humour.

Même si elle est forte, j'ai envie de faire quelque chose pour Damara. Ca n'a pas du être facile de se relever après ça. Elle a du souffrir... Peut-être que des paroles réconfortantes... Mêmes si leur utilité est largement réduite, peut-être que ça lui fera plaisir. Ou bien la serrer dans mes bras. C'est toujours agréable de se sentir protégé par les bras d'autrui, je le sais bien. Alors peut-être... Un effort...
Je lève le regard vers elle, comme pour me donner courage. J'inspire, et...
Non, je n'y arrive pas.
Désolée, Damara, je ne peux pas.

« Je suis désolée... »

Voix pitoyable, pour changer.
Je suis désolée, Damara. Vraiment désolée. Désolée pour ce que vous avez eu à supporter. Ca a du vous tomber dessus comme un piano sur votre tête au beau milieu d'une rue. Une surprise, vous ne vous y attendiez pas. Le bonheur était là, à portée de la main, et puis... Ce piano tombé du ciel, comme la punition sans aucune pitié d'une entité supérieure. Vous n'auriez pas du vous trouver là, au milieu de cette rue. C'est tombé sur vous, un incroyable pas de chance. Le hasard à joué aux dés, et c'est sur vous que c'est tombé. Le hasard est cruel, parfois. Et puis lorsque vous avez réalisé ce qui arrivait, c'est tout un pan de la rue qui a du s'ouvrir, et vous êtes tombée... de haut. De très haut. Parce que c'était impossible, ça ne pouvait pas être vrai. C'était votre enfant qui aurait du naître, le bonheur à portée de la main. Je suis désolée, Damara.
Et aussi...
Désolée de ne rien faire pour chasser cette mélancolie de votre regard, pour que vous ne vous sentiez pas seule au milieu de cette rue, dans un gouffre et avec un piano brisé sur la tête.
Désolée...

Je regarde la mer, je me sens mal.
Oppressée...
Coupable.
Coupable de n'être qu'un fardeau inutile, un poids mort.
Elle change de sujet. Elle ne veut sans doute pas s'étendre. Le gouffre est toujours là, à ses pieds, à attendre qu'elle ne fasse un faux pas pour l'avaler. Et lorsque l'on tombe dans un pareil gouffre, il est toujours difficile d'en sortir. En particulier lorsque l'on commence à ne plus vraiment en vouloir sortir. Le gouffre est votre ennemi avant d'être votre seul ami. Il vous trompe, il vous dupe. Et puis vous n'avez plus vraiment le choix. Une sorte de syndrôme de Stockholm appliqué au gouffre. J'en fais l'expérience tous les jours. Un cercle vicieux. Ne jamais tomber dans le gouffre, c'est un conseil que je peux donner.
Mais que je donnerai jamais à personne, parce que je ne parle pas.

Des amis ? Non, pas vraiment... J'ai rencontré peu de personnes, jusque là. Il y a bien Siriel et Bella. Je les aime bien, tous les deux. J'ai envie de les considérer comme des amis. Seulement, le puis-je vraiment ? Je m'attache trop et trop vite, on me l'a toujours dit. Il est possible que tous deux m'aient déjà oubliée. Après tout, nous sommes restés ensemble un moment, moment certes agréable mais relativement court en comparaison d'une vie. J'ai envie de les appeler 'amis'. Mais en ai-je le droit ? Peut-il y avoir une amitié à sens unique ? Je l'ignore... Et je ne sais même pas si ce sentiment-là est à sens unique. Parce que je ne les ai pas revus, depuis. Je suis restée cloîtrée chez moi, et puis c'est tout. Qu'en disent-ils, eux ? Seraient-ils contents de me revoir ? Ou bien... indifférents ? J'aimerais bien le savoir, au fond. Mais je ne ferai rien pour cela. Parce que j'ai trop peur de la réponse. Je n'ai jamais vraiment été très... sociable. Alors j'ignore si les gens peuvent vous considérer comme des amis alors qu'ils ne vous ont vu qu'une seule fois. Moi, je le peux. Et je ne dois pas être bien différente d'une autre. Mais... comment en être sûre ? Je n'ai aucun référentiel solide pour comparer. Rien qui puisse me permettre de savoir. Alors...
Que répondre ?
Je l'ignore.
Les vagues viennent se briser sur la plage inlassablement, les unes à la suite des autres. Sans se disputer. L'une après l'autre. Comme si quelque chose les régulait pour qu'elles gardent cette régularité. Parfois, l'une d'entre elles vient nous lécher les pieds. Sensation de froid... qui disparaît dès lors que le soleil a pu sécher ma peau.
Je regarde Damara.

« Je sais pas trop... »

C'est le cas de le dire. Mais peut-être que développer un peu ne te tuera pas. Si j'étais une autre que moi, je crois que j'aurais souri avec condescendance face au peu d'efforts que je fais.

« J'ai pas rencontré grand monde... Mais j'aime bien deux prisonniers que j'ai rencontrés à mon arrivée. »

Deux prisonniers, c'est tout.
Mais elle ignore qu'ils sont les seuls que j'ai rencontrés, à part les deux gardiens qui m'ont escortée à ma cellule sans un mot.
Oui, deux. C'est peu. Mais c'est tout.
Lui donner leurs noms n'apportera rien, elle ne peut pas connaître tous les prisonniers qui logent ici. Et même si elle les connaît... Quelle importance, au fond ? Peu lui importe sans doute de connaître les noms des deux seules personnes avec qui j'ai parlé un peu. J'ai envie de lui sortir le dessin de Siriel, pour lui montrer. Il est magnifique et je le garde précieusement. Mais quelque chose m'en empêche. La même chose qui m'empêche toujours de me sentir libre, probablement. Quelque chose qui se trouve à l'intérieur de moi et qui m'enchaîne au regard des autres.
Eh non, toujours pas libre.
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MessageSujet: Re: Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv]   Bonne conduite, une liberté éphémère.[pv] Icon_minitimeVen 19 Sep - 6:39

On dit que la première femme du monde était Eve. Dans nos mythologies, nous parlons plutôt du monde elle-même ; la terre. Gaia. C’est d’elle que vient la vie, elle qui la donne. C’est tout un tour, une fois mis sur pied, elle rependra un jour ou l’autre la vie qu’elle a donnée, jadis. Gaia est une femme, féministe. La Mère des mères. La matrice de la création. Moi comme ou une autre, nous avons été ou seront, ou bien est, une porteuse de vie. Nous sommes reliées sans vraiment le savoir. Mais tout cela n’est qu’un détail face à la mer et au ciel. Le monde est bien plus vaste, mais reste en son centre : le bourgeon de la vie. Pour preuve, sur les rochers au loin, vole un aigle. Non loin, son nid doit être niché, trainant dans sa chaleur, des œufs peut-être éclosent. Une vie qui se répète à perpétuité. On avance, même si on ne regarde pas derrière, on aura toujours nos souvenirs qui nous courtent après, les meilleurs comme les pires. Mais qu’importe, tant qu’on vit avec le sourire. Physiquement libre ou non, nos esprits ne seront jamais enfermés. Parce que seuls eux, sont capables de nous évader rien qu’en fermant les yeux. Combien de fois, ne me suis- je pas retrouvée sur mes terres tout en étant en Allemagne ? C’est à nous de le vouloir. Sans crier sur nos silences, de vouloir se montrer insolent envers la vie. L’espoir humain est facile d’oublie, parce qu’on a tendance à se dire qu’il est impossible de « faire face à la vie. ». Alors que dans le fond, si elle est là, ce n’est pas pour nous mettre à genoux, la vie n’est pas un monstre, ni une hantise. Elle est juste en nous, notre reflet, même au travers les autres pour certain. J’ai peut-être perdue une partie de ma vie, mais je suis toujours debout, par moment perdue, mais je retrouve vite mon chemin. Peut-être grâce aux gens qui me sont chers.

Mon visage se tourne vers le ciel, ou plus précisément le soleil. Parce qu’il faudrait voir en lui plus qu’une boule de feu. Le Soleil ou Hélios, fils d'Hypérion et de Basilée, fut noyé dans l'Eridan par les Titans, ses oncles. Basilée, cherchant le long du fleuve le corps de son fils, s'endormit de lassitude, et vit en songe Hélène qui lui dit de ne pas s'affliger de sa mort, qu'il était mis au rang des dieux, et que ce qui s'appelait autrefois, dans le ciel, le feu sacré, s'appellerait désormais Hèlios ou le Soleil. Les Grecs et les Romains l'appellent très souvent Phébus et Apollon. Cependant, les anciens poètes font ordinairement une distinction entre Apollon et le Soleil, et, reconnaissent en eux deux divinités différentes. Ainsi Homère, dans l'adultère de Mars et de Vénus, dit qu'Apollon assista à ce spectacle, comme ignorant le fait ; et que le Soleil, instruit de toute l'intrigue, en avait donné connaissance à Vulcain. Hélios s'éprit d'un vif amour pour Rhodos, fille de Neptune et de Vénus, et nymphe de l'île à laquelle il donna son nom. Il eut de cette nymphe sept fils, les Héliaques, qui se partagèrent l’île de Rhodes. Celte île fut consacrée au Soleil, et ses habitants, qui se disaient descend des Héliaques, se vouèrent particulièrement à son culte. Ce dieu aima encore et épousa Perséis ou Persa, fille de Téthys et de l'Océan ; il en eut Éétés, Persé, Circé et Pasiphaé. Le culte du Soleil était répandu dans tout le monde ancien. Les Grecs l'adoraient et juraient, au nom de cet astre, entière fidélité à leurs engagements. Sur une montagne près de Corinthe, il y avait plusieurs autels consacrés au Soleil, et, après les guerres médiques, les habitants de Trézène dédièrent un autel à Hèlios libérateur. Chez les Égyptiens, le Soleil était l'image même de la divinité. Une ville tout entière lui était consacrée, Hél olis. Ovide s'est plu à faire la description du palais du Soleil : c'est un séjour de cristal, de diamant, de pierres et de métaux précieux, tout resplendissant de lumière : le dieu siège sur un trône plus riche et plus brillant encore que le reste du palais : telle est la lumière qui étincelle et jaillit de toutes parts, que l'œil d'un mortel n'en saurait soutenir l'éclat. Hèlios, dans son appareil de splendeur, monte le matin sur son char attelé de chevaux qui ne respirent que le feu et l'impatience, et il s’élance dans le ciel par sa route accoutumée, dès que l'Aurore lui a ouvert les portes du Jour. S'il lui arrive parfois d'être en retard, c'est, disent les poètes, qu'il s'est oublié dans la couche de Thétis, fille de Nérée, la plus belle des nymphes de la mer. Le soir, il descend au sein des ondes afin de goûter un repos bien mérité, pendant que ses chevaux répareront aussi leurs forces, afin de recommencer bientôt après leur course quotidienne avec une nouvelle ardeur. On le représente d'ordinaire sous les traits d'un jeune homme à la chevelure blonde, au visage brillant et empourpré : il est couronné de rayons, et parcourt le Zodiaque sur un char tiré par quatre chevaux. Les anciens le représentaient encore par un œil ouvert sur le monde. Histoire et légende. Notre mythe. Je suis approximativement sur que si j’avais demandé ce que représentait le soleil à Mademoiselle Bella, elle m’aurait répondu qu’il s’agirait qu’une boule de feu, logé peut-être au creux de notre cœur, ce qui nous réchauffe. Silver, lui, aurait certainement été plus énigmatique. Choisissant un seul adjectif pour le qualifier … Sphère. Comme celle qui traine dans ma poche.

Un peu plus loin, se dessine un rocher, assez haut pour ne pas être engloutit sous les vagues, mais assez proche de l’eau pour être pratiquement dedans. J’entraine Adélie avec moi, grimpant avec souplesse sur le fameux ‘’cailloux’’. De là, je me laisse tomber avec légèreté, assise face à l’eau sur une pierre chaude et sombre. Tout près d’elle, je sors de ma poche la fameuse bille. Le sourire me revient …


« En arrivant ici, j’ai dû accueillir mon premier détenu. Un jeune garçon … Au fur et à mesure de notre visite, il m’a gentiment offert ça. Et depuis, je ne la quitte plus. Silver Siriel … Plutôt grand. »

Je ne peux m’empêcher de lâcher un petit rire. Plutôt grand, en effet. Hors du commun, même nos hommes en Grèce ne dépassent généralement pas les un mètre quatre-vingt cinq. Les rayons de soleil se reflètent dans la sphère, je jette un coup d’œil à Adélie avant d’enchainer la suite de mes propres rencontres.

« Il y a eu aussi Mademoiselle Bella, elle m’a gentiment accueilli à mon premier jour. »

Et le lendemain, je l’ai malheureusement retrouvé dans les salles d’isolements. Mais ça, c’est le genre de détail à éviter. Que je m’en rappelle, j’ai tout particulièrement détesté l’odeur et l’aspect humide. Sans lumière. Même les rats ne devaient pas s’y plaire. On ne se refait pas. Je fixe rapidement ma montre : 15.47. Dans une histoire de quelques minutes, nous devrons peut-être regagner la berge …
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